Ce qu’il faut savoir sur Dean Phillips, membre juif du Congrès américain et candidat à la présidence
Cet insaisissable Démocrate du Minnesota qui est l'ami d'lhan Omar et un fervent soutien d'Israël, fait l'éloge de Joe Biden, son concurrent pour les Primaires
JTA — Dean Phillips est candidat à la présidence. Et il s’exprime. Le dialogue est dans l’ADN de la famille de ce membre juif du Congrès du Minnesota – sa grand-mère est la célèbre journaliste radio Pauline Phillips. Et il est ami avec Ilhan Omar, malgré leurs points de vue diamétralement opposés sur plusieurs questions, à commencer par Israël, mais ils aiment dialoguer.
Aujourd’hui, Phillips, qui a 54 ans, compte bien sur ce penchant pour le dialogue pour le servir dans sa dernière entreprise en date, à savoir l’emporter sur Joe Biden lors de la primaire présidentielle démocrate.
« Notre principal problème, en ce moment, ce n’est pas l’idéologie, ce ne sont pas des problèmes concrets, c’est le dialogue, le manque de dialogue », affirmait le Démocrate du Minnesota dans des publicités pour sa première campagne pour le Congrès en 2018, et qu’il a repris pour sa campagne présidentielle. « Et mon intention, tout au long de cette campagne, c’est d’amener les gens à se parler. »
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Phillips ne se distingue que très peu de Biden sur le plan de la politique, mais n’a pas recueilli de soutien significatif de la part d’autres élus et ne ressort pas vraiment dans les sondages. Pour autant, à l’approche des primaires, il refuse d’abandonner.
Voici six choses à savoir sur Phillips, candidat inattendu qui aimerait être le premier président juif des États-Unis.
Il centré sa campagne sur l’impopularité de Biden.
Les chances de Phillips se résument à une chose : l’impopularité de Biden. Il dit apprécier le président et ce qu’il fait, mais que les sondages montrent que les Démocrates ont besoin d’un autre candidat l’an prochain.
Selon Gallup, les avis positifs sur Biden sont de 37 %, inférieurs à 50 % depuis deux ans. Les sondages électoraux le donnent au coude à coude avec l’ex-président Donald Trump, quand ils ne donnent pas Trump en tête dans plusieurs États pivots.
« Les chiffres sont effroyables », déclarait Phillips à CBS dans une interview en octobre dernier. « J’aime Joe Biden, je veux le dire clairement, c’est un homme remarquable. Je pense qu’il a sauvé notre pays… Mais ce n’est pas ce que disent les chiffres aujourd’hui. Il y a une majorité épuisée en Amérique qui ne veut aucun de ces deux candidats. »
Le programme de Phillips reflète plus ou moins celui de Biden : stimuler la croissance des petites entreprises, favoriser les réformes de la police tout en faisant l’éloge de ceux qui portent l’uniforme et font bien leur travail, promouvoir le contrôle des armes à feu et la lutte contre le changement climatique.
Il s’est écarté de Biden en décembre sur la question des soins de santé, en approuvant Medicare for All, politique promue ces dernières années par le sénateur Bernie Sanders pour garantir des soins de santé gérés par le gouvernement à tous les Américains. Alors qu’il a, par le passé, fait campagne pour l’accroissement de la couverture santé, Biden n’a pas approuvé Medicare for All.
Le problème de Phillips, c’est que presque personne ne veut l’écouter.
Lorsque les sondeurs ont commencé à faire attention à Phillips, les sondages le créditaient de moins de 5 % des voix contre Biden, ce qui le plaçait derrière Marianne Williamson, l’auteure juive de développement personnel. Le président est en tête des sondages avec plus de 60 points d’avance.
Les sondages ne sont pas le seul problème de Phillips : sa campagne a recueilli moins d’un million de dollars. Le Parti démocrate a annulé les primaires dans des États clés, comme la Caroline du Nord ou la Floride. Et les collègues qui appréciaient sa compagnie l’évitent désormais, a rapporté Axios cette semaine.
Phillips, qui a été élu à un important poste de direction de son parti il y a tout juste un an, est persona non grata auprès de certains Démocrates de la Chambre des Représentants, dont certains n’hésitent pas à le discréditer publiquement.
« Dean Phillips ne gagnera pas les primaires », a déclaré le Représentant du Maryland Steny Hoyer, ancien chef de la majorité. « Je pense qu’il n’aide pas le pays. »
Mais Phillips ne renonce pas pour autant, déclarant à Axios que son parti devrait avoir « une démocratie de concurrence et non de couronnement ».
Il a été l’un des premiers membres juifs du Congrès à appeler à un cessez-le-feu entre Israël et le Hamas.
Le 17 novembre, il a publié une déclaration qui, à première vue, semblait en ligne avec l’administration Biden à l’égard d’Israël. Il a qualifié de « méprisable » le massacre de 1 200 personnes par le Hamas le 7 octobre – et l’enlèvement de 240 otages dans la bande de Gaza », a déploré « la tragédie humaine qui en a résulté à Gaza » et déclaré qu’« Israël avait tous les droits de chercher à tuer les terroristes du Hamas et démanteler tout ce qui avait pour but de détruire l’État d’Israël ».
Mais le communiqué ajoutait : « Cette riposte a un impact inacceptable sur les civils palestiniens », appelant à un « cessez-le-feu immédiat et mutuel, pour mettre un terme aux combats et au terrorisme aveugle », à respecter par les deux parties.
La déclaration – qui contenait plusieurs autres dispositions, notamment l’appel à la libération des otages, à de nouvelles élections israéliennes et à la mise en place d’une force multinationale à Gaza – a fait de Phillips l’un des premiers membres juifs du Congrès à appeler à un cessez-le-feu.
Le 11 décembre, il demandait à la fois au Hamas et à Netanyahu de renoncer au pouvoir, en faisant allusion à sa propre candidature à la présidence.
« Le Hamas est un danger clair et actuel pour Israël, les Palestiniens et la paix, et doit être détruit », a-t-il écrit. « Netanyahu est un danger clair et actuel pour Israël, les Palestiniens et la paix, et doit être remplacé démocratiquement. La Terre a besoin d’une nouvelle génération de dirigeants pour se sauver elle-même. »
Il s’est également fait l’écho du sentiment d’isolement ressenti par de nombreux Juifs face au regain de l’antisémitisme depuis le début de la guerre entre Israël et le Hamas.
« Être un membre juif du Congrès dans le caucus démocrate est très difficile en ce moment, vous pouvez l’imaginer », a-t-il déclaré à Bill Maher en novembre. « Et on manque manifestement d’amour progressiste quand il s’agit de nous. Ce qui est problématique. »
Sa grand-mère, qui était célèbre, a déclaré qu’il serait Démocrate.
Lorsque Phillips est né en 1969, son père, Artie Pfefer, était au Vietnam où il a trouvé la mort six mois plus tard, sans jamais voir son fils. À l’âge adulte, Phillips a appris que ses parents avaient été en contact pendant cette guerre grâce à des cassettes audio. Sur une de ces cassettes, Pfefer disait : « Je t’aime vraiment beaucoup, toi et le petit bébé Dean. Je commence à me faire une idée de ce à quoi il ressemble en ce moment, avec les photos. J’imagine sa voix, tout ça. J’aimerais vraiment lui donner un gros, gros baiser. »
Quand il a eu 3 ans, sa mère DeeDee s’est remariée et Eddie Phillips, qui était également juif, l’a adopté. La mère d’Eddie était Pauline Phillips, plus connue sous son nom de chroniqueuse, Dear Abby.
Phillips aime raconter que lorsqu’il avait une dizaine d’années et qu’il suivait la campagne présidentielle de 1980, le candidat indépendant John Anderson a fait une halte dans son école.
« Nous étions en train de dîner en famille : ma grand-mère m’a demandé comment allait se passer la journée et dit : ‘Avant de continuer, tu es Démocrate ou Républicain ?’ Je n’en savais rien. Et elle m’a dit : ‘Tu es Démocrate.’ C’est elle qui a fait de moi un Démocrate quand j’avais 11 ans », a-t-il confié à Roll Call l’an dernier.
« Neuf ans plus tard, je dînais à nouveau avec elle, et elle voulait savoir ce que j’allais faire cet été-là. J’étais en première année à l’université ». « Elle connaissait un peu le sénateur démocrate du Vermont Patrick Leahy et m’a dit que je devrais demander un stage au Capitole. C’est ce que j’ai fait, et cela a été le plus bel été de ma vie jusqu’à ce que j’entre moi-même au Congrès en 2019. »
Son identité juive tourne autour de la philanthropie, et sa carrière d’homme d’affaires est centrée sur la glace et le café.
Phillips aime dire que son arrière-grand-père né à Minsk, Jay Phillips, est son modèle : il a souffert d’antisémitisme et de la pauvreté dans son enfance dans le Minnesota, mais il économisait les centimes gagnés en livrant des journaux pour donner du pain aux sans-abri.
Jay Phillips a fondé un empire de distillerie (en lançant, entre autres, le premier schnaps fabriqué aux États-Unis) et contribué à la création de l’hôpital Mt. Sinai à Minneapolis, entre autres activités philanthropiques.
Dean Phillips a dirigé la distillerie pendant un certain temps, mais c’est l’activité caritative de son arrière-grand-père qui lui plait surtout. Il a donc coprésidé la Fondation de la famille Phillips.
« Notre entreprise familiale, c’est avant tout cette fondation, et la philanthropie est un fil tissé entre les générations », a-t-il déclaré à TC Jewfolk, un média juif local. « Ma judéité commence par cela, et la philanthropie a commencé avec cette identité juive et l’histoire de Jay, qui partageait ce qu’il avait. »
Il quitte la distillerie en 2012 pour diriger Talenti Gelato, qu’il revend en 2014 à Unilever. Il ouvre ensuite deux cafés – nommés Penny’s – dans le secteur de Minneapolis.
« Nous pensions que le fait de proposer des crêpes et du café nous attirerait la même clientèle qui cherche des glaces, une version améliorée d’un produit que les gens apprécient lorsqu’ils vont en Europe mais qui n’était pas vraiment disponible aux États-Unis », a-t-il déclaré à Forbes. « Je voulais surtout en faire un lieu d’évasion, où on pourrait trouver du café et des crêpes. »
Cette entreprise n’a pas été couronnée de succès : les cafés ont fermé leurs portes en 2022.
C’est dans une synagogue qu’il a fait ses premiers pas en politique.
Phillips siégeait au conseil d’administration de Temple Israël, la plus ancienne synagogue de Minneapolis, ce qui, a-t-il déclaré à TC Jewfolk, a été sa toute « première incursion dans les questions de gouvernance ». Pour intimidant que cela ait pu être, ce fut une expérience utile.
« Cela fut très instructif : lorsque des gens avec une grande passion et des perspectives différentes regardent tous dans la même direction mais avec des moyens différents – c’est un peu la même chose au Congrès -, cela demande de la patience, de l’écoute, le sens du dialogue et la volonté de participer », a-t-il déclaré.
Il croit qu’il faut parler avant de condamner.
Le district voisin de Phillips est représenté par Ilhan Omar, la députée musulmane américano-somalienne critiquée pour ses propos que de nombreux critiques juifs qualifient d’antisémites.
Ils sont aux antipodes du spectre démocrate : il a été l’un des principaux membres du Problem Solvers Caucus, qui rassemble Républicains et Démocrates intéressés par le compromis bipartite. Elle est membre de l’aide d’extrême gauche. Il est ouvertement pro-Israël ; c’est une critique féroce d’Israël. Il soutient les lois favorables aux entreprises ; elle est alliée aux Socialistes démocrates d’Amérique.
Phillips ne mâche pas ses mots pour critiquer Omar : il a été l’un des quatre Démocrates juifs qui, en 2021, l’ont accusée, ainsi que d’autres membres de l’extrême-gauche, de faire le lit de l’antisémitisme en utilisant des mots comme « apartheid » ou « terroriste » pour décrire le gouvernement d’Israël.
Mais, selon un long portrait de 2019 de leur relation improbable pour le magazine Politico, il considère également Omar comme une amie. Après une de ses déclarations, peut-être la plus notoire, disant que le soutien du Congrès à Israël était « une question de Benjamin », il l’a contactée pour lui parler avant de publier sa propre déclaration, même si cela en a retardé la diffusion, au grand dam de ses collègues démocrates juifs.
« Je voudrais que davantage de gens se comportent ainsi – dans le partage, le face à face », déclarait Phillips à Politico. « Vous voyez, plus de dialogue, moins de tweets. C’est le tweet qui nous cause des ennuis. »
Dans un discours enflammé, en février, il a défendu son amie lorsque les Républicains l’ont évincée de la commission des Affaires étrangères, affirmant qu’ils « croyaient tous deux dans les vertus du débat, de la réflexion et de la réconciliation ».
Sous les huées et les acclamations mêlés des membres d’extrême-gauche, assis derrière lui pendant son discours, il s’en est pris aux Républicains d’extrême droite qui « promeuvent l’insurrection ».
Le même jour, Omar se joignait à Phillips pour co-parrainer une résolution pro-Israël « reconnaissant en Israël l’allié légitime et démocratique de l’Amérique ».
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