À Londres, les nerfs à vif de la communauté juive face à l’antisémitisme
Plus de 400 actes délictueux antisémites ont été recensés ce mois-ci à Londres, contre 28 sur la même période l'année dernière
« Les gens se sentent très vulnérables, ils ont peur, et les incidents (antisémites) atteignent des records », déclare Raymond Simonson, le directeur du centre culturel JW3.
À Londres, les nerfs de la communauté sont à vif depuis l’attaque sanglante du groupe terroriste du Hamas en Israël le 7 octobre.
« Nous avons doublé nos équipes de sécurité. La police a quadruplé ses visites ces trois dernières semaines. Chaque synagogue, chaque bâtiment juif a renforcé sa sécurité », poursuit Raymond Simonson, tout en présentant une installation « La table vide du Shabbat », destinée à garder dans les mémoires les plus de 220 otages du Hamas.
« Le Shabbat c’est un moment de paix et c’est quelque chose que je respecte avec ma famille tous les vendredis. Je me rends compte que je le prenais pour acquis », raconte la voix brisée Raymond Simonson.
Autour d’une immense tablée sont installés 220 sièges vides – y compris des sièges de bébé – avec sur chaque dossier le nom, l’âge, la nationalité des captifs et le mot « kidnappés ».
La guerre a éclaté après le massacre du 7 octobre perpétré par le Hamas. Lors de cette attaque barbare menée contre Israël, près de 2 500 terroristes ont fait irruption en Israël depuis la bande de Gaza par voie terrestre, aérienne et maritime ont tué plus de 1 400 personnes, dont une majorité de civils, au cours de raids sur plus de 20 communautés frontalières près de la bande de Gaza, massacrant des familles entières dans leurs maisons et au moins 260 fêtards lors d’un festival de musique en plein air. Les terroristes ont également enlevé, près de 240 personnes, dont des femmes, des enfants et des personnes âgées, qu’ils ont entraînés dans la bande de Gaza où ils sont toujours retenus captifs.
Malgré le renforcement des mesures de sécurité, plus de 400 actes délictueux antisémites ont été recensés ce mois-ci à Londres, contre 28 sur la même période l’année dernière, d’après la police. Les actes islamophobes aussi ont bondi, passant de 65 à 174 sur la même période, signe des tensions actuelles.
D’abord « sous le choc », les Juifs britanniques restent « toujours comme anesthésiés, épuisés. Ils passent tellement de temps à contacter leurs amis et membres de leurs famille en Israël chaque jour, à surveiller les dernières informations, à s’inquiéter pour leurs enfants », poursuit M. Simonson.
Marielle A., analyste dans une banque privée âgée de 49 ans qui refuse de donner son nom de famille par mesure de sécurité, se sent aussi happée par un climat « très anxiogène ».
« Dans l’école secondaire de nos filles le directeur et des membres de l’équipe pédagogique se postent sur le trajet entre le métro et l’école » pour être sûrs que les enfants ne sont pas agressés, poursuit cette Française qui vit depuis dix-huit ans à Londres.
Plusieurs écoles juives ont fermé brièvement leurs portes dans la capitale britannique, et les synagogues ou les écoles religieuses ont fait appel à plus de volontaires pour renforcer leurs rondes de surveillance.
Dans le quartier de Stamford Hill, où se trouvent sur la même rue une dizaine de synagogues et une mosquée, le groupe de sécurité locale Shomrim (les gardiens en hébreu) a rallongé ses horaires de patrouille.
« Les gens sont plus sensibles et se sentent plus vulnérables » en ce moment, admet le rabbin Hershel Gluck, président de Shomrim, d’autant que beaucoup d’entre eux sont des descendants de victimes de la Shoah.
S’il dit craindre l’acte d’un éventuel « loup solitaire », il s’empresse d’expliquer que Juifs et musulmans cohabitent dans l’ensemble harmonieusement à Londres. « Dans cette rue, montre-t-il, il y a une dizaine de synagogues, des écoles juives, et une mosquée, un centre culturel musulman et une école musulmane. »
« La vaste majorité des musulmans de ce pays ne sont pas des sympathisants du Hamas », insiste-t-il.