Dans l’Aude et face au RN, le « parachutage » de Philippe Poutou passe mal
Le soutien du syndicaliste au Hamas lui a valu une enquête pour apologie du terrorisme sans pour autant l’empêcher de concourir sous les couleurs du Nouveau Front populaire
Lui non plus ne « voulait pas débarquer comme ça » mais même parachuté, Philippe Poutou, figure du NPA investie par le Nouveau Front Populaire (NFP) dans l’Aude, entend mener le combat contre le député Rassemblement national (RN) sortant, au grand dam d’une partie de la gauche locale.
Entre deux tracts distribués devant l’hôpital de Carcassonne, le triple candidat à la présidentielle concède qu’il « ne connaît pas la région » et qu’il aurait « préféré être candidat sur Bordeaux » où il est conseiller municipal, mais il se dit déterminé à « militer et empêcher l’extrême droite de passer ».
Le candidat NPA affirme vouloir ainsi « prendre part au mouvement initié par la gauche », tout en confiant « rester lucide ».
« Ce serait un exploit si en deux semaines on arrivait à renverser la tendance ici, où l’extrême droite est installée », reconnaît l’ouvrier et syndicaliste.
Dans l’Aude, le RN a conquis en 2022 les trois postes de députés. Dans cette première circonscription centrée autour de Carcassonne, où Poutou se présente, le siège est occupé par l’ancien viticulteur Christophe Barthès qui l’avait remporté il y a deux ans avec 53,22 % des voix face à une candidate de la Nupes.
« Poubelle »
Le 30 juin, la gauche locale sera loin d’être unie, le « parachutage » du candidat NPA étant dénoncé par une partie de ses élus, notamment socialistes (PS), réunis autour de la candidature d’Aurélien Turchetto, maire de la petite commune rurale de Villesèquelande, déjà candidat en 2022 pour le Parti Radical de Gauche.
Le jeune maire ne décolère pas face à l’arrivée de Poutou, « cette personne venue de Bordeaux et envoyée par Paris ».
« Il y a une seule candidature NPA en France, elle se retrouve dans le département de l’Aude. C’est un dénigrement pour notre département. On ne doit pas être la poubelle de Paris ! », tacle-t-il.
Se présentant comme le candidat « du courage » et « du territoire », l’élu local a été adoubé par la présidente socialiste de la région Carole Delga qui, dans les deux autres circonscriptions audoises, soutient les candidatures NFP mais là, a dénoncé le « choix irresponsable et perdant » de Poutou.
Très longtemps député PS de la circonscription, l’ex-maire de Carcassonne Jean-Claude Pérez n’a pas non plus compris la décision. « Avoir quelqu’un qui ne connaît pas le département, qui ne connaît pas la circonscription, les bras m’en sont tombés », dit-il, en déambulant dans la ville qu’il a dirigée de 2009 à 2014.
Pour le prochain scrutin, il est de nouveau candidat, mais cette fois pour la majorité présidentielle.
« Ca m’arrange »
Côté RN, on observe la situation née de l’arrivée de Poutou avec le sourire : « Moi honnêtement, ça m’arrange quelque part ! », confie Christophe Barthès qui se dit « plutôt confiant », d’autant qu’aucun candidat LR ne se présente dans la circonscription.
Pour autant, même si elle l’arrange, la présence du candidat NPA sur les terres audoises choque le député sortant.
« Ça m’horripile que ce mec soit là ! », lâche-t-il devant la mairie de Trèbes où se trouve une stèle d’hommage à Arnaud Beltrame, l’officier de gendarmerie tué dans l’attentat terroriste du 23 mars 2018, au Super U de la ville.
« C’est une provocation […] Il n’a pas dénoncé le 7 octobre le massacre des Juifs. Il prône le terrorisme islamiste […] On marche sur la tête ! », insiste le candidat RN qui conclut : « Les Audois ne veulent pas de cet homme. »
Alors que les combats directs entre l’armée israélienne et les terroristes du Hamas faisaient encore rage dans les localités prises d’assaut dans le sud du pays, le NPA avait publié un communiqué pour rappeler son soutien « aux Palestinien/nes et aux moyens de luttes qu’ils et elles ont choisi pour résister ». Le texte se concluait par ce cri de ralliement : « Aujourd’hui comme hier, nous sommes toutes et tous Palestien/nes. Intifada [soulèvement, en arabe] ! »
Cette déclaration a conduit la justice française à ouvrir une enquête pour apologie du terrorisme. Poutou, dirigeant du NPA, avait ensuite reconnu que le texte avait « sous-estimé » l’ampleur de la « tuerie », mais a continué à refuser de parler de « groupe terroriste » pour désigner le Hamas, et n’a, à ce jour, toujours pas supprimé son communiqué.
Dans la presse locale, Poutou a estimé que l’extrême droite instrumentalise « la situation en Palestine » et a tenu à préciser que le NPA dénonçait « les tueries de civils menées par le [groupe terroriste palestinien du] Hamas », déplorant « toutes les victimes civiles israéliennes ou palestiniennes ».
Pour le scrutin à venir, Christophe Barthès sent en tout cas qu’il y « un engouement » autour du RN. Et s’il se montre optimiste localement, il espère « surtout que Jordan Bardella ait la majorité absolue ».
- Israël et Ses Voisins
- Opération Épées de fer
- Apologie du terrorisme
- Banalisation du terrorisme
- Anti-sionisme
- Antisémitisme
- Anti-Israël
- Propagande anti-Israël
- La France Insoumise (LFI)
- France
- Parti socialiste (PS)
- Nupes
- Extrême-gauche
- Rassemblement national (RN ex-Front National)
- Banalisation de l'antisémitisme
- Élections législatives françaises 2024
- NPA