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Les vacances d’un médecin juif américain à Gaza

Ayant fait le choix de faire lui-même l’expérience du conflit entre le Hamas et Israël, le Dr Adam Kawalek s’est porté volontaire pour aider les Palestiniens lors de l’opération Bordure protectrice

Dr Adam Kawalek, photographié ici à Haïti en 2010, s'est porté volontaire dans la bande de Gaza cet été avec l'International Medical Corps. (Autorisation)
Dr Adam Kawalek, photographié ici à Haïti en 2010, s'est porté volontaire dans la bande de Gaza cet été avec l'International Medical Corps. (Autorisation)

Avant de quitter Los Angeles pour des « vacances » à Gaza, le docteur Adam Kawalek s’était rendu compte qu’il valait mieux faire attention à quelques détails.

Il a donc demandé en urgence un deuxième passeport américain où son deuxième prénom très hébreu, Zvi, n’apparaîtrait pas.

Il s’est rapidement marié avec son compagnon.

« Nous sommes allés à la mairie de Beverly Hills et avons fait un mariage éclair », explique Kawalek au Times of Israel.

« Cela me permettait d’utiliser Kawalek comme deuxième nom et de prendre le nom de mon mari, Navarro. Cela devait également protéger mon mari légalement si quelque chose m’arrivait », précise-t-il.

Dans les moments de paix, la bande de Gaza n’est pas un endroit confortable pour un Juif ou pour un gay. Mais avec un conflit militaire très violente entre le Hamas et Israël, le docteur sioniste voulait aider les Gazaouis frappés par le combat, et obtenir une expérience directe afin de comprendre le conflit israélo-palestinien.

Practicien du Programme spécialisé au Centre médical Cedars-Sinaï, Kawalek pensait que cette expérience directe valait la peine de prendre des risques, alors il s’est porté volontaire pour fournir une assistance humanitaire avec le Corps médical international (CMI).

« Lors de mon séjour, je ne semblais ni juif, ni gay. Je n’ai pas informé le CMI de mon identité religieuse ou de mon orientation sexuelle. J’ai seulement dit aux gens que j’étais à Gaza après être rentré à la maison », déclare Kawalek.

« Je protégeais mes identités afin de survivre ».

Le CMI, évoquant une politique générale de ne pas discuter des questions personnelles, a refusé de commenter le sujet.

Ce n’était pas sa première mission humanitaire

Kawalek, âgé de 37 ans, n’est pas un novice des missions humanitaires. Il a voyagé dans de nombreux pays en voie de développement lors de différentes missions humanitaires sous l’égide d’organisations d’aide en urgence. En 2010, il a passé un mois à Haiti à la suite du terrible tremblement de terre qui a touché le pays.

En 2011, il a fournit une aide médicale dans des régions rurales de l’Inde pendant un mois. Il est allé au Kenya pendant deux semaines en 2012 pour fournir des soins de base, et au Libéria pendant trois semaines en 2013 pour travailler aux urgences.

« Je préfère prendre ce type de vacances que de simplement rester allongé sur la plage », explique Kawalek.

Il évoque de nombreuses raisons pour lesquelles il consacre tellement de temps à ces missions humanitaires. Premièrement, il tire une satisfaction professionnelle des relations plus intimes qu’il développe avec les patients et leurs familles.

« Il y a moins de règles et de paperasse dans ces pays qu’aux Etats-Unis. On peut passer plus de temps avec les patients et avoir un impact sur leur vie de manière palpable », dit-il.

Kawalek aime voyager et découvrir le monde.

« Cela me rend plus posé, plus humble et reconnaissant de ce que j’ai quand je vois les luttes beaucoup plus difficiles que des personnes doivent mener dans des pays en développement », explique-t-il.

« Je considère que c’est comme une mitzva de faire ce genre de travail alors que j’ai eu une éducation privilégiée », confie-t-il.

Ignorer la haine et entamer un dialogue

Le docteur est conscient des attaques dont il fait l’objet de la part de bloggeurs et de commentateurs des réseaux sociaux qui le qualifient de gauchiste naïf, de Juif qui se déteste et de chien de garde pour avoir voyagé à Gaza afin d’aider les Palestiniens lors de l’opération Bordure protectrice.

Un camarade du lycée de Montréal, Laurant Wiesel, a écrit un blog sur le Times of Israel le 24 septembre en réponse à un article du journal The Daily Beast consacré à Kawalek : « Comme Adam le sait très bien, il aurait dû subir un destin pire que la mort si son identité avait été découverte. A la fois pour être gay, mais aussi pour être un Juif qui se cache. Il aurait très bien répondu à la définition du Hamas d’un sioniste. Pense-t-il réellement que les Gazaouis qu’il a rencontrés auraient protesté contre un tel traitement ou auraient regretté sa perte ? Malheureusement, en accord avec son portrait dans l’article, Adam insisterait probablement à dire que « 95 % des gens là-bas veulent simplement la paix », a écrit Wiesel.

Kawalek explique que ces critiques ne le dérangent pas et qu’il est prêt au dialogue pour débattre de ce conflit compliqué.

Il est confiant dans sa vision du monde et dans sa personnalité qui ont été forgées à bien des égards du fait d’appartenir à une double minorité, mais aussi par son éducation dans une communauté juive de Montréal. Sa famille culturellement juive l’a envoyé dans des écoles juives de la maternelle jusqu’au lycée. Il a grandi au sein d’une relation très proche avec des grands-parents plus traditionalistes et survivants de la Shoah.

« Nous avons découvert que mon mari, qui n’est pas juif et dont la famille est originaire du Mexique, est un descendant de Juifs du côté de sa mère. Son nom était Medina », explique Kawalek.

« Cela a aidé ma famille à se faire à l’idée que j’avais épousé un non-Juif. Elle appelle mon mari Moishele parce qu’elle ne parvient pas à prononcer son vrai nom, Damien ».

En novembre dernier, Kawalek a embarqué « Moishele » avec lui dans une voyage en Israël pour aller rejoindre sa grand-mère qui était allée rendre visite à de la famille à Haïfa. C’était le premier séjour du pays pour Navarro alors que Kawalek l’a visité sept fois et qu’il le qualifie de sa « patrie absolue ». C’est aussi là qu’il veut être enterré.

Kawalek considère que les critiques dont il fait l’objet sont pour la plupart « des arguments spécieux ». Il est en désaccord avec ce qu’il considère être des commentaires exagérés postés par des Juifs sur le conflit à Gaza, et le manque d’opposition et de questionnements sur la politique israélienne envers les Palestiniens dans le communauté juive d’Amérique du Nord.

« C’était la régurgitation des opinions d’autres personnes, cette projection et cette amplification d’un ressentiment très profond, ce manque de lutte pour comprendre ce qui se passe réellement qui m’a poussé à aller à Gaza pour voir et me faire ma propre expérience des choses », explique Kawalek.

Sur le terrain à Gaza et Jérusalem Est

A son arrivée à Gaza, les gens ont pensé que Kawalek ressemblait beaucoup à un militaire américain. Son crane rasé, sa stature haute, son physique imposant et ses traits clairement dessinés attiraient trop d’attention (négative) et non voulue.

En conséquence, il a été décidé que Kawalek ne traiterait pas directement les patients mais qu’il ferait plutôt du travail administratif, principalement des évaluations pour déterminer les besoins médicaux et psycho-sociaux, comme ceux nécessaires pour renforcer la capacité des fournisseurs de soins locaux des systèmes.

Kawalek a fait cela dans Gaza, tout comme à Jérusalem Est lors des deux premières semaines où il s’est porté volontaire avec le CMI à la fin août et au début septembre.

Gaza était la première zone de conflit que le docteur avait jamais vue, et le premier endroit où ses déplacements étaient limités. Il ne pouvait se déplacer n’importe où sans garde.

« Nous ne pouvions pas être dehors à nous balader, nous étions uniquement autorisés à être à l’extérieur en journée », explique-t-il.

Kawalek explique que les bombes israéliennes tombaient à côté de l’immeuble d’appartement où il résidait. Il a suivi les consignes de sécurité et a dormi loin des fenêtres.

« On pouvait entendre le bourdonnement constant des drones au-dessus de nos têtes. J’ai vu le Hamas tirer des roquettes à proximité de notre immeuble », ajoute-t-il.

Il a parlé avec autant d’habitants que possible, comme la femme qui gérait les organisations communautaires qu’il a visitées, les marchands, les enfants dans les rues, après le cessez-le feu entré en vigueur le 26 août.

Cependant, il ne parlait à personne qui se revendiquait être du Hamas. En fait, les hommes armés du Hamas étaient ostensiblement absents.

« Il n’y avait aucune preuve ou présence physique du Hamas. Il y avait littéralement aucun combattant du Hamas en uniforme [dans les rues] », se rappelle Kawalek. « Je n’ai vu aucune arme, aucun pistolet, aucun soldat ».

Après le cessez-le-feu, il a, seulement à ce moment-là, vu les hommes armés du Hamas dans la ville de Gaza. Une fois, il était à l’avant d’une voiture qui s’est arrêtée derrière une camionnette remplie d’hommes armées et de roquettes.

« Nous nous sommes observés à travers le pare-brise. Ces 30 secondes m’ont semblé irréelles », raconte Kawalek.

Le médecin explique qu’il a fait très attention, tout au long de son séjour, à ne pas parler hébreu lorsqu’il rentrait et sortait d’Israël pour se rendre à Gaza ou Jérusalem-Est. Pourtant, au moment de prendre son vol de retour à l’aéroport Ben Gurion à Tel Aviv, il a repris ses anciennes habitudes et s’est adressé à l’agent de l’immigration en hébreu. En conséquence, explique-t-il on l’a interrogé et personnellement escorté jusqu’à son avion qui le ramenait à Los Angeles.

Rien ne remplace sa propre expérience

De retour au travail à l’hôpital Cedars-Sinai, Kawalek confie qu’il n’a aucun regret au sujet de sa mission à Gaza et qu’il savait qu’il s’en sortirait bien du moment qu’il suivait les mesures de sécurité.

Il y avait un besoin humanitaire auquel il fallait répondre, et il était curieux de voir la situation sur le terrain de ses propres yeux.

« Je suis persuadé que la paix l’emportera, et je voulais m’impliquer directement grâce à la médecine et mes racines. Je suis persuadé que le dialogue et les relations sont ce qui conduira au changement », analyse-t-il.

Même s’il ne s’investit pas sur le plan politique, Kawalek défend le changement personnel plutôt que le changement public.

« Pour le conflit israélo-palestinien, comme pour la médecine, mon expérience compte ».

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