Des dizaines d’anciens chefs de la sécurité tiennent Netanyahu pour responsable
D'anciens chefs de l'armée, du Mossad et du Shin Bet soutiennent les réservistes et déclarent que la refonte "brise le fondement commun de la société israélienne"

Des dizaines d’anciens hauts responsables de la sécurité – y compris d’anciens chefs de Tsahal, de l’agence de renseignement du Mossad et de l’agence de sécurité intérieure du Shin Bet – ont envoyé samedi une lettre au Premier ministre Benjamin Netanyahu lui demandant d’interrompre la législation sur la refonte du système judiciaire afin de permettre la reprise des négociations, tout en exprimant leur soutien aux réservistes qui ont menacé de cesser de se porter volontaires en signe de protestation.
Ils ont publié cette déclaration alors que la Knesset s’apprête à entamer le vote final dimanche pour adopter le texte qui mettrait fin au contrôle judiciaire du « caractère raisonnable » des décisions des hauts responsables politiques.
Dans la lettre, les chefs de la sécurité ont déclaré qu’ils tenaient Netanyahu « directement responsable du grave préjudice » causé à la sécurité d’Israël, tout en l’accusant d’avoir « complètement ignoré le préjudice causé à la démocratie israélienne ».
« La législation fait voler en éclats le fondement commun de la société israélienne, déchire le peuple, démantèle Tsahal et porte gravement atteinte à la sécurité d’Israël », ont-ils déclaré.
« Le processus législatif viole le contrat social qui existe depuis 75 ans entre des milliers de commandants de réserve et de soldats », ont-ils écrit, tout en qualifiant les menaces des réservistes « d’acte de responsabilité nationale pour la défense de la démocratie israélienne ».
« Nous attendons de vous que vous preniez vos responsabilités », ont-ils ajouté. « Arrêtez la législation et entamez un processus de discussions avec des changements qui ne seront apportés qu’après un large consensus au sein du peuple et de la Knesset. »

Comparant le climat actuel à « la veille de la guerre de Yom Kippour », un événement hautement traumatisant pour Israël, les signataires ont déclaré qu’ils « brandissaient un carton rouge vif devant vous et votre gouvernement. »
Parmi les signataires figurent les anciens chefs de Tsahal Ehud Barak, Moshe Yaalon et Dan Halutz, les commandants du Mossad Nahum Admoni, Efraïm Halevy, Shabtaï Shavit, Danny Yatom et Tamir Pardo, les commandants du Shin Bet Carmi Gillon, Yuval Diskin et Nadav Argaman, ainsi que plusieurs anciens chefs de la police, responsables de l’administration pénitentiaire, et anciens généraux de l’armée.
Répondant apparemment à la lettre, un haut fonctionnaire anonyme de la coalition a déclaré à plusieurs médias israéliens que « le plus grand préjudice pour la sécurité et la démocratie d’Israël serait la subordination du gouvernement et de la Knesset aux diktats des unités militaires ».
Le fonctionnaire a affirmé que « les efforts pour parvenir à un accord sur la législation se poursuivront jusqu’au dernier moment. En l’absence d’un accord, la loi sera adoptée comme prévu ».
Vendredi, 1 142 réservistes de l’armée de l’air israélienne, dont plus de 400 pilotes, ont publié une lettre annonçant qu’ils suspendaient leur service de réserve volontaire en signe de protestation contre la refonte judiciaire. Des centaines de réservistes d’autres branches de l’armée ont également déclaré qu’ils ne se porteraient plus volontaires.
« Nous avons tous la responsabilité de mettre fin à la division (…) et aux clivages profonds au sein de la population », ont-ils affirmé dans une déclaration dont les signataires comprennent notamment 235 pilotes de chasse, 173 opérateurs de drones et 85 soldats commandos.

Pendant ce temps, des dizaines de milliers de manifestants se sont joints à une marche de masse vers la Knesset à Jérusalem samedi, dans le cadre d’un ultime effort pour stopper le projet législatif. La marche a débuté mardi à Tel Aviv avec seulement une poignée de personnes, et a grossi de jour en jour pour devenir l’un des événements les plus historiques du mouvement de protestation contre la refonte qui dure depuis sept mois.
Si les manifestants ne bloquaient pas délibérément la circulation, leur grand nombre a entraîné d’inévitables perturbations.
Les organisateurs prévoient ensuite d’installer des tentes dans le parc Sacher, près de la Knesset, et d’y rester pour une durée indéterminée, alors que la coalition s’apprête à faire passer dans la loi une interdiction pour les tribunaux d’annuler les décisions gouvernementales et ministérielles sur la base de leur « caractère raisonnable ».
Parallèlement à la grande manifestation organisée devant la Knesset samedi soir, les opposants à la législation devraient se rassembler devant la résidence du Premier ministre Benjamin Netanyahu à Jérusalem, ainsi que rue Kaplan à Tel Aviv, comme chaque week-end.
Des centaines de milliers de personnes devraient se rassembler dans plus de 150 lieux à travers le pays, à l’occasion de la 29e semaine de manifestations contre le paquet de réformes controversé proposé par le gouvernement radical de Netanyahu.