Litzman : un groupe pro-Israël australien salue la recommandation de la police
La Fédération sioniste d'Australie appelle le vice-ministre de la Santé à démissionner en raison de ses efforts supposés pour empêcher l'extradition d'une pédophile présumée
Jacob Magid est le correspondant du Times of Israël aux États-Unis, basé à New York.
Une éminente organisation juive australienne a applaudi mercredi la recommandation de la police israélienne de mettre en examen le vice-ministre de la Santé Yaakov Litzman pour avoir fait pression sur des fonctionnaires de son bureau pour empêcher l’extradition de la prédatrice sexuelle présumée Malka Leifer vers Melbourne.
« C’est un pas en avant particulièrement bienvenu dans un processus épuisant et long suscitant la frustration visant à obtenir justice pour les victimes de Leifer », a déclaré dans un communiqué la Zionist Federation of Australia, un organisme cadre d’organisations pro-Israël.
La ZFA a également appelé Litzman à démissionner de son poste tant que les poursuites judiciaires contre lui perdureront.
Les développements dans l’affaire Leifer ont été suivis de près par la communauté juive d’Australie. La recommandation de la police mardi a même fait la Une des journaux du pays.
« Il s’agit d’allégations extrêmement graves, et il est tout simplement intenable pour quiconque travaillant dans la fonction publique de rester en poste tout en faisant l’objet d’une enquête pour fraude et abus de confiance. Un élu sabotant l’État de droit – un principe démocratique à la base de l’État d’Israël – ne devrait faire l’objet d’aucune tolérance », a ajouté la ZFA.
La fédération a également exprimé sa solidarité à l’égard des victimes présumées de Leifer, notamment Dassi Erlich, Elly Sapper et Nicole Meyer, à la tête d’une campagne pour pousser Israël à extrader l’ancienne directrice de leur école.
La police a ainsi recommandé la mise en examen de Yaakov Litzman pour corruption et abus de confiance. Il aurait utilisé ses fonctions pour aider illégalement une pédophile présumée. Il est également accusé de corruption dans une autre affaire pour avoir contribué à empêcher la fermeture d’une entreprise agroalimentaire que son propre ministère avait jugée insalubre.
La première affaire implique Malka Leifer, ancienne directrice d’une école ultra-orthodoxe pour filles qui est accusée en Australie de 74 chefs d’abus sexuels sur mineurs. La police avait fait savoir au mois de février qu’elle avait ouvert une enquête sur Litzman, soupçonné d’avoir exercé des pressions sur les employés de son bureau pour changer les conclusions de leurs évaluations psychiatriques et déclarer Leifer inapte à une extradition.
Litzman aurait également tenté d’influencer des officiels du ministère de la Santé afin d’empêcher la fermeture d’un restaurant de Jérusalem qu’il fréquente — une fermeture ordonnée en raison de « problèmes sanitaires graves qui ont rendu malades de nombreuses personnes ».
Litzman, qui dispose de nombreuses compétences de ministre alors qu’il n’est que vice-ministre, a réfuté tout acte répréhensible, maintenant en réponse aux recommandations de la police que son bureau fait preuve « d’une politique de porte ouverte à l’égard des gens qui auraient besoin d’aide. Le tout sans distinction entre les différentes populations et sans clarifier le statut de ceux qui appellent pour avoir de l’aide. Le vice-ministre se dit certain que les charges seront abandonnées ».
Il revient maintenant au procureur général Avichai Mandelblit de déterminer s’il y a lieu de le mettre en examen ou non.
La chaîne publique Kan a rapporté mardi que le bureau du procureur comptait remettre sa recommandation à Mandelblit avant les élections du 17 septembre et avait indiqué que le procureur général pourrait même décider de le mettre en examen — selon les résultats d’une audience préalable — avant le scrutin.
Malka Leifer est connue pour être liée à la communauté Gur, ayant enseigné en Israël dans une école affiliée à cette branche hassidique.
Un responsable du ministère de la Santé avait indiqué au mois de février au Times of Israël que la police était en possession d’enregistrements de Litzman et de responsables, à son bureau, parlant à des employés du ministère de la Santé et leur recommandant vivement de prendre des mesures en faveur de Leifer.
En l’an 2000, Leifer avait été recrutée pour travailler à l’école ultra-orthodoxe pour filles Adass Israel de Melbourne. Lorsque les accusations d’abus sexuels avaient émergé à son encontre, huit années plus tard, les membres du conseil d’administration de l’établissement scolaire avaient acheté à cette mère de huit enfants un billet pour Israël dans un vol de nuit pour lui permettre d’échapper à une inculpation.
Après le début des poursuites par les autorités de Melbourne, l’Australie avait officiellement déposé une demande d’extradition en 2012. Deux ans plus tard, elle était arrêtée en Israël avant d’être finalement libérée et assignée à domicile. Les magistrats l’avaient jugée inapte à un procès et avaient finalement levé toutes les restrictions qui lui avaient été imposées, concluant qu’elle était trop malade pour ne serait-ce que se lever de son lit.
Elle avait été à nouveau appréhendée en février 2018 après une opération d’infiltration de la police – qui mettait alors en doute l’instabilité réelle de son état psychologique. L’opération avait été lancée après l’obtention d’images la montrant se déplacer dans sa ville de résidence sans difficulté apparente. L’ONG Jewish Community Watch avait en effet engagé des détectives privés, lesquels avaient caché des caméras dans l’implantation ultra-orthodoxe d’Emmanuel où Leifer et sa famille avaient trouvé refuge.
Malgré ces images pourtant accablantes, le procès a été ajourné d’un an, le tribunal devant statuer sur son état psychologique. Le psychiatre du district de Jérusalem chargé de l’évaluation de Leifer, le docteur Jacob Charnes, aura changé d’avis à trois occasions concernant l’aptitude de Leifer à être extradée.
Toutefois, quand le psychiatre avait été interrogé par la défense concernant son évaluation, à la fin de l’année dernière, il avait expliqué au tribunal qu’il recommandait un examen supplémentaire de Leifer – une proposition rejetée par les deux parties.
Un responsable judiciaire a déclaré au Times of Israël que la police soupçonnait Charnes d’avoir modifié sa conclusion après avoir été contacté par le bureau de Litzman. Bien que le médecin ait été interrogé sous caution, la police vient d’indiquer qu’elle ne recommandait pas sa mise en examen.
La Cour de district de Jérusalem donnera sa décision finale concernant l’extradition et l’état mental de Leifer lors d’une audience prévue le 23 septembre. Le Times of Israel a appris le mois dernier qu’un comité de médecins nommé par la cour allait officiellement conclure que Malka Leifer a bien feint la maladie psychique pour éviter son extradition, une décision qui devrait influer la décision du tribunal de Jérusalem.