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Les proches d’un Bédouin tué par la police en 2017 déposent plainte

Selon la plainte, qui réclame une indemnisation de 17 millions de shekels, des erreurs des policiers ont entraîné l'incident qui a tué Abu Al-Qiaan et un agent

Le véhicule qui a tué un policier israélien dans le village bédouin d'Umm al-Hiran dans le désert du Negev, dans le sud d'Israël, le 18 janvier 2017. (Crédit : Hadas Parush/Flash90)
Le véhicule qui a tué un policier israélien dans le village bédouin d'Umm al-Hiran dans le désert du Negev, dans le sud d'Israël, le 18 janvier 2017. (Crédit : Hadas Parush/Flash90)

La famille d’un Bédouin tué par balles lors d’un affrontement avec les forces de l’ordre en 2017 a déposé plainte contre la police israélienne, affirmant que ses propres défaillances et ses erreurs ont entraîné l’incident meurtrier.

Dans une plainte déposée devant la cour de district de Tel Aviv, la veuve et les enfants de Yaqoub Abu Al-Qiaan réclament 17 millions de shekels, a rapporté Haaretz dans la journée de mercredi.

Tandis que la police continue à affirmer qu’Abu Al-Qiaan a été tué alors qu’il commettait un attentat à la voiture-bélier contre les agents, tuant l’un d’entre eux, les enquêtes menées par l’organisation sécuritaire du Shin Bet et par le bureau des enquêtes internes de la police (PIID) ont mis en doute cette théorie.

La plainte, qui a été déposée au nom de la famille d’Abu Al-Qiaan par son avocat, Moshe Karif, affirme qu’une série de défaillances des policiers a entraîné cet incident meurtrier. Elle réclame des indemnisations pour diverses réparations consécutives à la mort de l’homme : perte de revenus, diffamation, espérance de vie raccourcie, douleur, souffrance et manque de plaisirs dans la vie, a noté le reportage.

Pendant l’incident, « tous les critères de responsabilité de la police israélienne ont été effacés », dit la plainte.

« La responsabilité de renseignements appropriés, la responsabilité de l’état de préparation des forces de l’ordre, la responsabilité d’informer correctement les agents en vue d’une opération nocturne, la responsabilité d’informer sur les différents scénarios possibles et les réponses à y apporter, la responsabilité des soins médicaux, la responsabilité de comprendre la vérité pour mener une enquête honnête au moment de l’incident, la responsabilité de la vérité », ajoute la plainte.

Yaqoub Mousa Abu al-Qia’an. (Autorisation)

L’incident était survenu quand la police était venue superviser la démolition d’habitations à Umm al-Hiran, un village non-reconnu que l’Etat voulait faire raser pour y permettre la construction d’une nouvelle ville juive.

Alors que les agents se regroupaient dans le village, le 18 janvier 2017, Abu Al-Qiaan, enseignant de 47 ans et père de 12 enfants, avait rangé des objets personnels dans son van et s’était éloigné de la maison, affirmant qu’il ne supporterait pas d’assister à sa destruction. Peu après, Abu Al-Qiaan avait essuyé les tirs des policiers et le véhicule qu’il conduisait avait alors accéléré en descente et avait été projeté sur un groupe d’officiers.

Le bureau du procureur d’Etat a clos l’enquête sur l’incident en 2018, estimant qu’il ne parvenait pas à déterminer si Abu Al-Qiaan s’était rendu coupable d’un acte de terrorisme après avoir réexaminé tous les éléments des investigations. Ces dernières, placées sous l’autorité du procureur d’Etat Shai Nitzan, avaient établi à l’époque que les agents qui avaient ouvert le feu sur Abu Al-Qiian, quelques instants avant que sa voiture ne renverse et ne tue Erez Levi, un agent, ne pouvaient pas être soupçonnés de délit criminel, et qu’ils avaient agi dans la légalité en faisant usage de leurs armes.

Le Shin Bet, le mois suivant, aurait toutefois exclu pour sa part un acte de terrorisme dans l’incident.

Au début de l’année, les médias ont annoncé que des investigations du bureau des enquêtes internes de la police sur l’incident avaient établi qu’Abu Al-Qiaan avait fait l’objets de tirs illégaux et qu’il était mort, abandonné, en se vidant de son sang, alors que la police, à ce moment-là, l’accusait à tort d’avoir commis un attentat terroriste.

Trois reportages simultanés ont été retransmis par la chaîne publique Kan et par les sites d’information de Haaretz et Sicha Mekomit. Sans citer les sources auprès desquelles ils avaient obtenu leurs informations, ils ont donné des détails très similaires sur l’enquête.

Les reportages ont notamment présenté des vidéos qui n’avaient jamais été diffusées jusqu’à présent et qui avaient été filmées par les agents présents lors de l’incident ainsi que des extraits des retranscriptions des interrogatoires – initialement menés par le Shin Bet et, plus tard, par le PIID – des policiers et des personnels médicaux qui s’étaient rendus sur place. Ces éléments rassemblés semblent indiquer de multiples défaillances dans la mort d’Abu Al-Qiaan.

Le Shin Bet, selon des informations, avait conclu que l’incident n’était pas une attaque préméditée contre la police dans les quarante-huit heures, mettant le point final à son enquête et la transmettant au PIID.

Le sergent Erez Levy, 34 ans, tué dans ce qui avait été initialement considéré comme une attaque à la voiture-bélier à Umm Al-Hiran, le 18 janvier 2017. (Autorisation)

Lors de sa révélation, le document du Shin Bet avait entraîné un tollé entre le service de sécurité, les hauts-responsables de la police et le ministère de la Justice, entraînant la reprise des investigations. Une enquête interne de la police avait blanchi les policiers au mois d’août 2017.

Nitzan avait ordonné la nouvelle enquête après les accusations lancées par Roni Alsheich, le commissaire de la police israélienne de l’époque, à l’encontre des hauts-responsables du PIID qui, avait-il dit, avaient enterré le document du Shin Bet.

Le PIID, qui est placé sous l’autorité du ministère de la Justice – et non de la police – avait rouvert l’enquête et interrogé une nouvelle fois les agents impliqués. Il avait soumis ses conclusions révisées – qui contredisaient apparemment le document du Shin Bet – à Nitzan au mois de décembre 2017 et ce dernier avait fermé le dossier au mois de mai 2018.

La police israélienne se tient à côté d’un véhicule qui a percuté des policiers dans le village bédouin d’Umm al-Hiran dans le désert du Néguev, le 18 janvier 2017. (Police d’Israël)

Dans les mois qui avaient suivi l’incident, la police avait répété qu’Abu Al-Qiaan avait délibérément projeté son véhicule sur les agents et tué l’officier.

Alsheich avait expliqué, à l’époque, que certaines indications laissaient penser que l’homme était lié au groupe terroriste Etat islamique.

Toutefois, ces affirmations ne s’étaient basées que sur la présence de manuels religieux musulmans – pourtant habituels – dans l’habitation d’Abu Al-Qiaan, aux côtés de trois copies de l’édition du journal Israel Hayom de ce matin-là – le quotidien le plus lu du pays – avec le titre en hébreu : « La bombe de l’Etat islamique abat un avion. »

Les enquêteurs du PIID n’avaient pas retrouvé de preuves concluantes dans les ordinateurs d’Abu Al-Qiaan, et avaient appris que les policiers n’avaient pas eu de mise en garde préalable concernant une attaque potentielle pendant l’évacuation qui avait été prévue.

Des activistes et d’autres avaient déclaré que la police avait utilisé une force excessive à Umm Al-Hiran, soulignant ce qui, selon eux, s’apparente à un racisme institutionnel contre les Arabes, notamment contre les Bédouins.

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