Enfin invité aux Jeux Invictus, Israël envoie une délégation à Düsseldorf
Ces ex-soldats blessés, novices en compétition internationale, se disent fiers de représenter leur pays en natation, cyclisme, tennis de table, tir à l'arc et aviron en salle
C’est la toute première fois que d’ex-soldats israéliens handicapés, blessés au combat, prennent part aux Jeux Invictus, qui ont commencé samedi soir à Düsseldorf, en Allemagne.
Cette compétition athlétique, organisée chaque année ou tous les deux ans depuis 2014, s’adresse aux soldats blessés du monde entier et promeut le sport comme premier moyen de rééducation physique et mentale. Certains ont des « blessures invisibles », comme le TSPT, ce qui ne les empêche pas de participer.
Israël a envoyé 20 concurrents âgés de 24 à 68 ans accompagnés de quatre entraîneurs et membres du personnel de l’Organisation des anciens combattants handicapés de Tsahal (ZDVO). L’équipe, qui compte trois femmes dans ses rangs, participera aux compétitions de natation, cyclisme, tir à l’arc, tennis de table et aviron en salle.
Fondés il y a dix ans par le prince Harry, duc de Sussex, lui-même vétéran de l’armée britannique, les Jeux sont gérés par la Fondation des Jeux Invictus. Les tout premiers du genre ont eu lieu à Londres en 2014, et d’autres ont suivi à Orlando, Toronto, Sydney et La Haye. Après Düsseldorf, ils se tiendront à Whistler, au Canada, en 2025.
Cette année, 21 pays prennent part aux Jeux dans 10 disciplines, parmi lesquelles l’athlétisme terrain, la dynamophilie, le volleyball assis, le basketball en fauteuil roulant et le rugby en fauteuil roulant.
« Initialement, les jeux étaient réservés aux pays qui avaient combattu aux côtés du Royaume-Uni en Irak et en Afghanistan, mais d’autres pays ont été invités à s’y joindre. Nous voulions depuis longtemps faire partie de ces Jeux car Israël est à la pointe de la réhabilitation par le sport depuis plus de 50 ans. Nous avons tant de choses à partager », a déclaré Ora Seidner, qui développe des projets pour le Tsahal Disabled Veterans Fund de la ZDVO et est l’administratrice de la délégation israélienne aux Jeux Invictus.
Selon le directeur des communications de la Fondation des Jeux Invictus, Sam Newell, l’admission au sein de la communauté des nations Invictus est à la discrétion de la fondation, et les demandes d’adhésion sont examinées au cas par cas. Les nations sont sélectionnées par la fondation en collaboration avec la ville hôte.
Seidner assure que Düsseldorf a joué un grand rôle dans l’admission d’Israël au sein du giron Invictus.
« La Tsahal Disabled Veterans Organization est fière de participer, pour la première fois, aux Jeux Invictus, et de représenter l’État d’Israël. Le sport a toujours joué un rôle important dans la rééducation des anciens combattants blessés. Nous sommes impatients d’assister aux compétitions, de rencontrer les équipes des 20 autres nations participantes et sommes certains que l’esprit des Jeux Invictus prévaudra », a déclaré le président de la ZDVO, Edan Kleiman, lui-même un vétéran blessé.
Newell a expliqué que les concurrents étaient sélectionnés par les chefs d’équipe de chaque nation conformément aux directives de la Fondation des Jeux Invictus. Ils doivent avoir été blessés ou être tombés malades pendant ou à la suite de leur service militaire, et la sélection doit privilégier les indicateurs de récupération plutôt que les performances intrinsèques.
« C’est pour cette raison que nous appelons les participants des compétiteurs, plutôt que des athlètes, pour souligner cette distinction et mettre l’accent sur le rétablissement et la réadaptation », ajoute Newell.
Dans le documentaire Netflix sur ces jeux, récemment mis en ligne sous le titre « Heart of Invictus », on explique que le choix des participants doit se porter sur ceux qui en « ont le plus besoin » pour faire progresser leur réhabilitation. On y évoque ces anciens combattants blessés, dans différents pays, qui ne se tournent vers le sport qu’après avoir touché le fond physiquement, émotionnellement voire les deux.
Selon Seidner, la ZDVO fait de la réhabilitation sportive dès le début pour éviter d’en arriver là. Et très souvent, les anciens combattants prennent leur activité physique très au sérieux.
« ‘Invictus’ signifie invaincu », explique Seiden à propos du mot latin, « et pour nous, invictus se vit au quotidien. Les athlètes vétérans blessés de Tsahal sont très compétitifs : ils veulent décrocher des médailles. »
En effet, les Israéliens handicapés ont l’habitude des championnats internationaux et ont remporté 384 médailles aux Jeux paralympiques d’été depuis 1960.
Par conséquent, Seidner et l’entraîneur-chef de l’équipe, Miki Uzaï, ont dû chercher des sportifs d’un autre acabit pour constituer la délégation de 20 personnes allouée à Israël pour sa première participation aux Jeux Invictus.
La ZDVO a opté pour une composition équilibrée, reflet des engagements opérationnels dans tout le pays. Elle a également privilégié le profil des personnes qui pratiquent leur sport depuis trois à cinq ans et ont fait preuve de persévérance dans leur parcours de rééducation, sans avoir jamais eu l’occasion de concourir à l’étranger.
La natation est au cœur du travail de rééducation de Liran Coriat, membre de l’équipe, depuis un terrible accident survenu pendant son service militaire. Aujourd’hui âgée de 51 ans et mère de trois enfants, elle vit à Ramat Yishaï, elle s’entraîne deux à trois fois par semaine et est professeure de natation pour le ministère de l’Éducation.
Elle prendra part aux épreuves du 50 mètres nage libre, du 50 mètres dos et du 50 mètres brasse.
Coriat était une jeune soldate âgée de 20 ans affectée à la Division du renseignement du Commandement du Nord lorsqu’elle a été renversée par une jeep.
« J’ai été dans le coma pendant une semaine. J’avais des blessures au cerveau et au cou. J’ai dû subir une intervention chirurgicale pour mes jambes cassées. Mes dents ont été arrachées. J’ai été blessée partout », se souvient-elle.
Elle a suivi une rééducation pendant neuf mois à l’hôpital Loewenstein de Raanana, avant de continuer chez elle.
« La première chose que j’ai faite, en rentrant chez moi, a été d’aller à la piscine. J’avais fait partie d’une équipe de natation quand j’étais plus jeune et je voulais reprendre ce sport, même si ce n’était plus pour faire de la compétition », explique Coriat.
Elle dit avoir continué à nager au fil du temps parce qu’elle ne ressent pas la douleur dans l’eau, et parce que c’est relaxant.
« C’est calme. Pas besoin de parler. On peut simplement être avec soi-même et s’éloigner de tout ».
Coriat dit son enthousiasme à l’idée de concourir à nouveau, en présence de deux de ses enfants qui seront avec elle à Düsseldorf. Les Jeux Invictus prennent en effet en charge, pour chaque concurrent, les frais inhérents à deux proches ou membres des familles afin de promouvoir également le rétablissement social.
Assa Ender explique au Times of Israel que ses quatre collègues archers et lui-même s’entraînent une à deux fois par jour depuis plusieurs mois en vue de la compétition.
« Nous prenons cela très au sérieux. Nous consacrons beaucoup de temps à notre préparation, et la plupart d’entre nous ont par ailleurs une activité professionnelle ».
Agé de 51 ans, Ender est agronome, marié et père de quatre filles : il vit à Tzur Yigal. En 1993, il est encore un jeune officier de la brigade parachutiste de Tsahal lorsque son unité et lui sont pris en embuscade au Liban. Ender est touché par une balle tirée d’un engin explosif improvisé. La balle sectionne son artère fémorale, blessure mortelle si elle n’est pas prise en charge dans les 15 minutes qui suivent la blessure.
« L’adrénaline m’a permis de continuer à me battre. Mais quand je me suis rendu compte de ma blessure, j’ai su que c’était grave. J’ai réussi à arrêter l’hémorragie moi-même jusqu’à ce que les médecins arrivent et j’ai été évacué à l’hôpital Rambam par hélicoptère », se souvient Ender.
Malheureusement, les médecins de l’hôpital n’ont pas pu sauver sa jambe gauche, qui est amputée sous le genou. Ender utilise une prothèse depuis.
Il ne se contente pas de pratiquer ou d’enseigner le tir à l’arc, mais il en construit également. Il s’est spécialisé dans les arcs recourbés et se dit le seul en Israël à les fabriquer.
« Le tir à l’arc est en train de se populariser en Israël. C’est l’athlète olympique britannique Richard Priestman qui entraîne l’équipe d’Israël et l’un de nos archers s’est classé neuvième aux Jeux olympiques de Tokyo, ce qui est formidable compte tenu de la nouveauté du sport ici », explique Ender.
« Je concours en Israël, mais je ne suis certainement pas au niveau des résultats ».
Au-delà la fierté qui est la sienne de représenter son pays aux Jeux Invictus et son désir de terminer sur le podium, Ender explique que pour lui, le plus important dans les Jeux est l’effet psychologique.
« Faire partie d’une activité organisée est important du point de vue social. On rencontre des gens, on communique avec les autres parce que l’on fait partie d’une équipe. Les gens attendent certaines choses de vous et vous y êtes obligé. Vous ne vous laissez pas porter par le vent », dit-il.
« Il est plus facile d’exiger quelque chose de soi quand les autres aussi attendent quelque chose. Cela donne un cadre. Seules les personnes très fortes peuvent faire quelque chose sans ce cadre ».
En plus des épreuves, les membres de l’équipe israélienne auront l’occasion de rencontrer les autres participants au sein du village spécialement conçu pour les Jeux Invictus.
La délégation israélienne assistera également à une réception organisée par le FNJ Allemagne, à laquelle prendront part le ministre allemand de la Défense et des représentants de Boeing, le principal sponsor des Jeux.
Les Jeux se déroulant jusqu’à Rosh HaShana, les Israéliens seront accueillis par la communauté juive de Düsseldorf à l’occasion de la fête.
Les Jeux sont diffusés en direct.
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