Mandelblit prévient que le projet de loi d’immunité pourrait fournir un “refuge” aux criminels
Le procureur général affirme que la proposition controversée pour accorder l’immunité aux Premiers ministres serait “un coup massif porté à l’état de droit”
Le procureur général Avichai Mandelblit a intensifié mardi ses critiques publiques contre un projet de loi controversé qui accorderait l’immunité pénale aux Premiers ministres en exercice, affirmant que s’il était adopté, ce serait un coup porté à l’état de droit et à la confiance publique.
Pendant un séminaire organisé par le think-tank conservateur Kohelet Policy Forum à Jérusalem, Mandelblit a dit que le projet de loi était « inacceptable » et transformerait le mandat de Premier ministre en « refuge » pour les criminels.
La veille, il avait fustigé le projet de loi d’immunité, le jugeant « absurde », « mauvais » et « inapproprié ».
Alors que le Premier ministre Benjamin Netanyahu est le suspect de deux enquêtes sur des faits de corruption présumés, les députés du Likud veulent faire adopter un projet de loi qui interdirait à la police d’enquêter sur des suspicions de fraude, de corruption ou d’abus de confiance contre un Premier ministre en exercice.
Pendant le séminaire, Mandelblit a expliqué pourquoi le projet de loi pouvait poser problème.
« Selon le projet de loi, en théorie, même s’il existe des preuves sans équivoque que le Premier ministre en exercice a payé – avant son élection – un pot-de-vin à une autre personne, ou a reçu un pot-de-vin de quelqu’un d’autre alors qu’il était Premier ministre, une enquête ne pourrait pas être ouverte pendant toute la durée de son mandat », a-t-il dit.
« La fonction de Premier ministre, la fonction la plus importante du pays, deviendrait une ‘ville refuge’ pour ce criminel », a-t-il dit, faisant référence aux villes refuges des temps bibliques, où ceux qui avaient commis un homicide involontaire pouvaient trouver asile. « Ceci serait un coup passif porté à l’état de droit, au principe d’égalité devant la loi et à la confiance publique. »
Mandelblit a expliqué que, en l’état actuel des choses, il existe un équilibre délicat entre les différents intérêts à envisager pour enquêter sur des responsables élus, dont le Premier ministre.
Le projet de loi du député du Likud David Amsalem « est dépourvu de tout équilibre », a-t-il dit.
« Une conséquence possible est qu’un Premier ministre en exercice se retrouve enveloppé d’un nuage informe de suspicions. Pire, il est possible que les complices du crime de ce Premier ministre théorique fassent l’objet d’une enquête et soient même condamnés. Ils impliqueraient clairement ce ministre dans le crime, qui continuerait cependant à exercer durant plusieurs années. Au moment où arrivera la fin de son mandat, quand la police aura le droit d’enquêter sur le suspect, y aura-t-il encore des preuves à rassembler qui n’auront pas été contaminées ou n’auront pas disparu ? », a poursuivi Mandelblit.
« Dans un pays démocratique, la loi est la même pour tous, du simple citoyen au Premier ministre. C’est ainsi, et il est approprié que cela continue d’être ainsi. »
Sous sa forme actuelle, le projet de loi n’aiderait probablement pas Netanyahu à échapper aux enquêtes à son encontre, puisqu’il ne doit pas s’appliquer aux enquêtes déjà ouvertes, mais cela empêcherait qu’il soit considéré comme suspect dans d’autres enquêtes criminelles. Certains députés craignent également que le projet de loi ne soit amendé pour s’appliquer de manière rétroactive et sauver Netanyahu des poursuites.