Trois sismomètres avaient détecté l’activité du Hamas juste avant le pogrom du 7 octobre
La découverte de signaux de véhicules lourds 30 minutes précédant l'invasion pourraient ouvrir la voie à des systèmes de détection au service de la sécurité
Sue Surkes est la journaliste spécialisée dans l'environnement du Times of Israel.
Des scientifiques de l’université de Tel Aviv (TAU), qui travaillent depuis cinq ans à l’identification des bruits sismiques créés par l’activité humaine, ont découvert que le flux inhabituel de véhicules lourds conduits par des membres du groupe terroriste palestinien du Hamas en direction de la frontière entre Gaza et Israël le 7 octobre 2023 avait été capté par trois stations sismiques dans le sud d’Israël.
Les chercheurs ont ensuite identifié des bruits sismiques d’origine humaine, faibles mais répandus, dès 6 heures du matin. Cette découverte pourrait ouvrir de nouvelles possibilités pour l’utilisation de ces outils dans les domaines de la sécurité et de l’industrie.
À 6h29, le premier des 3 000 terroristes du Hamas qui déferleront ce matin-là sur le sud d’Israël depuis Gaza, par voie terrestre, aérienne et maritime, a franchi la frontière. Ils assassineront plus de 1 200 personnes et prendront 251 otages de tous âges, principalement des civils, tout en lançant des milliers de roquettes sur les villes et villages israéliens.
Les résultats de cette étude, dirigée par Asaf Inbal de la Porter School of the Environment and Earth Sciences et de la Sackler Faculty of Exact Sciences, ont été publiés dans The Seismic Record, une revue de la Seismological Society of America.
Les chercheurs ont expliqué que la sismologie médico-légale est souvent utilisée pour surveiller les explosions conventionnelles et nucléaires. Cependant, c’est la première fois que de faibles mouvements du sol, résultant des préparatifs d’une attaque terroriste, ont été détectés grâce à l’analyse des caractéristiques du bruit sismique induit par la circulation des véhicules.
Cette découverte démontre le potentiel de la technologie de détection sismique dans la fourniture d’alertes précoces en cas d’activité terroriste. Les chercheurs précisent toutefois que l’identification des mouvements à Gaza a été réalisée rétrospectivement, plusieurs mois après l’attaque.
Inbal a expliqué que « le service géologique israélien exploite un réseau national de dizaines de sismomètres très sensibles qui surveillent en permanence les mouvements du sol. Ce réseau est principalement conçu pour détecter et localiser les tremblements de terre et donner l’alerte en cas de fortes secousses du sol causées par des événements sismiques majeurs. »
« Cependant, trois stations du réseau, situées à Amazia, Ketziot et Yatir, à une distance de 30 à 50 kilomètres de Gaza, ont enregistré des niveaux inhabituels de bruit sismique tôt dans la matinée du 7 octobre 2023. Ce bruit peut être attribué avec certitude à l’activité des véhicules dans la bande de Gaza, alors que les terroristes du Hamas se rassemblaient pour l’attaque. Les signaux ont été enregistrés entre 6 h et 6 h 30, avant le début des tirs de roquettes. La probabilité que ces signaux proviennent de Gaza est supérieure à 99,9 %. »
L’équipe a analysé trois années de données provenant des trois mêmes stations sismiques et n’a trouvé aucun autre cas de bruit sismique simultané aux trois stations, ni de bruit sismique se prolongeant pendant plus de 10 minutes.
Les stations sont très éloignées les unes des autres. Ketziot et Amazia, par exemple, sont à environ 80 kilomètres l’une de l’autre et les samedis précédents, aucune corrélation n’a été observée entre les données enregistrées à ces stations.
Inbal a précisé que « le matin de l’attaque, alors que l’activité locale près des stations était minimale [en raison de la fête juive de Simhat Torah], nous avons constaté des amplitudes sismiques uniques et généralisées, qui augmentaient de façon monotone à mesure que l’heure de l’attaque approchait. Aucune source naturelle ou humaine connue du côté israélien n’aurait pu générer des signaux sismiques présentant une distribution et une intensité similaires à celles attribuées aux mouvements du Hamas. »
« Bien que le festival de musique en plein air près de Reim [où plus de 360 festivaliers ont été massacrés] a généré un certain bruit sismique, notre analyse montre que ce bruit ne correspond pas à l’intensité ou à l’emplacement des sources de bruit enregistrées par le réseau sismique israélien le 7 octobre. »
Le bruit sismique s’est intensifié à l’approche de l’attaque, accompagné par moments de courtes rafales qui ont permis aux scientifiques de localiser leur source et de suivre leur progression au fur et à mesure que les véhicules avançaient vers le sud et le nord de la bande de Gaza, de Rafah au sud jusqu’au point de passage d’Erez au nord, au cours des 30 minutes qui ont précédé le pogrom.
Inbal a précisé que les équipes disposaient « de bonnes capacités de détection le long de la route de Salah al-Din, un axe majeur traversant Gaza de Rafah au sud à Beit Lahiya au nord. Nous pouvons confirmer avec une grande certitude que leurs forces se sont déplacées le long de cette route à une vitesse de 25 à 50 kilomètres par heure. Les observations réalisées à partir de stations situées à des dizaines de kilomètres de la frontière de Gaza indiquent la présence de convois de véhicules lourds, tels que des bulldozers et des camions transportant des agents. »
« Trois minutes avant le début de l’attaque, nous avons détecté des sources de bruit atteignant l’extrémité nord de Gaza, près de Beit Lahiya, ainsi que l’extrémité sud, près de Khan Younès. Parallèlement, des signaux continuaient de provenir du centre de Gaza, près de Nuseirat.”
« Nous savons que l’assaut a commencé presque simultanément le long de toute la frontière, ce qui confirme que ces observations sismiques fournissent des preuves supplémentaires du vaste déploiement des forces du Hamas, facilitant probablement la rupture simultanée de la barrière terrestre. »