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US : Avant le scrutin, les Juifs libéraux expriment leur colère contre Netanyahu

Après le soutien de Kakhol lavan à l'accord sur le mur Occidental, les responsables espèrent que le scrutin redonnera l'élan qui comblera le fossé entre lsraël et la diaspora

Eric Cortellessa couvre la politique américaine pour le Times of Israël

Le Premier ministre Benjamin Netanyahu, à gauche, s'exprime pendant une cérémonie d'allumage de bougies à l'occasion de la fête de Hanoukkah, au mur Occidental, dans la Vieille ville de Jérusalem, le 6 décembre 2018 (Crédit : Gil Cohen-Magen/Pool/AFP)
Le Premier ministre Benjamin Netanyahu, à gauche, s'exprime pendant une cérémonie d'allumage de bougies à l'occasion de la fête de Hanoukkah, au mur Occidental, dans la Vieille ville de Jérusalem, le 6 décembre 2018 (Crédit : Gil Cohen-Magen/Pool/AFP)

WASHINGTON — Alors que Benjamin Netanyahu se trouve actuellement au coeur de sa tentative de réélection la plus dure à ce jour, de nombreux Juifs américains libéraux veulent que les Israéliens aient conscience de la rancune qu’ils éprouvent à l’égard du Premier ministre – et qu’ils comprennent que ce malaise doit être pris au sérieux.

Le fossé n’a cessé de s’agrandir, ces dernières années, entre l’Etat juif et la diaspora américaine. Alors que les électeurs se préparent à se rendre aux urnes, mardi, les responsables communautaires juifs américains – qui penchent plutôt à gauche – veulent transmettre un message : Celui que les dégâts commis par Netanyahu dans la relation d’Israël avec les Juifs américains pourraient avoir des conséquences durables sur la sécurité de l’Etat juif.

« C’est une question de sécurité pour Israël, parce que la nécessité que les Juifs américains puissent continuer à ressentir un lien avec Israël est clairement importante », commente Susie Gelman, présidente de l’organisation Israel Policy Forum. « Il faut un groupement aussi large que possible pour prôner des financements américains ».

En d’autres mots, si Israël devait trop s’écarter de la communauté juive américaine, le pays pourrait perdre l’un de ses plus grands défenseurs à Washington (Sous les termes d’un accord conclu sous l’administration Obama, le gouvernement des Etats-Unis donne à l’Etat juif 3,8 milliards de dollars en aides par an).

Et avec Netanyahu à la barre de l’Etat juif, de multiples chefs communautaires américains confient au Times of Israel que les Juifs des Etats-Unis s’éloignent de plus en plus d’Israël. Et il y a une raison essentielle à ce phénomène, clament-ils.

Un Juif ultra-orthodoxe passe devant un panneau d’affichage électoral arborant un portrait du Premier ministre Benjamin Netanyahu, à Jérusalem, le 1er avril 2019. (THOMAS COEX / AFP)

Tandis que ces Juifs américains ont fait part de nombreux griefs – le manque d’initiative de Netanyahu concernant la poursuite d’un accord de paix avec les Palestiniens, le rôle qu’il a tenu pour faire de l’Etat juif une cause partisane au Capitole – il y a une question que la diaspora voudrait voir soulevée lors des élections : l’annulation du plan destiné à créer un espace de prière égalitaire au mur Occidental.

« Dans la mesure où les Juifs américains se sentent dénigrés – ou dans la mesure où nos pratiques religieuses ne sont pas considérées comme légitimes par la politique officielle du gouvernement – cela n’augure rien de bon en ce qui concerne la relation d’Israël avec la diaspora », explique Gelman au Times of Israel.

Les chefs communautaires juifs américains ont fait part de leur inquiétude aux Premiers ministres aspirants depuis des années maintenant – et cela semble avoir fonctionné avec une faction au moins.

Kakhol lavan a ainsi juré, le mois dernier, de mettre en oeuvre l’accord gelé prévoyant l’expansion du pavillon pluraliste de prière dans le cadre de son programme de campagne.

De plus, dans le discours qu’il a prononcé lors de la conférence politique de l’AIPAC, le leader de Kakhol lavan, Benny Gantz, a particulièrement insisté sur le fait que cette partie du programme était à ses yeux une priorité.

« L’unité : C’est l’arme secrète de la nation juive », a dit Gantz. « Je peux vous dire avec certitude que le mur Occidental est suffisamment long pour accueillir tout le monde. Tout le monde ! »

Les plus importants leaders américains à la tête du judaïsme libéral espèrent que l’accord, qui prévoit également la mise en place d’une instance non-orthodoxe chargée de superviser le site, connaîtra un nouvel élan si un nouveau gouvernement remplace Netanyahu.

Steven Wernick (Crédit : Mike Diamond Photography/via JTA)

« Ce qui est encourageant, c’est que c’est la toute première fois qu’on peut voir ce type d’ordre du jour inscrit dans le cadre du programme d’un parti officiel en vue d’une élection israélienne », note Steven Wernick, ancien directeur-général du groupe United Synagogue of Conservative Judaism.

« Je suis très, très heureux de voir cette question revêtir une importance telle qu’elle figure dorénavant en tête du programme proposé par Kakhol lavan ».

Et pourtant, reconnaît Wernick, le prochain gouvernement inclura probablement une faction en désaccord avec cette proposition, indépendamment du vainqueur du scrutin. « Je tente de ne pas trop me réjouir prématurément », dit-il au Times of Israel. « Je sais bien qu’en raison de la nature même de la politique israélienne, les partis Haredim [ultra-orthodoxes] feront probablement partie de la coalition, quelle qu’elle soit, à l’avenir ».

La décision initiale de la construction d’un nouveau pavillon de prière avait été prise au mois de janvier 2016, lorsque le gouvernement de Netanyahu avait approuvé ce qui avait été appelé « compromis du mur Occidental ». Après des décennies d’activisme visible du groupe féministe des Femmes du mur et après quatre années de négociations officielles entre les représentants du judaïsme libéral et du gouvernement, un arrangement définitif avait été conclu. Mais, au mois de juin 2017, Netanyahu, subissant les pressions intenses de ses partenaires de coalition ultra-orthodoxes, avait suspendu le compromis.

Cette volte-face de Netanyahu avait entraîné une crise immédiate, les leaders juifs américains fustigeant ce revers. Et, ont expliqué plusieurs responsables américains, s’il y avait déjà des divisions croissantes avant l’échec de l’accord sur le mur Occidental, cet épisode a gravement empiré les choses.

La mise en oeuvre total de l’arrangement passé avec Netanyahu – avant qu’il ne le gèle – est un pré-requis à l’apaisement des tensions, a expliqué l’un d’eux.

« Ce plan est très nécessaire et la perspective de sa réalisation nous enthousiasme », note Ammiel Hirsch, grand rabbin de la Stephen Wise Free Synagogue, à New York, et ancien directeur de l’ARZA, l’aile sioniste du mouvement juif réformé.

« La relation d’Israël avec les Juifs américains s’est dégradée de manière significative durant les mandats du Premier ministre Netanyahu », a-t-il ajouté. « Ils ont envoyé le message qu’indépendamment de ce que nous pourrions faire, le monopole ultra-orthodoxe sur la vie religieuse était trop fort pour être dépassé. Même un Premier ministre puissant, à son poste depuis si longtemps, semble s’incliner s’il s’agit d’honorer leurs désirs ».

Des hommes ultra-orthodoxes protestent contre des hommes et des femmes libéraux qui prient devant le mur Occidental, dans la Vieille Ville de Jérusalem, le 16 juin 2016. (Crédit : Hadas Parush/Flash90)

Kakhol lavan, l’alliance formée par le mouvement Hossen LeYisrael de l’ancien chef d’Etat-major Benny Gantz et le parti Yesh Atid du leader centriste Yair Lapid, a estimé que soutenir le plan était nécessaire pour réparer les relations avec les Juifs américains.

Cette proposition est entrée dans le cadre d’un « engagement spécifique visant à réhabiliter la relation avec la diaspora, né d’une attention particulière portée aux besoins et aux points de vue des Juifs de la diaspora », a confié une source de Kakhol lavan au Times of Israel au moment de la révélation du programme de la plateforme.

Selon l’un des détracteurs les plus véhéments de Netanyahu aux Etats-Unis, la réticence affichée par le Premier ministre face au plan du mur Occidental n’est qu’une des nombreuses bévues qu’il a commises dans sa gestion des relations entre les Etats-Unis et Israël.

Le directeur général de J Street, Jeremy Ben-Ami, pendant la conférence de l’association, à Washington, le 21 mars 2015. (Crédit : JTA/J Street)

« Le plus grand dégât commis par Netanyahu et son équipe, c’est qu’ils ont mis le gouvernement israélien dans une situation où l’avenir de la relation entre les Etats-Unis et Israël repose dorénavant entre les mains des républicains et des évangéliques », affirme Jeremy Ben-Ami, chef de J-Street, un groupe libéral dont les activités se concentrent sur le Moyen-Orient.

Après s’être aligné aux côtés des républicains, au Congrès, pour déjouer l’accord sur le nucléaire conclu par l’ancien président Barack Obama avec l’Iran, après avoir forgé une relation étroite avec Donald Trump, personnalité éminemment clivante, Netanyahu a clairement établi par son abandon du compromis sur le mur Occidental que les Juifs américains n’étaient pas un groupe qu’il se sentait dans l’obligation de prendre en compte, poursuit Ben-Ami.

« L’effacement des Juifs non-orthodoxes et plus libéraux dans le pays est une réelle erreur stratégique pour Israël », déplore Ben-Ami.

Tandis que les leaders juifs américains veulent généralement éviter de paraître interférer dans les élections israéliennes, un grand nombre veulent que les électeurs prennent conscience de l’importance que ce dossier revêt à leurs yeux.

« Les citoyens israéliens élisent leurs représentants, pas les Juifs américains », explique Hirsch au Times of Israel. « Ceci étant dit, il est important que l’électorat israélien sache que certains sujets nous tiennent fortement à cœur ».

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