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Philippe dénonce « une nouvelle forme d’antisémitisme violente et brutale »

Un garçon portant une kippa à Sarcelles a été violemment agressé mardi alors qu'il se rendait à un cours de soutien

Edouard Philippe, le 3 janvier 2018. (Crédit : AFP / POOL / BENOIT TESSIER)
Edouard Philippe, le 3 janvier 2018. (Crédit : AFP / POOL / BENOIT TESSIER)

« Lutter contre le racisme et l’antisémitisme, c’est évidemment avoir le courage de nommer les choses. Le courage d’affirmer, de reconnaître que oui, il existe une nouvelle forme d’antisémitisme violente et brutale qui s’exprime de façon de plus en plus ouverte sur notre territoire », a déclaré le Premier ministre lors des questions au gouvernement à l’Assemblée nationale.

« Nous ne pouvons pas accepter que des Français s’en prennent à d’autres Français à raison de leur conviction religieuse, nous ne pouvons pas accepter qu’un enfant de 8 ans soit agressé à raison de signes extérieurs qui disent sa conviction religieuse », a affirmé M. Philippe devant un hémicycle inhabituellement silencieux.

L’agression d’un garçon portant une kippa à Sarcelles, « petite Jérusalem » au nord de Paris, a suscité l’indignation de la classe politique et une vive émotion dans la communauté juive.

L’enfant, âgé de huit ans, a été déséquilibré et a reçu des coups au sol par deux adolescents d’une quinzaine d’années. Le mobile antisémite a été retenu par la justice.

« Nous souhaitons que la justice passe et qu’elle passe bien entendu avec sévérité », a affirmé M. Philippe, qui répondait au député LREM du Val-d’Oise Dominique Da Silva.

Le Premier ministre, qui s’est entretenu mercredi avec René Taïeb, le président des communautés juives du Val-d’Oise, a confirmé qu’il présenterait « dans quelques semaines », lors de la semaine d’éducation contre le racisme et l’antisémitisme, le nouveau « plan interministériel » du gouvernement, qu’il veut « large » et « ambitieux ».

Le chef du gouvernement a par ailleurs missionné deux inspections générales de l’Etat afin d’évaluer les résultats de la lutte contre l’antisémitisme, dont les rapports seront « évidemment publics ».

M. Philippe a également évoqué l’idée de permettre à un plaignant de qualifier lui-même le mobile de son agression, comme c’est le cas au Royaume-Uni mais pas en France, afin de mieux « identifier » les agressions antisémites.

« J’ai demandé à ce qu’on évalue la portée de cette possibilité qui pourrait être offerte », a-t-il dit.

« Le travail sera long », a reconnu le locataire de Matignon, « mais nous devons aller encore plus loin (…). La détermination du gouvernement est totale », a-t-il assuré.

Condamnation également sur tous les bancs de la classe politique, avec des mots différents, de Marine Le Pen (FN) demandant « des actes » contre « un antisémitisme virulent porté par l’islam radical », à Jean-Luc Mélenchon (LFI) « révolté par l’agression contre un enfant au motif de sa religion ».

Pour l’ancien Premier ministre Manuel Valls, « c’est un acte anti-juif et une nouvelle démonstration de la montée effrayante de l’antisémitisme dans nos quartiers populaires ».

A Sarcelles, où vit une importante population juive séfarade dans un quartier surnommé « la petite Jérusalem », le député et ancien maire PS François Pupponi ne cache pas son trouble.

« Ce qui nous inquiète le plus c’est que c’est la deuxième agression gratuite visant un membre de la communauté juive » en trois semaines : « on se demande s’il n’y a pas eu un appel sur les réseaux sociaux » à passer à l’acte, s’alarme l’élu auprès de l’AFP. La précédente avait eu lieu le 10 janvier, sans que le mobile antisémite soit retenu par le parquet.

« On est à la fois inquiets et rassurés. Inquiets car c’est la deuxième agression en un mois. Et rassurés car le préfet s’est engagé à renforcer la sécurité dans le quartier juif, tant au niveau des CRS, de (l’opération militaire) Sentinelle que des forces de police. L’essentiel pour nous c’est que l’enfant aille bien », temporise le président de la communauté juive de Sarcelles, Moïse Kahloun.

A la sortie de l’école maternelle Anne-Frank, Jackie Tordjman, 45 ans, mère de trois enfants, envisage clairement de faire son « alyah », l’émigration vers Israël, qui a enregistré environ 40 000 départs en dix ans, soit près de 10 % de la communauté juive de France.

« J’ai pas du tout envie que mes enfants grandissent ici. Je n’ai pas envie qu’ils deviennent violents », fait-elle valoir.

Ruben Limondtora, 25 ans, lui, ne rêve pas de départ mais a changé ses habitudes concernant le port de la kippa : « Je ne la porte que dans le quartier juif. Quand je sors du quartier, je mets une casquette ».

Le président du Consistoire israélite, Joël Mergui, se dit « à nouveau inquiet par le nombre d’agressions antisémites, qui est en train de passer inaperçu », symptôme selon lui d’une « dangereuse spirale ».

Après une année 2015 marquée par un nombre record d’actions et de menaces antisémites, les chiffres officiels avaient été pointés en net repli en 2016 (-58,5 %), tout en se maintenant à un haut niveau. Le gouvernement voyait dans cette tendance les premiers résultats de son plan de lutte contre le racisme et l’antisémitisme jugé ambitieux.

Mais la baisse s’annonce bien moindre sur l’année 2017, marquée par l’assassinat d’une femme juive défenestrée à Paris, Sarah Halimi, et la séquestration d’une famille juive en Seine-Saint-Denis. Sur les onze premiers mois, le recul des actes antisémites est de 7 %, selon le ministère de l’Intérieur.

En France, « l’antisémitisme n’est pas neuf, il est ancien. Il n’est pas superficiel, il est comme enraciné », avait prévenu en décembre le Premier ministre Edouard Philippe.

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