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Calais, 18 mois d’une histoire mouvementée

Promis au démantèlement à partir de lundi, le camp de Calais où s'entassent sur une dizaine d'hectares entre 6 400 et 8 100 migrants, s'est formé au début de l'année 2015 dans le sillage de la crise migratoire, cristallisant le débat sur les réfugiés

Des migrants sur le site surnommé la "Nouvelle Jungle" où 3 000 personnes se sont installées ; la plupart d'entre eux cherchent désespérément à entrer au Royaume-Uni, à Calais, en France, le 19 septembre 2015. (Crédit : Philippe Huguen/AFP)
Des migrants sur le site surnommé la "Nouvelle Jungle" où 3 000 personnes se sont installées ; la plupart d'entre eux cherchent désespérément à entrer au Royaume-Uni, à Calais, en France, le 19 septembre 2015. (Crédit : Philippe Huguen/AFP)

Calais, ville d’Europe continentale la plus proche des côtes anglaises, avait déjà été au cœur des enjeux migratoires à la fin des années 1990 avec le camp de Sangatte, qui regroupait essentiellement des familles de Kosovars, fermé en 2002.

A l’été 2013, moins de 500 migrants avaient trouvé refuge dans la zone portuaire de cette ville de 75 000 habitants, dans l’espoir de rejoindre l’Angleterre, pour retrouver des proches ou dénicher plus facilement un petit boulot.

Fin 2014, ils sont un peu plus de 2 000, majoritairement des hommes célibataires venus d’Afrique, de Syrie et d’Afghanistan.

Face à cet afflux, qui suscite un malaise croissant au sein de la population, les autorités ouvrent en janvier 2015 un centre d’accueil de jour, avec distribution gratuite de repas : il s’agit de l’ex-centre aéré Jules-Ferry, situé à environ une heure à pied à l’est du cœur de ville, à proximité des dunes.

Des magasins et des cabanes dans le camp de réfugiés de Calais, le 8 février 2016. (Crédit : Jenni Frazer/Times of Israel)
Des magasins et des cabanes dans le camp de réfugiés de Calais, le 8 février 2016. (Crédit : Jenni Frazer/Times of Israel)

Parce que ce centre est parfois difficile à trouver, les migrants commencent à s’installer aux alentours, dans ce qu’ils appellent la « new Jungle », tolérée par les autorités. Les ONG dénoncent « un Sangatte sans toit », éloigné de tout, au milieu d’une lande battue par les vents. Deux « micro-jungles » du centre-ville sont également évacuées, forçant les migrants à se rendre « au camp de la lande », le terme officiel.

Début juin, des rixes éclatent entre communautés, impliquant entre 200 à 300 personnes, dans ce qui est devenu une « ville » de bric et de broc, où se créent église, mosquée, épiceries ou restaurants.

Eté chaud

Sur le terrain, la situation se tend, prélude d’un été « chaud ».

Les décès de migrants se multiplient, sur la rocade, mais aussi sur le site du tunnel sous la Manche, où certains tentent de monter sur les navettes de ferroutage. On comptera jusqu’à 2 000 intrusions par nuit sur ce site. Le ministre de l’Intérieur Bernard Cazeneuve et son homologue britannique d’alors Theresa May se rendent à Calais le 20 août. Message : « on ne passe pas ! ».

Conséquence des travaux de sécurisation, les migrants peinent à traverser illégalement et leur population double : mi-octobre, le chiffre grimpe à 6 000.

Un panneau montrant les douche gérées par les autorités françaises dans le camp de Calais. Chaque douche ne doit pas dépasser six minutes. Photographie prise le 8 février 2016. (Créidt : Jenni Frazer/Times of Israel)
Un panneau montrant les douche gérées par les autorités françaises dans le camp de Calais. Chaque douche ne doit pas dépasser six minutes. Photographie prise le 8 février 2016. (Créidt : Jenni Frazer/Times of Israel)

Fin octobre, la maire de Calais Natacha Bouchart réclame en vain l’intervention de l’armée. La justice administrative, saisie par des associations, somme, elle, l’Etat de réaliser divers aménagements sanitaires. Soucieuse de « désengorger » Calais, la préfecture procède aux premiers départs de migrants en car vers des Centres d’accueil et d’orientation.

En novembre, la chronique calaisienne est marquée par de violents heurts entre migrants et policiers, les autorités dénonçant l’activisme des militants d’ultra gauche No Border. Pour calmer la situation sur le terrain, les autorités décident d’offrir de meilleures conditions d’hébergement avec un Centre d’accueil provisoire (CAP) constitué de containers, accueillant 1 500 personnes.

Mineurs isolés

Parallèlement, elles décident de démanteler, fin février 2016, la zone sud du camp. L’opération, marquée notamment par une action de protestation d’Iraniens, bouches cousues, durera deux semaines.

Jude Law lit une lettre ouverte de Lion Feuchtwanger adressée aux nazis pendant une représentation intitulée « Les lettres vivent », où des lettres considérées comme pertinentes pour la situation critique des réfugiés ont été lues, dans le camp de réfugiés de Calais, le 21 février 2016. (Crédit : capture d'écran YouTube/Help Refugees)
Jude Law lit une lettre ouverte de Lion Feuchtwanger adressée aux nazis pendant une représentation intitulée « Les lettres vivent », où des lettres considérées comme pertinentes pour la situation critique des réfugiés ont été lues, dans le camp de réfugiés de Calais, le 21 février 2016. (Crédit : capture d’écran YouTube/Help Refugees)

Lassés de voir leur ville faire les gros titres de l’actualité, 500 Calaisiens défilent début mars à Paris. Dans ce dossier politisé, Calais attire les extrémismes et la police enquête sur de mystérieuses agressions nocturnes de migrants. Des artistes – Jude Law, Jordi Savall, Banksy – se rendent eux à Calais en soutien des réfugiés.

Durant le printemps, le thermomètre grimpe encore avec l’apparition de barrages de troncs d’arbre pour bloquer des camions à destination de l’Angleterre.

A la rentrée, les événements s’accélèrent : routiers, agriculteurs et commerçants mènent une opération escargot sur l’autoroute passant à Calais et un mur « anti intrusion » est construit le long de la rocade. Puis le 26 septembre, le président François Hollande annonce sur place le démantèlement « avant la fin de l’année », auquel la justice donne son feu vert le 18 octobre.

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