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Au Paléolithique, les peintures rupestres d’enfants avaient peut-être un noble objectif

Selon une nouvelle étude de l'Université de Tel Aviv, à la Préhistoire en Europe, les enfants participaient à l'art rupestre et jouaient un rôle spirituel au sein des communautés

Une réplique des peintures rupestres de la grotte Chauvet, conservée au musée Anthropos de Brno. (Wikipédia)
Une réplique des peintures rupestres de la grotte Chauvet, conservée au musée Anthropos de Brno. (Wikipédia)

Des empreintes de pas d’un adolescent, de deux adultes et d’au moins deux enfants remontant à 14 000 ans ont été identifiées à environ 400 mètres de profondeur dans la grotte de Basura, dans le nord de l’Italie.

Dans celle de Rouffignac, en France, tout indique que c’un enfant âgé de moins de cinq ans qui a tracé un trait, sinon plus, sur une peinture représentant une antilope saïga.

Les archéologues ont trouvé des empreintes d’enfants – et même de bébés – dans une autre grotte française, à Fontanet, là où seuls les enfants pouvaient se glisser dans des espaces de moins de 130 centimètres de hauteur.

Pour tenter de découvrir ce que faisaient ces enfants dans ces anciennes grottes souterraines, une équipe de scientifiques israéliens de l’Université de Tel Aviv a émis une hypothèse surprenante : les enfants pourraient avoir joué le rôle de mini-prêtres ou, pour le dire autrement, de médiateurs spirituels.

Selon cette théorie, les enfants étaient considérés comme des « médiateurs habiles entre le monde des vivants et celui des esprits », celui précisément que l’on pouvait rencontrer dans les grottes, comme l’ont écrit la Dr Ella Assaf, le Dr Yafit Kedar et le professeur Ran Barkai de l’Université de Tel Aviv dans un article publié dans la revue Arts en début de mois.

Il y a une certaine logique derrière l’idée que les enfants jouaient alors un rôle bien plus important que leurs homologues modernes. Les experts d’aujourd’hui estiment en effet qu’au Paléolithique supérieur, près de 40 % de la population humaine était constituée d’enfants ou de jeunes adultes. Dans certaines grottes décorées, ils estiment à respectivement 9 % et 27 % la proportion de nourrissons et d’enfants présents.

« À ce jour, près de 400 grottes contenant de l’art rupestre ont été découvertes, principalement en France et en Espagne, avec des œuvres d’art remontant à 12 000 ans voire 40 000 ans », explique Assaf dans un communiqué publié lundi par l’Université de Tel Aviv.

« Il existe des preuves solides de la participation des enfants à la production de ces œuvres d’art – des empreintes de mains et des peintures au doigt réalisées par des enfants âgés de deux à 12 ans. Par ailleurs, des empreintes de pieds et de mains d’enfants ont été découvertes dans certaines grottes, à côté de celles d’adultes. Cela pose tout naturellement la question : pourquoi ces enfants étaient-ils là ? »

Peintures au doigt réalisées par des enfants dans la grotte de Rouffignac, en France, il y a de cela 14 000 à 20 000 ans. (Avec l’aimable autorisation du Dr Van Gelder)

Descendre dans ces grottes supposait bien souvent de se frayer un chemin en terrain accidenté et marcher dans l’obscurité, parfois sans beaucoup d’oxygène, en raison des torches ou ades lampes.

Les hallucinations et expériences de sortie du corps induites par l’hypoxie (le faible niveau d’oxygène dans les tissus corporels) pourraient avoir influencé la perception de ces peintres rupestres, ce qui renforçait peut-être leur lien avec le monde spirituel.

Les œuvres d’art rupestres représentent pour l’essentiel des motifs géométriques et des animaux, alors que les plantes et autres phénomènes naturels sont rares.

« L’art rupestre des premiers humains est un phénomène fascinant qui intrigue de nombreux chercheurs », confie Assaf. Son collègue Kedar ajoute : « Malgré des recherches approfondies sur l’art rupestre, très peu d’études se sont penchées sur la question de la présence des enfants. »

Petites mains et petits pieds

La plupart des chercheurs sont capables de dire si un trait est le fait d’un enfant ou d’un adulte en se fondant sur la largeur des cannelures des doigts – ces lignes laissées par des doigts humains sur les surfaces des grottes, même si cette méthode n’est pas unanimement acceptée.

« Par exemple, la largeur de l’empreinte laissée dans l’argile par les trois doigts centraux d’un individu pourrait servir de critère », ont écrit Assaf, Barkai et Kedar dans leur article. « Les empreintes d’une largeur de 30 mm ou moins se rencontrent généralement chez les enfants de moins de cinq ans, tandis que celles d’une largeur de 33 mm ou moins sont principalement observées chez les enfants âgés de sept ans ou moins. »

Kedar précise que la plupart des scientifiques pensent que la participation des enfants aux rituels qui se tenaient dans ces grottes « avait un but éducatif – celui de transmettre les connaissances, les traditions et autres coutumes à la génération suivante », explique Kedar.

La Dre Ella Assaf de l’Université de Tel Aviv. (Université de Tel Aviv)

« Dans notre étude, nous expliquons que l’implication des enfants avait une signification supplémentaire et qu’ils jouaient un rôle important et unique en son genre, à savoir communiquer directement avec les entités qui vivaient dans les profondeurs de la Terre et dans des royaumes de l’autre monde », ajoute-t-elle. Cette étude s’adosse à de précédents travaux de cette même équipe, lesquels « présentaient les œuvres d’art rupestre comme l’expression de conceptions cosmogoniques axées sur les relations entre humains et autres entités ».

Etudier les tribus d’aujourd’hui pour mieux comprendre le passé

Assaf, Barkai et Kedar ont également fondé leur hypothèse sur des pratiques de tribus indigènes contemporaines, ainsi que sur des populations dont les traditions et rituels nous sont bien connus de par les documents historiques.

« Dans les sociétés australiennes indigènes, par exemple, les enfants étaient activement impliqués dans des rituels et cycles cérémoniels : la communication avec des divinités faisait partie du passage de l’enfance à l’âge adulte », ont-ils écrit dans le communiqué.

Réplique d’une peinture de cheval provenant d’une grotte à Lascaux (CC via Wikipédia)

Les chercheurs ont, entre autres choses, étudié la danse de guérison de la transe du peuple San, une tribu de chasseurs-cueilleurs du désert du Kalahari, dans la partie sud du continent africain. Comme ont pu en attester certains anthropologues, ces dernières dizaines d’années, des garçons et filles de tous âges – même des bébés – participaient régulièrement au rituel qui durait des heures.

Les chercheurs se sont également penchés sur le rôle mystique attribué aux grottes dans de nombreuses cultures anciennes, à commencer par les cultures mayas, incas et amérindiennes.

Empreintes de pas d’enfants dans la grotte de Basura, il y a de cela 14 000 ans. (Avec l’aimable autorisation du Prof. Marco Romano – Romano et al. 2019)

« Beaucoup de ces sociétés considéraient les grottes comme des portes d’entrée vers le monde souterrain – par le biais de rituels chamaniques, elles pouvaient communiquer avec des entités cosmiques et des habitants du monde souterrain, pour résoudre des problèmes existentiels », explique Barkai dans le communiqué.

« Dans ce contexte, les jeunes enfants étaient perçus comme des êtres liminaux – appartenant à la fois au royaume qu’ils avaient quitté récemment (avant la naissance) et à celui qui était devenu le leur. Les tout petits étaient considérés comme particulièrement aptes à faire la jonction entre les mondes et faire passer des messages à des entités non humaines. »

Les enfants du Paléolithique, affirment les scientifiques, étaient essentiels aux cérémonies qui se déroulaient dans ces grottes.

« Nous pensons que les enfants accompagnaient les adultes lors de leurs incursions dans les profondeurs de la Terre, dans ces grottes, et prenaient part aux peintures et rituels conformément au rôle qui était le leur au sein de la communauté – à savoir en qualité de médiateurs idéaux avec les entités de l’au-delà », conclut Barkai.

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