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800 ans de relations entre la famille royale et les Juifs de Grande-Bretagne

Le grand rabbin du Royaume-Uni et Isaac Herzog ont assisté au couronnement de Charles III ce samedi ; retour sur les liens qui ont historiquement uni la Couronne à ses sujets juifs

Le prince Charles de Grande-Bretagne portant une kippa lors des funérailles de Shimon Peres au cimetière militaire du mont Herzl, à Jérusalem, le 23 septembre 2016. (Crédit : Abir Sultan, Pool via AP/Dossier)
Le prince Charles de Grande-Bretagne portant une kippa lors des funérailles de Shimon Peres au cimetière militaire du mont Herzl, à Jérusalem, le 23 septembre 2016. (Crédit : Abir Sultan, Pool via AP/Dossier)

LONDRES – Lorsque le règne de 70 ans de la reine Élisabeth II s’est achevé par son décès à l’âge de 96 ans en septembre dernier, son fils Charles est immédiatement devenu roi.

Cependant, c’est samedi dernier que le roi Charles III et son épouse, la reine Camilla, ont officiellement été couronnés à l’abbaye de Westminster.

Il est désormais le 40e monarque à avoir été couronné à l’abbaye, dans une lignée qui remonte à 900 ans en arrière, lors du couronnement de Guillaume le Conquérant, le jour de Noël 1066.

La Grande-Bretagne a fait ce qu’elle sait sans doute encore faire de mieux : organiser un spectacle royal couvert de diamants, d’hermine et d’or, avec tout l’apparat, les cérémonies, et les traditions anciennes dont elle dispose.

Il s’agit d’une cérémonie chrétienne – en grande partie inchangée depuis 1 000 ans – au cours de laquelle le roi a prêté serment, a été « oint, béni et sacré » et a reçu la couronne de Saint Édouard, créée pour le roi Charles II en 1661, qui a été placée sur sa tête pendant quelques minutes.

Mais il y a également eu quelques détails juifs, comme la participation du grand rabbin Ephraïm Mirvis à la cérémonie à l’abbaye de Westminster le samedi matin, des uniformes fournis par une entreprise juive de confection et la composition par trois compositeurs juifs d’une nouvelle musique en l’honneur du roi, conformément aux relations étroites et harmonieuses que la communauté entretient avec la famille royale.

Illustration : Le prince Charles de Grande-Bretagne, à gauche, et le grand rabbin Ephraïm Mirvis, à droite, visitant la synagogue Tzedek ve-Shalom reconstruite en 1736 au Suriname, au Musée d’Israël, à Jérusalem, le 23 janvier 2020. (Crédit : Menahem Kahana/Pool Photo via AP)

Les Juifs de Grande-Bretagne entretiennent des liens avec la Couronne qui remontent aux premières années de la famille royale. Voici sept anecdotes historiques – pas toutes roses – qui lient les sujets juifs du royaume à la monarchie.

1. Charles en Israël

Alors que sa mère, feue la reine Élisabeth II, ne s’est jamais rendue en Israël (les visites à l’étranger du monarque se font sur les conseils du gouvernement), Charles a effectué sa toute première visite officielle dans l’État juif en 2020. Dès lors, l’héritier de la reine avait pris en charge les voyages à l’étranger.

Ce n’était pas la première fois que Charles se rendait en Israël ; il avait déjà effectué des visites privées pour assister aux funérailles des Premiers ministres Yitzhak Rabin et de Shimon Peres. Cependant, c’est le nouvel héritier du trône, le fils aîné de Charles, William, qui a ouvert la voie royale vers Israël. En 2018, William, qui porte désormais le titre de prince de Galles, a effectué la toute première visite officielle en Israël d’un membre de la famille royale.

Le prince William en compagnie du grand rabbin britannique Ephraïm Mirvis et du rabbin du mur Occidental Shmuel Rabinovitch pendant la visite du prince William, dans la Vieille Ville de Jérusalem, le 28 juin 2018. (Crédit : AFP/POOL/Abir Sultan)

2. Opposant à la haine

Il était tout à fait approprié que la première visite officielle de Charles en Israël soit pour assister au Forum mondial de la Shoah. Le roi s’oppose depuis longtemps à l’antisémitisme et s’implique dans la commémoration et l’éducation à la Shoah en tant que mécène actif de l’Holocaust Memorial Day Trust (rôle qu’il a repris de la reine en 2016). En janvier, Charles avait publié son premier message depuis qu’il était devenu roi, après le décès de sa mère, pour marquer la Journée annuelle de commémoration de la Shoah au Royaume-Uni. Ce message évoquait ses nombreuses rencontres avec des survivants de la Shoah.

« Au fil des ans, j’ai été profondément touché de rencontrer tant de survivants de la Shoah, des personnes extraordinaires qui ont toutes été confrontées à une horreur inimaginable », avait-il déclaré. « Leur force et leur détermination à partager leurs témoignages sont une source d’inspiration pour nous tous. Ce sont des personnes qui, malgré les souffrances qu’elles ont endurées, ont mené une vie des plus incroyables et des plus florissantes au Royaume-Uni, et ont apporté une contribution remarquable à la société et à la vie publique britanniques. »

Lily Ebert et Dov Forman, auteur de « La promesse de Lily ». (Autorisation)

L’année dernière, à l’occasion de la Journée de commémoration de la Shoah, Charles a dévoilé sept portraits de survivants qu’il avait commandés. Lors de la cérémonie de dévoilement, Lily Ebert, 98 ans, lui a dit : « Je vous rencontre, en l’honneur de tous ceux qui ont perdu la vie. » En lui touchant l’épaule, Charles lui a répondu : « Mais c’est un plus grand privilège pour moi. »

3. Une histoire de famille

L’intérêt de Charles pour la Shoah est personnel. En 1993, sa grand-mère, la princesse Alice de Battenberg, s’est vu décerner le titre de « Juste parmi les nations » par Yad Vashem. Alice, la mère du père de Charles, feu le duc d’Édimbourg, était un membre de la famille royale grecque qui vivait à Athènes lorsque les nazis ont occupé la ville pendant la Seconde Guerre mondiale. Alice a ensuite hébergé Rachel Cohen, veuve de Haimaki Cohen, ancien membre du Parlement et allié de la famille royale, et deux de ses enfants, dans sa résidence royale.

Des chars allemands traversant Athènes, en 1943. (Crédit : CC BY-SA 3.0/ Bundesarchiv bild via Wikimedia Commons)

« À certains moments, les Allemands ont commencé à avoir des soupçons, et la princesse Alice a même été interrogée par la Gestapo. Profitant de sa surdité, elle fit semblant de ne pas comprendre leurs questions jusqu’à ce qu’ils la laissent tranquille », a indiqué Yad Vashem.

« Elle a sauvé toute ma famille », dira plus tard Evy Cohen. « Il est clair que je ne serais pas en vie, je ne serais pas ici, je ne serais pas née si elle n’avait pas été là. »

Le prince Philip d’Angleterre escortant sa mère, la princesse Alice Andreas de Grèce, lors du mariage de la princesse Margarita de Baden et du Prince Tomislav de Yougoslavie après la cérémonie religieuse, à Salem, en Allemagne, le 5 juin 1957. (Crédit : AP Photo)

En 1994, le duc d’Édimbourg s’était rendu à Jérusalem pour planter un arbre en l’honneur de sa mère.

« Je soupçonne qu’il ne lui est jamais venu à l’esprit que son action était de quelque manière que ce soit spéciale », avait-il déclaré à l’époque. « Elle aurait considéré qu’il s’agissait d’une réaction humaine tout à fait naturelle face à des êtres humains en détresse. »

Alice, qui a ensuite fondé un ordre de religieuses grecques orthodoxes, est enterrée au mont des Oliviers. Comme son père, Charles s’est rendu sur la tombe d’Alice et a parlé de son « immense fierté » pour son action.

4. L’huile de Terre Sainte

Le Saint Chrême, l’huile d’onction, qui a été utilisée lors de la cérémonie de couronnement vient de loin. Créée à partir d’olives récoltées dans deux bosquets du mont des Oliviers, elle a été bénie lors d’une cérémonie à l’église du Saint-Sépulcre de Jérusalem en mars, sous la direction du patriarche de Jérusalem, le patriarche grec orthodoxe Theophilos III, et de l’archevêque anglican de Jérusalem, le révérend Hosam Naoum.

« Les olives ont été pressées juste à l’extérieur de Bethléem. L’huile a été parfumée avec des huiles essentielles – sésame, rose, jasmin, cannelle, néroli, benjoin et ambre – ainsi qu’avec de la fleur d’oranger », a déclaré le palais de Buckingham dans un communiqué. Le palais a ajouté que la formule était utilisée depuis des centaines d’années, un point souligné lors de la cérémonie de consécration par Welby.

« Cela atteste du lien historique profond entre le couronnement, la Bible et la Terre sainte », a déclaré l’archevêque. « Depuis les anciens rois jusqu’à nos jours, les monarques ont été oints avec de l’huile provenant de ce lieu sacré. »

Mais les relations entre les Juifs de Grande-Bretagne et la monarchie n’ont pas toujours été aussi harmonieuses ni sans incident.

5. Liens avec les nazis

Le grand-oncle de Charles, Édouard VIII, a abdiqué le trône en 1936 lorsque le gouvernement l’a empêché d’épouser l’Américaine Wallis Simpson, deux fois divorcée. Mais Édouard, qui s’est ensuite installé en France, a épousé sa bien-aimée et est devenu duc de Windsor, a longtemps fait l’objet de rumeurs et de spéculations sur ses sympathies nazies présumées. Un documentaire, diffusé l’année dernière à la télévision britannique, affirme qu’il avait transmis aux nazis des informations qui avaient contribué à la chute de la France en 1940 et encouragé l’Allemagne à bombarder la Grande-Bretagne pour la soumettre.

Quelle que soit la véracité de ces allégations, les nazis – dont on pense qu’ils avaient prévu d’offrir le trône à Édouard s’ils avaient réussi à envahir le Royaume-Uni en 1940 – avaient de bonnes raisons de considérer le couple comme des compagnons de route potentiels. Au début de l’été 1933, par exemple, Édouard avait confié au petit-fils du Kaiser qu’il n’est « pas de notre ressort d’interférer dans les affaires intérieures de l’Allemagne, qu’il s’agisse des Juifs ou de quoi que ce soit d’autre ».

Édouard VIII passant devant une formation SS lors d’un voyage en Allemagne. (Crédit : Bundesarchiv bild)

Quelques mois après avoir abandonné sa couronne et son pays, le duc avait effectué une visite controversée de 12 jours dans le Reich, où lui et son épouse avaient été salués par les nazis. En 1940, Édouard avait publiquement qualifié Hitler de « très grand homme ».

Ce point de vue n’était certainement pas partagé par son frère, le roi George VI, et son épouse, la reine Élisabeth (les grands-parents de Charles). Alors que leurs enfants, feue la reine Élisabeth II et sa sœur, la princesse Margaret, ont été, comme beaucoup d’autres, évacuées de la capitale, le couple a tenu à rester avec ses sujets à Londres pendant les pires moments du Blitz.

6. Pogrom lors du couronnement

Lors du couronnement de Richard Ier en 1189, les dirigeants juifs qui tentaient d’apporter des cadeaux au nouveau monarque furent attaqués. Une explosion de violence s’ensuivit, au cours de laquelle les Juifs se réfugièrent à la Tour de Londres. Le chroniqueur et diplomate du XIIe siècle Roger of Howden a rapporté que seuls les Juifs qui s’étaient cachés dans la citadelle royale ou chez des amis avaient échappé à la mort.

« La ferveur des croisades de la fin des années 1180 a probablement été le facteur déterminant des massacres, s’ajoutant aux préjugés antisémites déjà présents, au ressentiment économique et à l’opposition aux relations de la Couronne avec les Juifs », a récemment déclaré l’historien Rory MacLellan.

7. Une expulsion royale et un retour républicain

Du temps de l’Angleterre médiévale, les Juifs étaient juridiquement considérés comme la propriété de la Couronne. Considérés comme une précieuse vache à lait, les fonctionnaires royaux étaient cyniquement chargés de protéger les Juifs, tout en veillant à ce qu’ils paient des impôts arbitraires lorsque le roi avait besoin d’eux.

Cette relation difficile a pris fin en 1290 lorsque le roi Édouard Ier a signé l’Édit d’expulsion. Financièrement épuisée par l’exploitation fiscale, la capacité de la communauté à contribuer aux coffres d’un monarque à court d’argent avait été sérieusement entamée. Édouard ordonna donc que tous les Juifs d’Angleterre – quelque 3 000 au total – se convertissent ou ne s’exilent à l’étranger.

Les Juifs ne sont revenus en Angleterre qu’en 1650, lorsqu’ils ont été invités à se réinstaller par le leader parlementaire Oliver Cromwell pendant le bref – et malheureux – flirt de l’Angleterre avec le républicanisme.

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