« Ce n’est pas une réforme, c’est un pogrom, » fustige Yehuda Weinstein
L'ancien procureur général, qui a servi sous Netanyahu pendant six ans, dit qu'il s'oppose à toutes les parties du projet de refonte du système judiciaire
Jeremy Sharon est le correspondant du Times of Israel chargé des affaires juridiques et des implantations.
Yehuda Weinstein, qui a occupé le poste de procureur général au cours de deux gouvernements dirigés par le Premier ministre Benjamin Netanyahu, a dénoncé mardi le plan de la coalition visant à remanier radicalement le système juridique et judiciaire comme étant « un pogrom » et a déclaré qu’il s’opposait à tous ses aspects.
S’exprimant lors d’une conférence à l’université de Tel Aviv, Weinstein a déclaré qu’il pouvait accepter les réformes du système judiciaire et législatif, mais a affirmé que les propositions présentées par le ministre de la Justice Yariv Levin étaient avancées trop hâtivement et sans réflexion.
Ses commentaires interviennent alors que les tensions entre le gouvernement et le pouvoir judiciaire continuent de croître au sujet du bouleversement proposé par le gouvernement, qui a été dénoncé par l’opposition et l’establishment juridique comme représentant un grave danger pour les droits démocratiques, mais salué par la coalition comme un outil permettant de garantir le respect de la volonté de la majorité.
Dans ce contexte, Levin et la présidente de la Cour suprême Esther Hayut se sont rencontrés mardi, après les récriminations qu’ils ont échangées la semaine dernière suite à la condamnation du remaniement par Hayut. Aucun détail n’a été communiqué à l’issue de cette rencontre.
Selon un reportage de Walla, le président Isaac Herzog a tenté de jouer les médiateurs entre Levin et Hayut, et les a rencontrés séparément en début de semaine. Il est prévu que Levin et Hayut se rencontrent à nouveau la semaine prochaine.
S’exprimant lors de la conférence de l’université de Tel Aviv, Weinstein n’a pas ménagé ses critiques à l’égard des propositions de Levin.
« Ils essaient de changer le système juridique tel que nous le connaissons, et tout est fait rapidement et sans considération. Je suis opposé à tout ce qu’il contient », a déclaré Weinstein, qui a été procureur général sous Netanyahu de 2010 à 2016.
Les réformes de Levin limiteraient considérablement le pouvoir de la Haute Cour de justice en matière de contrôle judiciaire de la législation, permettraient à la Knesset de légiférer à nouveau si la Cour les abroge, donneraient au gouvernement un contrôle total sur les nominations judiciaires, feraient des conseillers juridiques du ministère des personnes nommées à des postes politiques et rendraient leurs conseils non contraignants.
L’ancien procureur général a déclaré qu’il était particulièrement opposé à la modification de la composition de la commission de sélection des juges, du système actuel dans lequel le gouvernement et la Haute Cour ont un nombre égal de représentants à un système dans lequel le gouvernement et ses représentants nommés sont majoritaires.
« Je m’oppose aux changements dans la nomination des juges, je ne connais pas de meilleur système que celui-ci », a-t-il déclaré.
Weinstein a ajouté qu’il était également opposé à la proposition de Levin de nommer le président de la Cour suprême par un vote de la commission de sélection des juges plutôt qu’en fonction de l’ancienneté des juges de la Cour, et a déclaré que les conseillers juridiques du gouvernement « ne peuvent pas être des personnes nommées pour des raisons politiques. »
Il a également déclaré qu’il était opposé à l’abolition de l’utilisation par la Haute Cour de la règle de « raisonnabilité », que la Cour a utilisée pour invalider certaines décisions gouvernementales et administratives au motif que toutes les considérations pertinentes n’ont pas été prises en compte ou n’ont pas reçu le poids approprié lorsque la décision a été prise.
Le principe de « raisonnabilité » existe depuis le tout début, il nous vient de la Common Law anglaise, pas de [l’ancien président de la Cour suprême] Aharon Barak, et je ne propose pas qu’il soit modifié », a déclaré Weinstein.
Il a toutefois déclaré que certaines réformes pourraient être acceptables, notamment l’obligation pour la Haute Cour d’annuler des lois avec un panel élargi et une majorité spécifique.
Weinstein a même déclaré qu’il pourrait accepter une loi permettant à la Knesset de légiférer à nouveau sur des lois invalidées par la Haute Cour, ce qui est peut-être l’aspect le plus controversé des propositions de M. Levin, avec une majorité de 64 députés, à condition qu’elle comprenne un certain pourcentage de députés de l’opposition.
Levin propose actuellement une telle loi avec le vote de seulement 61 députés.