Une star israélienne de l’opéra bientôt au Carnegie Hall
Nofar Jacoby, dont la mère est née en Italie, utilise Instagram pour faire directement découvrir sa voix et sa passion pour l'opéra au public
Jessica Steinberg est responsable notre rubrique « Culture & Art de vivre »

Quand Nofar Yacobi, soliste de l’Opéra d’Israël, interprétera la Symphonie numéro 4 de Mahler au Carnegie Hall de New York – le concert aura lieu le 30 mai – elle sait qu’elle se sentira encore en lien avec sa dernière prestation à Tel Aviv, dans l’opéra « Ariadne auf Naxos ».
Les deux œuvres sont interprétées en allemand et elles ont été écrites à des époques similaires, fait remarquer Yacoby.
« Le fait d’interpréter de la musique depuis un certain lieu m’inspire beaucoup de passion et d’émotion », dit-elle. « Et c’est quelque chose que je suis en mesure de partager avec le public ».
Cette année, Jacoby est la lauréate du prix Ottorino Respighi – et c’est dans ce cadre qu’elle sera soliste soprano avec le Chamber Orchestra of New York pour le concert de clôture de la saison 2024-2025, au Carnegie Hall.
« J’ai envoyé ma candidature pour le prix, je n’ai pas eu de nouvelles et je me suis dit : ‘D’accord, ils jouent avec moi’, » se souvient Jacoby. « Ensuite, j’ai reçu un courriel m’informant qu’ils souhaitaient s’entretenir avec moi. Cela a été une très bonne surprise. »
Tenter sa chance, explorer de nouvelles opportunités : ce sont des passions particulières pour Jacoby.
« C’est mon approche, ce n’est pas seulement parce que je suis une artiste de scène, c’est ce que je suis », insiste-t-elle. « J’aime créer des choses, les partager avec le monde, donner et recevoir, c’est réciproque ».
Jacoby, cantatrice âgée d’une trentaine d’années, représente la jeune génération de fans de cette forme d’art vieille de 400 ans. Elle poste régulièrement des extraits de ses représentations et de ses morceaux préférés sur Instagram.
Elle a également fait des sauts professionnels à plus d’une occasion.
Il y a dix ans, Jacoby avait mis en ligne sa passion pour l’opéra lors d’un vol à destination d’Israël, en interprétant avec humour la « Reine du chocolat ».
Elle a également dirigé un vaste projet en ligne pendant la pandémie de coronavirus qui était intitulé « Solidarité musicale », qui a rassemblé 500 musiciens de 65 opéras du monde entier, un chœur et un orchestre pour interpréter le « Chœur des esclaves hébreux » de Verdi afin de faire naître l’espoir, la solidarité et la liberté.
Ayant grandi dans le centre du pays, dans la ville de Kiryat Ono, Jacoby a joué du piano dès son plus jeune âge et elle a élargi son répertoire à plusieurs instruments, découvrant qu’elle avait des aptitudes et un talent pour l’interprétation musicale.
Quand son professeur de piano lui avait demandé de participer à une chorale à l’âge de 12 ans, elle n’avait pas été intéressée mais elle avait fini par tomber amoureuse de l’art vocal.
« J’ai entendu ce premier morceau et j’ai ressenti quelque chose de magique », raconte Jacoby, qui avait rejoint la chorale.
Pourtant, cela n’avait été qu’à l’adolescence – lorsqu’elle avait voulu explorer l’opéra plus en profondeur – qu’elle avait ressenti une plus grande familiarité avec cette forme d’art qu’elle ne l’avait initialement imaginé.
Ses parents aimaient l’opéra et cette musique résonnait souvent au sein du foyer familial. Elle se rappelle que son père et sa mère réveillaient parfois leurs enfants, le matin, par la « Tosca » de Maria Callas dans sa version italienne originale.
La mère de l’artiste est née en Italie – et Jacoby a toujours parlé italien à la maison.
« Je lis les paroles et je réalise que je les connais déjà », dit-elle. « C’est particulièrement doux quand vous prenez conscience du fait que vous connaissez déjà cette musique, qu’elle fait déjà partie de vous ».
Jacoby apprécie l’absence de toute amplification électronique dans les opéras lors des représentations, ce qui permet aux voix des chanteurs de toucher physiquement les oreilles du public.
« Il n’y a rien entre votre voix et leurs oreilles », dit-elle. « C’est très intime, ça vous met en contact direct avec le public. Et c’est quelque chose que je suis très heureuse de faire ».
Jacoby avait poursuivi ses études à l’Académie de musique de Tel Aviv et elle avait ensuite passé une audition pour l’Opéra d’Israël, où elle avait été immédiatement engagée comme soliste.
Elle s’est produite dans de nombreux opéras dans le monde entier, y compris au cours des 19 derniers mois – depuis l’attaque sanglante commise par le Hamas, le 7 octobre.
Si certains musiciens israéliens ont été écartés des festivals et qu’ils ont été privés de représentations, Jacoby indique qu’elle n’a jamais eu l’occasion de ressentir de sentiment anti-israélien de la part de ses collègues ou du public.
« Je n’ai rien rencontré de tel et je n’y pense pas », dit-elle. « J’ai toujours à l’esprit la guerre en cours et les otages, et j’ai toujours à l’esprit la situation dans son ensemble. C’est une sorte de blessure ouverte dont personne ne sait quand elle se refermera, mais je ne peux pas la laisser me perturber ».