Rechercher

Cette année, le récit de notre Exode était une violente représentation du réel

"Nous sommes esclaves, mais l'an prochain, nous serons libres" est habituellement lu en pensant que notre réalité sans contrainte avait supplanté le texte – pas cette année

David est le fondateur et le rédacteur en chef du Times of Israel. Il était auparavant rédacteur en chef du Jerusalem Post et du Jerusalem Report. Il est l’auteur de « Un peu trop près de Dieu : les frissons et la panique d’une vie en Israël » (2000) et « Nature morte avec les poseurs de bombes : Israël à l’ère du terrorisme » (2004).

La septième plaie : John Martin, 1823, inspiré de l'Ancien Testament "plaie de grêle et de feu", Exode 9:13-35. (Domaine public)
La septième plaie : John Martin, 1823, inspiré de l'Ancien Testament "plaie de grêle et de feu", Exode 9:13-35. (Domaine public)

Peut-être y avait-il un dangereux sentiment d’autosatisfaction à lire la Haggadah ces dernières années.

Nous chantions « l’an prochain à Jérusalem », alors que c’est précisément là où beaucoup d’entre nous étions déjà, au sens propre comme au figuré, en maîtres plein d’assurance de notre propre destin dans notre foyer refondé.

Nous déclarions solennellement « cette année, nous sommes esclaves, mais l’an prochain, nous serons libres », tandis qu’une partie d’entre nous pouvions penser, de manière arrogante, que notre réalité sans contrainte avait supplanté le texte.

Ce n’est pas le cas cette année.

Cette année, l’injonction de raconter à nouveau la saga de notre Exode de l’esclavage – « le mythe fondateur des Israélites » – était une représentation violente du réel.

Limités à notre cercle familial proche, confinés dans nos maisons, nous avons prié pour que l’ange invisible de la mort épargne nos proches, nos seniors et nos personnes vulnérables. Nous avons prié pour que nos maisons soient épargnées. Temporairement privés de nos libertés habituelles, nous avons intégré encore plus profondément ce que signifie être libre.

La police à un point de contrôle temporaire sur la route 1, à la sortie de Jérusalem, le 8 avril 2020, alors qu’un couvre-feu entrait en vigueur la veille de Pessah afin de limiter la propagation du coronavirus. (Crédit : Jonatan Sindel/Flash90)

Même maintenant, quelques semaines après le début de cette nouvelle apparition d’une forme moderne des anciennes plaies, nous ne parvenons toujours pas à mesurer l’ampleur du danger. Ces statistiques et graphiques qui obsèdent beaucoup d’entre nous semblent encore laisser une très grande marge aux interprétations – les courbes et les histogrammes semblent à la fois indiquer un fléau passant progressivement sous contrôle et un nombre de victimes qui augmente horriblement vers l’infini.

Quand tout cela sera fini, viendrons-nous à considérer notre réponse comme une exagération hystérique ? À reléguer la pandémie au statut de trouble passager, qui a coûté la vie à des êtres chers mais que l’on n’aurait pas dû autoriser à piéter si fortement sur notre mode de vie général ? À oublier promptement les confinements d’un haussement d’épaule ? À pleurer les conséquences économiques, sociales et psychologiques comme ayant été inutiles et absurdes ? À fustiger nos dirigeants pour avoir si mal géré la situation ?

Ou l’empressement récent à commencer à penser aux « stratégies de sortie » apparaîtra-t-il comme un autre hubris supplémentaire – une arrogance face au désastre qui bouleversera encore longtemps la manière dont nous travaillons, étudions, voyageons, socialisons, la manière dont nous vivons nos existences ?

Des fidèles juifs prient au mur Occidental presque désert dans la Vieille Ville de Jérusalem, le 7 avril 2020. (Crédit : Nati Shohat/Flash90)

Dans une période aussi incertaine, le seder de cette année semblait mystérieusement évocateur. Saisissant le sens profond de la liberté, ces vers familiers nous ont conféré une force exceptionnelle. Essayons d’éviter la suffisance et l’arrogance. Débattons, discutons, pensons à l’avenir.

Et plus spécifiquement, comme le philosophe Moshe Halbertal nous l’a demandé de manière si éloquente, évitons la tentation de tomber dans le piège d’une forme de fatalisme impuissant devant des événements aussi bouleversants ; libérons-nous de la supposition absurde que ce qui s’est produit hier se produira demain ; intégrons notre vulnérabilité humaine ; et préparons-nous à faire face plus efficacement aux défis de l’existence en développant la communication et la confiance, et en ayant recours de manière plus sage et plus juste à nos ressources limitées – en tant qu’individus et en tant que sociétés.

L’autoroute Ayalon déserte à Tel Aviv, le 8 avril 2020, alors qu’un couvre-feu entrait en vigueur la veille de Pessah afin de limiter la propagation du coronavirus. (Crédit : Miriam Alster/Flash90)

« Cette année, nous sommes esclaves, mais l’an prochain, nous serons libres », avons-nous déclaré ce Pessah, comme nous le faisons chaque année. Mais si nous l’avons dit avec une humilité rare pour une nuit si différente, le seder nous aura aussi été utile.

En savoir plus sur :
S'inscrire ou se connecter
Veuillez utiliser le format suivant : [email protected]
Se connecter avec
En vous inscrivant, vous acceptez les conditions d'utilisation
S'inscrire pour continuer
Se connecter avec
Se connecter pour continuer
S'inscrire ou se connecter
Se connecter avec
check your email
Consultez vos mails
Nous vous avons envoyé un email à [email protected].
Il contient un lien qui vous permettra de vous connecter.