Washington voit un progrès pour faire libérer les otages et une pause dans les combats
Le chef de la CIA va s'entretenir à Paris avec les chefs du Mossad, du Shin Bet, des renseignements égyptiens et avec le Premier ministre qatari
Les négociateurs américains progressent sur la question d’un accord potentiel dans le conflit en cours dans la bande de Gaza. Selon les dispositions de cet accord, Israël ferait une pause dans ses combats contre le Hamas pendant deux mois en échange de la libération de plus de cent otages qui avaient été enlevés par le groupe terroriste lors de son attaque meurtrière dans le sud d’Israël, le 7 octobre.
Les officiels, qui se sont exprimés sous couvert d’anonymat en raison du caractère sensible des négociations, ont confié samedi que les dispositions figurant dans cette ébauche d’accord se dérouleraient en deux phases.
Pendant la première phase, les combats cesseraient pour permettre aux femmes, aux personnes âgées et aux blessés actuellement retenus en captivité par le Hamas d’être relâchés.
Israël et le Hamas finaliseraient alors les détails de la pause pendant 30 jours, avant de lancer une seconde phase qui serait marquée par le remise en liberté des soldats et des hommes retenus en otage.
L’accord appelle également Israël à accepter un afflux plus important des aide humanitaires à Gaza.
S’il ne mettrait pas un terme définitif à la guerre, les responsables américains espèrent que l’accord pourrait poser les fondations nécessaires pour une résolution durable du conflit.
C’est le New York Times qui a fait savoir le premier, samedi, que des progrès avaient été réalisés en vue de la conclusion d’un accord.
Le directeur de la CIA, Bill Burns, discutera des contours de cet accord en préparation lorsqu’il rencontrera dimanche, en France, David Barnea, chef de l’agence d’espionnage du Mossad ; le Premier ministre qatari Mohammed bin Abdulrahman Al Thani et le chef des renseignements égyptien, Abbas Kamel, pour des discussions centrées sur les négociations consacrées à la libération des otages, selon trois personnes proches de l’organisation de ce sommet qui n’ont pas été autorisées à s’exprimer publiquement.
Toutefois, les responsables israéliens ont minimisé les espoirs suscités par ces discussions dans des propos qui ont été rendus publics par la Douzième chaîne, disant que le Hamas soumettait avec obstination la demande d’une cessation totale de la guerre par Israël, laissant le groupe terroriste au pouvoir dans la bande de Gaza.
La guerre avait éclaté le 7 octobre, lorsque des terroristes du Hamas, dans la bande de Gaza, avaient lancé une attaque massive dans le sud d’Israël qui avait fait 1 200 morts environ, des civils en majorité dont la plus jeune avait 10 mois. Les hommes armés avaient commis des massacres ; ils s’étaient rendus coupables de viols en réunion et il avaient torturé et mutilé leurs victimes dans les communautés frontalières de la bande de Gaza, exécutant froidement les jeunes qui prenaient part à une rave-party. Ils avaient aussi kidnappé 253 personnes, des civils en majorité, les prenant en otage dans la bande de Gaza. Plus de 130 otages sont encore à Gaza, le plus jeune a un an.
En guise de réponse à l’assaut meurtrier, Israël a lancé une campagne militaire, notamment une offensive terrestre, dont l’objectif est de détruire le Hamas, de l’écarter du pouvoir et d’obtenir la libération des otages.
Le Premier ministre Benjamin Netanyahu a promis de manière répétée de continuer l’offensive jusqu’à la victoire totale d’Israël contre le groupe terroriste.
La Douzième chaîne a annoncé qu’en plus de Barnea, le chef des services de sécurité du Shin Bet, Ronen Bar et l’envoyé militaire sur la question des otages, Nitzan Alon, seront également présents lors de ce sommet de Paris qui vise à tenter de trouver de nouvelles solutions pour sortir de l’impasse.
« Nous espérons que nous parviendrons à faire une avancée – une avancée qui redonnera le coup d’envoi à des négociations réelles, avec une volonté réelle de parvenir à un accord », a confié une source israélienne à la chaîne samedi, sous couvert d’anonymat. « Actuellement, les conditions ne permettent pas de le faire parce qu’il n’y a pas d’entente sur un cadre général. C’est là l’objectif du sommet. Sortir de l’impasse et trouver des formules créatives ».
Le Hamas insiste non seulement sur la nécessité, pour Israël, de stopper les combats mais également sur celle de retirer les forces israéliennes qui sont actuellement déployées à Gaza. Il exige aussi des garanties internationales qui assureront au groupe terroriste de pouvoir se maintenir au pouvoir au sein de l’enclave côtière, ont noté ces sources. Israël, de son côté, considère un arrêt définitif de son offensive comme « une ligne rouge ». Selon des sources, l’Égypte et le Qatar devront se montrer « plus créatifs » en ce qui concerne la résolution des problématiques qui se posent actuellement sur le terrain et ne pas se contenter de leur rôle actuel de médiateur entre les deux parties.
Si l’Égypte entretient des relations diplomatiques avec Israël, ce n’est pas le cas du Qatar.
De son côté, Netanyahu a critiqué l’émirat du Golfe au cours d’une conférence de presse télévisée, dans la soirée de samedi.
« Le Qatar accueille les dirigeants du Hamas ; il finance aussi le Hamas et il a de l’influence sur le Hamas », a-t-il déclaré. « Le Qatar a promis que les médicaments arriveraient jusqu’à nos otages. Et il a dit qu’il pourrait nous aider à rapatrier nos otages. Et en même temps, à aider à assurer le transfert des médicaments ».
Mercredi, le ministère des Affaires étrangères, à Doha, avait noté être « consterné » suite à des paroles prononcées par Netanyahu – qui avaient fuité auprès des chaînes de télévision. Le Premier ministre avait été enregistré en train de dire qu’il s’était abstenu de remercier le Qatar pour son travail de médiation et qu’il estimait que l’émirat, riche en ressources gazières, était « problématique ».
Netanyahu subit des pressions de plus en plus fortes de la part des familles de nombreux otages qui réclament un accord qui permettrait à leurs proches d’enfin recouvrer la liberté.
Les manifestations hebdomadaires organisées à Tel Aviv demandent la conclusion d’un accord – et cela a encore été le cas du rassemblement qui a eu lieu samedi dans la soirée.
Environ cent otages avaient été libérés dans le cadre d’un accord de cessez-le-feu d’une semaine, au mois de novembre, en échange de la remise en liberté de prisonniers sécuritaires palestiniens qui étaient incarcérés en Israël. L’accord avait été négocié par l’Égypte et par le Qatar.
Environ 130 personnes restent en captivité et toutes ne sont plus en vie.
Le président américain Joe Biden s’est entretenu par téléphone, vendredi, avec le président égyptien Abdel Fattah el-Sissi et avec l’émir du Qatar, Sheikh Tamim Bin Hamad Al-Thani. Les conversations téléphoniques avec les deux dirigeants se sont principalement intéressées à la question des otages.
« Les deux leaders ont réaffirmé qu’un accord sur les otages était déterminant pour la mise en place d’une pause prolongée dans les combats et pour garantir qu’une aide humanitaire supplémentaire vitale arrivera bien jusqu’aux civils dans toute la bande de Gaza », a indiqué la Maison Blanche dans un compte-rendu de la discussion qui a eu lieu entre le président américain et le dirigeant qatari. « Ils ont souligné l’urgence de la situation et ils ont salué la coopération étroite de leurs équipes dans l’avancée des négociations récentes ».
Burns va partir en France pour ces discussions de premier plan après le voyage effectué, la semaine dernière, au Moyen-Orient par le haut-conseiller à la Maison Blanche Brett McGurk, où il a évoqué la question des otages.
Si Burns constate des avancées dans ses discussions en France, Biden pourrait rapidement renvoyer McGurk au Moyen-Orient pour qu’il tente rapidement de conclure un accord. Pendant son déplacement, la semaine dernière, McGurk avait aussi essayé de préparer le terrain en vue du prochain voyage dans la région du secrétaire d’État Antony Blinken qui, la semaine prochaine, se rendra au Moyen-Orient pour la cinquième fois depuis le début de la guerre entre Israël et le Hamas, le 7 octobre.
La Maison Blanche et la CIA doivent encore confirmer publiquement les rencontres de Burns en France et les responsables de l’administration se sont bien gardés d’affirmer qu’un accord pourrait être négocié rapidement.
« Nous ne devons pas attendre d’avancée imminente », a ainsi commenté le porte-parole du Conseil de sécurité nationale américain, John Kirby, devant les journalistes.
Biden et ses conseillers savent parfaitement que le bilan des morts à Gaza qui ne cesse de grimper, en plus des souffrances de la population au sein de l’enclave côtière, frustrent une partie de sa base Démocrate, qui préférerait qu’il exerce davantage de pressions sur Israël en vue d’un arrêt total de la guerre.
Le ministère de la Santé de Gaza, qui est placé sous l’autorité du Hamas et qui ne fait pas de différence entre terroristes et civils, a annoncé que la guerre avait fait au moins 26 000 morts, côté palestinien. Des chiffres qui sont invérifiables de manière indépendante et qui comprendraient près de 10 000 hommes armés du Hamas qui ont été tués par Tsahal, affirme Israël. Plus de 200 soldats israéliens sont tombés sur le front au sein de l’enclave côtière.
Les Démocrates du Michigan ont averti la Maison Blanche que la prise en charge du conflit, par Biden, pourrait lui coûter suffisamment de soutien, au sein de l’importante communauté d’origine arabe de l’état, pour influencer le résultat des élections qui auront lieu en 2024 – un état qui pourrait s’avérer être déterminant dans la capacité du président à se maintenir à sa fonction pour un deuxième mandat.