Sous serment, Netanyahu qualifie de « totalement fausses » les allégations de Bar
Le Premier ministre a écrit à la Haute Cour que "prétendre que j'aurais tenté d'éviter de témoigner et que j'aurais demandé au Shin Bet d'agir contre des citoyens innocents est un mensonge éhonté"

Le Premier ministre Benjamin Netanyahu a catégoriquement rejeté dimanche les accusations du chef du Shin Bet, Ronen Bar, selon lesquelles il aurait tenté de le convaincre d’aider frauduleusement à reporter son témoignage dans le cadre de son procès pénal, qualifiant ces allégations de « totalement fausses ». Il nie également avoir demandé à l’utiliser les ressources et les pouvoirs du Shin Bet contre des militants pacifiques anti-gouvernement.
Dans une déclaration écrite sous serment adressée à la Haute Cour de justice en réponse à l’affidavit de Bar soumis la semaine dernière, Netanyahu a fourni les transcriptions officielles de leurs conversations lors de réunions officielles au cours desquelles il déclarait vouloir que le chef du Shin Bet lui propose des solutions lui permettant de témoigner dans un lieu sécurisé.
Bar a affirmé que Netanyahu lui avait demandé de dire au tribunal de Jérusalem que le Premier ministre ne pouvait pas se rendre régulièrement dans un lieu public pour des raisons de sécurité, car il risquait d’être la cible d’une attaque.
La Cour de Jérusalem ne dispose pas d’abris anti-bombes. En conséquence, les audiences de Netanyahu ont finalement été transférées dans une salle située dans les sous-sols du tribunal de Tel Aviv.
« À mon avis, il existe des solutions, même relativement simples, mais [vous] devez me les proposer afin que je puisse, d’une part, témoigner et, d’autre part, [pour que je] ne meure pas, et afin que les équipes juridiques, les juges, etc., ne meurent pas avec moi », a déclaré Netanyahu, selon la transcription sténographique de la réunion que les deux hommes ont eue sur ce sujet le 13 novembre 2024.
Lors d’une autre réunion tenue le 17 novembre, au cours de laquelle ils ont de nouveau discuté de la question, Netanyahu a écrit dans sa déclaration sous serment que Bar n’avait pas encore proposé d’alternatives au tribunal de Jérusalem à cette date.

« Rien ne doit être fait pour retarder le procès », aurait déclaré Netanyahu à Bar lors de cette deuxième entrevue.
« À aucun moment je n’ai demandé à Bar de rédiger un document de synthèse établissant que mon témoignage ne pouvait être entendu. Cette affirmation est totalement fausse. C’est tout le contraire, je lui ai dit explicitement que je souhaitais témoigner et que le procès ne devait pas être retardé d’un seul jour », a écrit le Premier ministre.
Netanyahu a insisté sur le fait qu’il n’avait jamais demandé à Bar, d’utiliser les ressources et les pouvoirs de l’agence de sécurité intérieure contre des militants pacifiques opposés au gouvernement, et a cité la transcription d’une réunion qu’il avait eue avec Bar le 6 juin 2023, au cours de laquelle il avait demandé l’avis de la procureure générale sur ce qui pouvait être considéré comme une manifestation légitime et ce qui était illégal.
Le Premier ministre a également tenté de démentir l’affirmation de Bar selon laquelle il aurait dit au chef du Shin Bet d’obéir à Netanyahu et non à la Cour suprême en cas de crise constitutionnelle. Il a affirmé qu’il n’y avait aucune trace de tels propos dans le compte-rendu de la réunion au cours de laquelle Bar prétend qu’ils auraient été tenus. Il ne l’a toutefois pas niée catégoriquement.

En réponse aux recours déposés contre sa décision de limoger Bar, Netanyahu a écrit au tribunal que l’accusation « était différente de celle contenue dans la déclaration sous serment confidentielle » de Bar et qu’il n’y avait aucune trace de tels commentaires dans la réunion au cours de laquelle Bar aurait tenu ces propos.
« Il convient de souligner que le compte-rendu de la réunion de cette date ne fait aucune mention d’une conversation sur [ce] sujet, et il n’y a certainement aucune citation qu’il ait incluse dans sa déclaration sous serment confidentielle », a écrit Netanyahu.
Le Premier ministre n’a toutefois pas affirmé explicitement qu’il n’avait jamais tenu de tels propos auprès de Bar.
Dans sa propre déclaration sous serment, Bar a affirmé que lors d’une conversation avec Netanyahu, « il m’a été clairement indiqué qu’en cas de crise constitutionnelle, je devrais obéir au Premier ministre et non à la Haute Cour de justice. Tous les détails de cette affaire figurent dans la déclaration sous serment classifiée ».
Bar a affirmé dans sa propre déclaration sous serment devant la Haute Cour de justice la semaine dernière que Netanyahu lui avait demandé à plusieurs reprises d’agir contre des citoyens israéliens impliqués dans des manifestations pacifiques contre le gouvernement.
Bar faisait référence aux militants qui suivaient les ministres du gouvernement partout où ils se rendaient et manifestaient contre eux dès qu’ils apparaissaient en public, dans le cadre du mouvement de protestation contre le programme de refonte judiciaire du gouvernement au cours du premier semestre 2023.
« Je veux faire intervenir la procureure générale parce que je veux comprendre quelles sont les limites de la loi », a déclaré Netanyahu, citant ses propres propos tirés du compte-rendu officiel de la réunion du 6 juin avec Bar dans sa déclaration sous serment.
« Je ne vois pas clairement où se situent les limites du harcèlement et de la persécution », a poursuivi Netanyahu, demandant au chef du Shin Bet si de telles activités étaient légales.

« Je ne sais pas quoi vous dire », lui avait répondu Bar.
« J’ai exigé du chef du Shin Bet qu’il agisse conformément à la loi pour éradiquer ces activités néfastes, tandis que Bar prétend que j’ai demandé de violer la loi », a poursuivi Netanyahu.
Bar a affirmé dans sa déclaration sous serment que Netanyahu lui avait demandé d’agir contre les manifestations légitimes après la fin de la réunion, lorsque le sténographe avait quitté la salle, afin que cela ne soit pas consigné.
Netanyahu a répondu que dans la majorité des cas où les deux hommes se sont exprimés sans sténographe, c’était à la demande de Bar.
Au cœur du litige entre les deux hommes, le déroulement des événements la nuit précédant l’attaque sans précédent du Hamas sur le territoire israélien le 7 octobre 2023.
Bar avait fermement rejeté les accusations de Netanyahu et de son entourage selon lesquelles le Shin Bet n’a pas alerté le Premier ministre et les autres services de sécurité à temps.
« Cette nuit-là, rien n’a été caché à l’appareil sécuritaire ou au Premier ministre », affirmait Bar.
« Il n’a pas réveillé le Premier ministre. Il n’a pas réveillé le ministre de la Défense. Il n’a pas réveillé les soldats et soldates de l’armée. Il n’a pas réveillé les équipes de sécurité dans les localités proches de la bande de Gaza. Il n’a pas réveillé les participants à la fête de Nova », dénonce Netanyahu.
« Il n’a pas accompli sa mission principale cette nuit-là », ajoute-t-il.
« Ronen Bar a échoué dans son rôle de chef du Shin Bet et a perdu la confiance de l’ensemble du gouvernement israélien quant à sa capacité à continuer à diriger l’organisation. C’est cette perte de confiance qui a conduit à la fin de son mandat », conclut Netanyahu dans ce document de 23 pages.
Le 8 avril, la Cour Suprême a confirmé dans un arrêt sa décision initiale de suspendre le limogeage du chef du Shin Bet, après l’examen des cinq recours dont elle avait été saisie.
« Je vais annoncer prochainement la date de ma démission », avait annoncé Bar dans sa déclaration à la Cour.