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Gilboa: l’ex gardienne de prison raconte son viol présumé par un détenu terroriste

"Hila" a raconté comment elle s'est retrouvée seule avec le prisonnier qui l'a agressée à plusieurs reprises, et a affirmé que ses supérieurs ne pouvaient pas ne pas être au courant

Une ancienne soldate de Tsahal affirmant avoir été violé par un prisonnier de sécurité lorsqu'elle était gardienne à la prison de Gilboa, lors d'une interview avec la Douzième chaîne, le 8 août 2022. (Crédit : La Douzième chaîne)
Une ancienne soldate de Tsahal affirmant avoir été violé par un prisonnier de sécurité lorsqu'elle était gardienne à la prison de Gilboa, lors d'une interview avec la Douzième chaîne, le 8 août 2022. (Crédit : La Douzième chaîne)

Une ancienne gardienne de prison qui affirme avoir été violée et abusée sexuellement à plusieurs reprises par un prisonnier de sécurité palestinien alors qu’elle servait dans la prison de Gilboa il y a sept ans, a décrit à la Douzième chaîne comment les incidents présumés se sont produits, accusant les administrateurs du site de l’avoir « livrée comme une escort girl » à son agresseur.

Sous couvert d’anonymat, une ancienne soldate de Tsahal qui avait servi en tant que gardienne de prison, a déclaré le mois dernier qu’elle avait été violée à plusieurs reprises par un prisonnier, une accusation qui a ébranlé l’administration pénitentiaire israélienne et qui a été alourdie par d’autres plaintes pour agression sexuelle déposées par d’anciennes soldates ayant également servi dans la prison. Selon ces accusations, les administrateurs de la prison auraient été complices de ces incidents ou auraient fermé les yeux.

Sous le pseudonyme de « Hila », comme depuis qu’elle a formulé ses premières allégations, elle a décrit comment le prisonnier a établi une relation avec elle peu après leur première rencontre. La Douzième chaîne n’identifie le prisonnier que par l’initiale hébraïque « Ayin ». À l’époque, il était le représentant des Palestiniens accusés de terrorisme, appelés en Israël « prisonniers de sécurité », dans l’établissement.

Elle raconte que la première fois qu’elle l’a vu, il lui a dit qu’il voulait qu’elle devienne sa gardienne attitrée. Très rapidement, elle a été affectée à sa garde, dit-elle.

Hila a affirmé par le passé qu’Ayin exerçait une grande influence sur la vie de la prison, assurant apparemment le calme dans l’établissement au profit du personnel de la prison en échange de faveurs des administrateurs.

Les interactions problématiques ont commencé par des remarques suggestives, puis « ont évolué vers de petits contacts », pour voir comment elle réagirait dans certaines situations. « Par exemple, lorsque je lui passais les menottes, il commençait à me caresser, à se frotter à moi, à se rapprocher de moi », a-t-elle expliqué.

Un gardien de prison dans un mirador à la prison de Gilboa, dans le nord d’Israël, le 6 septembre 2021. (Crédit : Flash90)

« Tout au long de mon service, Ayin m’a montré qu’il était la seule personne qui se souciait de moi », a déclaré Hila. Elle se souvient qu’après qu’un autre prisonnier l’a touchée de manière inappropriée, elle a signalé l’incident à un supérieur. Ayin a également entendu parler de l’incident et lui a dit « ne t’inquiète pas, je vais m’en occuper ». Il s’est ensuite chargé de casser la main de l’autre prisonnier.

« L’atmosphère dans la prison était telle qu’ils savaient qu’Ayin m’aimait bien, que j’étais sa préférée », dit-elle.

Les rumeurs dans la prison disaient « qu’Ayin est un pervers ». « C’est ce que l’on disait entre gardiennes. Donc si les gardiennes le savaient et en parlaient, comment vous dire que c’est évident que les directeurs devaient le savoir. Même s’ils ne le savaient pas, ils auraient dû le savoir ».

Puis, vers la fin de son service, Hila dit qu’on lui a demandé d’assister un sergent et un administrateur principal de l’aile des prisonniers lors d’un contrôle des provisions. Les deux autres membres du personnel l’ont laissée seule pour aller chercher quelque chose à manger « et puis, bien sûr, Ayin est arrivé, parce qu’il arrivait toujours ».

Ayin lui a suggéré qu’ils devraient continuer à compter les provisions ensemble et lui a dit de quitter son poste de garde pour le rejoindre.

Hila lui a dit qu’il devait commencer seul et qu’elle surveillerait « de loin », mais Ayin a insisté pour qu’elle regarde de plus près ce qui se passait. Ayin, se souvient-elle, lui a assuré qu’il ne lui ferait pas de mal. « Je ne te ferai rien », lui a-t-il dit.

Dès qu’elle a quitté son poste de garde, Ayin a fermé la porte menant à la section des prisonniers, raconte-t-elle.

« Il m’a bloquée entre les portes, dans un endroit où il n’y a pas de caméras, dans un endroit où personne ne peut voir ce qui se passe, juste lui et moi », a-t-elle déclaré.

« Puis il m’a violée pendant plusieurs minutes », a-t-elle dit.

« Je me suis figée, je n’ai rien dit », a déclaré Hila. Elle a décrit comment Ayin lui a saisi les deux bras pendant qu’il l’agressait.

« Je n’arrive pas non plus à comprendre ce qui s’est passé », a-t-elle dit.

Ayin a fini par la relâcher et Hila a couru jusqu’au poste d’observation.

« Je me suis vite ‘arrangée’ et j’ai repris mon souffle », a-t-elle déclaré.

Lorsque les autres membres du personnel de la prison sont revenus, elle a dit qu’elle était « vraiment terrifiée ».

Des incidents similaires se sont produits par la suite, selon Hila.

« Ils lui ont donné plus de trois occasions que cela se produise », a-t-elle dit.

La prison de Gilboa, le 28 février 2013. (Crédit : Moshe Shai/Flash90/Dossier)

Hila a dit qu’elle est certaine que les officiers supérieurs de la prison étaient au courant de ce qui s’y passait.

« Après la première fois qu’Ayin m’a libérée et avant que je n’entre rapidement dans le poste d’observation, j’ai vu l’officier de renseignement regarder dans la pièce – il a regardé et a vu que je n’y étais pas. Il a forcément entendu. Même s’ils n’ont pas vu, ils m’ont forcément entendu claquer la porte », a-t-elle déclaré.

« Je pense qu’ils ont préféré fermer les yeux plutôt que de s’en occuper, car mon service se terminait d’ici quelques semaines de toutes les façons, et je continuerai à me taire », a-t-elle ajouté. « Je n’ai pas parlé, je n’ai pas fait d’histoires, et je n’ai pas fait de grabuges. »

Selon Hila, ils préféraient qu’elle continue à se taire » plutôt que d’enquêter sur ce qu’Ayin lui faisait subir ».

Ayin a également convaincu Hila que sa vie et celles de sa famille étaient en danger du fait d’un autre prisonnier, Amjad Awad, condamné pour le meurtre de cinq membres d’une même famille lors d’une attaque à l’arme blanche en 2011 dans l’implantation d’Itamar. Hila affirme qu’il utilisait la peur pour la garder sous son contrôle.

Son avocate, Keren Barak, qui représente également d’autres femmes affirmant avoir été agressées dans la prison, a déclaré que, selon Hila, l’agent de renseignement de la prison lui aurait également dit qu’elle était menacée par Awad.

« Elle était terrorisée, parce qu’ils ont fait en sorte de lui faire peur tout au long de son service en lui disant que sa vie était en danger », a déclaré Barak à la Douzième chaîne.

Au cours des années qui ont suivi sa libération, Hila s’est reprochée ce qui s’était passé.

« Toutes ces années, j’ai pensé que j’étais la seule, que j’étais coupable, que c’était moi qui m’étais mise dans cette situation. Le fait même d’avoir gardé le silence à cause de l’état de peur dans lequel je me trouvais, est ce qui l’a conduit à commettre de tels actes sur moi. J’ai l’impression que le système m’a simplement prostituée et transformée en escort girl et m’a donné le sentiment pendant tant d’années que j’étais à blâmer, que c’est moi qui lui avais ‘ouvert la porte’, que tout était de ma faute. »

Barak a déclaré à la Douzième chaîne que sa cliente « vit dans l’indigence en raison de son état mental, qui ne lui permet pas d’intégrer le marché du travail. » Hila cherche maintenant à se réhabiliter financièrement, à retrouver un logement et à suivre une thérapie.

« Je veux juste prendre soin de mon âme, parce que mon âme est brisée, elle est marquée et elle a besoin d’une thérapie », a-t-elle déclaré.

« Aujourd’hui, j’ai l’impression d’être entrée en prison à l’âge de 19 ans, une prison dans laquelle un terroriste qui a assassiné une femme et commis une série d’attaques contre mon pays a le droit de nuire, d’attaquer, de violer les soldates qui viennent servir leur pays », a déclaré Hila.

L’avocat du prisonnier Ayin, Ramzi Katilat, a déclaré dans un communiqué que « les allégations de viol plusieurs années plus tard avaient pour but d’alléger sa conscience après avoir, durant son service, abusé de sa position et initié un contact sexuel avec un prisonnier de sécurité. »

L’administration pénitentiaire israélienne a répondu qu’il « s’agit d’allégations graves concernant un incident qui s’est produit il y a plusieurs années. Nous attendrons les résultats de l’enquête de police et agirons en fonction des conclusions en appliquant une politique de tolérance zéro, conformément à la politique de l’administration pénitentiaire ».

Le mois dernier, le site d’information Ynet a rapporté qu’un prisonnier palestinien condamné pour terrorisme, Mahmoud Atallah, faisait l’objet d’une enquête de police pour agression sexuelle alors qu’il était derrière les barreaux.

Le directeur de la prison de Gilboa, Freddy Ben Shitrit, arrivant pour son témoignage devant la commission d’enquête de l’Etat sur l’incident de l’évasion des prisonniers de sécurité de la prison de Gilboa, à Modiin, le 31 juillet 2022. (Crédit : Flash90)

En 2018, les premières allégations de soldates selon lesquelles elles avaient été forcées d’avoir des contacts intimes avec des prisonniers pour servir de monnaie d’échange sexuelle, ce qui leur avait valu d’être harcelées et agressées, avaient été révélées, mais l’affaire avait été classée en raison d’un manque de preuves.

L’année dernière, les allégations sont revenues sur le devant de la scène à la suite de déclarations fracassantes du directeur de la prison de Gilboa, Freddy Ben Shitrit. En novembre, Ben Shitrit – qui n’était pas présent à la prison au moment des incidents présumés – a déclaré que les femmes soldats qui étaient gardiennes de la prison avaient été poussées à servir d’appât pour les yeux ou pire encore pour certains détenus, afin d’empêcher les prisonniers de devenir incontrôlables.

Ben Shitrit a fait ces déclarations lors de son témoignage devant un panel du gouvernement concernant les défaillances qui ont permis l’évasion de terroristes palestiniens en septembre dernier. L’évasion a révélé des défaillances généralisées dans la prison, essentiellement liées à la pénurie de ressources humaines et matérielles, ce qui a suscité des vives critiques à l’encontre de l’administration pénitentiaire.

L’attention portée à cette question s’est accrue le mois dernier après que Hila soit sortie du silence.

Elle a fait part de ses allégations dans une publication sur le site de crowdfunding BeActive, où son avocate Keren Barak a mis en place une campagne dans le but de la soutenir. Dans ce message, elle dit avoir été « livrée » par son directeur à un dangereux terroriste « pour qu’il puisse [lui] faire du mal et abuser sexuellement [d’elle] encore et encore » ; elle a également ajouté que d’autres gardiennes avaient subi le même sort.

Ces nouvelles allégations ont conduit à une audience enflammée à la Knesset la semaine dernière. S’en sont suivies des promesses du gouvernement et des responsables de l’administration pénitentiaire de mener une enquête approfondie sur ces allégations et de faire payer les responsables pour leurs actes.

Le ministre de la Défense, Benny Gantz, a déclaré la semaine dernière qu’il avait ordonné la réévaluation d’un accord de plusieurs années permettant aux soldates d’être enrôlées dans le service pénitentiaire israélien, mais le ministre de la Sécurité intérieure, Omer Barlev, a répondu affirmant qu’un changement de la loi serait nécessaire.

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