Gantz rencontre Abbas ; le bureau de Bennett minimise la portée de l’entretien
Un responsable a affirmé que le Premier ministre a approuvé la rencontre, qui portait sur des questions de sécurité et a souligné qu'il n'y aurait pas de négociations de paix
Un responsable du bureau du Premier ministre a minimisé lundi l’importance de la réunion entre le président de l’Autorité palestinienne (AP) Mahmoud Abbas et le ministre de la Défense Benny Gantz, qui se sont rencontrés dimanche soir à Ramallah pour le premier entretien en tête-à-tête de haut niveau depuis plus de dix ans, selon des responsables israéliens et palestiniens.
Le bureau du Premier ministre a souligné qu’il n’y aurait pas de négociations de paix avec les Palestiniens.
« C’est une réunion qui portait sur des questions sécuritaires. Il n’y a aucun processus diplomatique avec les Palestiniens et il n’y en aura pas », a déclaré le responsable.
La réunion, premier entretien de haut niveau en dix ans, a été approuvée en amont par le Premier ministre Naftali Bennett, a précisé lundi le responsable, sous couvert d’anonymat.
Un député du parti de gauche Meretz a condamné le communiqué du responsable et a appelé à des pourparlers de paix avec les Palestiniens.
« [C’est] un message scandaleux. Pourquoi ne pas entamer de processus diplomatique ? Israël bénéficierait d’un processus diplomatique », a tweeté le législateur Mossi Raz en réponse au communiqué anonyme.
Un premier communiqué du bureau de Gantz indique que les deux hommes ont discuté de questions liées à la sécurité, à la diplomatie, à l’économie et aux affaires civiles lors de vastes entretiens.
« Gantz a dit à [Abbas] qu’Israël était prêt à prendre une série de mesures qui renforceraient l’économie de l’AP », indique le communiqué.
« Les deux hommes ont également discuté de l’évolution de la sécurité, de la réalité civile et économique en Judée, en Samarie et à Gaza », ajoute le communiqué, qui fait référence à la Cisjordanie par sa dénomination biblique.
« Le président Mahmoud Abbas a rencontré ce soir à Ramallah Benny Gantz, où ils ont discuté de tous les aspects des relations palestino-israéliennes », a tweeté un haut responsable de l’Autorité palestinienne, Hussein al-Sheikh, un proche confident d’Abbas et le principal agent de liaison entre Ramallah et Israël.
Ces entretiens interviennent alors que le Premier ministre Naftali Bennett est rentré de Washington après avoir rencontré le président américain Joe Biden. Ce dernier a évoqué la question palestinienne avec le nouveau dirigeant israélien au cours de leurs discussions.
Bennett s’est engagé à soutenir le gouvernement et l’économie de l’Autorité palestinienne en difficulté, mais il a catégoriquement exclu de travailler à la création d’un État palestinien indépendant.
« Cette réunion… est un signe encourageant et une autre expression du changement positif qu’apporte le nouveau gouvernement », a tweeté lundi le député Meretz Yair Golan. « La complexité du conflit doit être résolue par le dialogue – c’est l’acte sioniste approprié », a-t-il ajouté.
Le ministre de la Santé Nitzan Horowitz (Meretz), qui a rencontré son homologue palestinien il y a quelques semaines, a salué la rencontre Gantz-Abbas.
« Après une rupture longue et préjudiciable d’années avec nos plus proches voisins, il est temps de reprendre le dialogue et la coopération avec l’AP », a-t-il tweeté.
Les derniers entretiens de haut niveau entre les dirigeants israéliens et palestiniens remontent à 2010, au début du second mandat de l’ancien Premier ministre Benjamin Netanyahu. Si les deux dirigeants se sont croisés occasionnellement par la suite, les liens sont devenus de plus en plus tendus à mesure que le processus de paix est devenu complètement moribond ; leur dernier appel téléphonique public remonte à 2017, après une attaque terroriste palestinienne.
Ces dernières années, les contacts de haut niveau entre les deux parties se sont raréfiés.
Selon le bureau de Gantz, les responsables politiques ont tenu deux séries de discussions. La première a été suivie par le chargé de liaison militaire d’Israël avec les Palestiniens, Ghassan Alian, le chef des renseignements de l’Autorité palestinienne, Majid Faraj, et al-Sheikh. Lors de la seconde, Gantz et Abbas se sont entretenus en privé.
Lors de la rencontre entre Biden et Bennett, le président a souligné « l’importance des mesures visant à améliorer la vie des Palestiniens et à soutenir de plus grandes opportunités économiques pour eux » et a noté « l’importance de s’abstenir d’actions qui pourraient exacerber les tensions, contribuer à un sentiment d’injustice et saper les efforts pour établir la confiance », a déclaré la Maison Blanche.
Gantz s’est entretenu au téléphone avec Abbas à la mi-juillet, marquant le contact public de plus haut niveau entre les deux parties depuis l’appel téléphonique de Netanyahu en 2017. Une série de réunions et d’appels téléphoniques ont suivi : le ministre de la Sécurité publique Omer Barlev s’est entretenu avec Abbas quelques semaines plus tard, tandis que les ministres des deux parties ont tenu des réunions rares avec leurs homologues.
Les responsables israéliens ont publiquement mis l’accent sur le renforcement de l’économie de l’AP, Ramallah étant confronté à une crise budgétaire croissante. En juillet, Israël a augmenté le nombre de permis de travail pour les Palestiniens de Cisjordanie cherchant un emploi en Israël, afin d’atténuer les difficultés économiques.
L’économie cisjordanienne a été malmenée par le coronavirus, avec une contraction de 11,5 % au cours de l’année 2020. Le budget du gouvernement de l’AP a également pris un sérieux coup, un diplomate occidental ayant averti le Times of Israël fin juillet que l’AP était « sur le point de s’effondrer en raison du manque de revenus ».
Parallèlement, Ramallah a connu une baisse importante de l’aide arabe et internationale, qui représentait auparavant une part importante de son budget. En 2019, l’AP a reçu environ 300 millions de dollars de soutien budgétaire à la fin du mois de juin. En 2021, cependant, elle n’a obtenu que 30,2 millions de dollars, soit à peine plus d’un dixième du montant initial.
La majorité du budget provient des recettes fiscales qu’Israël perçoit pour son compte, appelées recettes de dédouanement.
« Nous ne voulons pas que l’AP s’effondre, mais d’un autre côté, elle flirte constamment avec les terroristes », a déclaré lundi le ministre des Communications Yoaz Hendel à la radio publique Kan.
« Notre principal intérêt est une Autorité palestinienne économiquement forte », a-t-il ajouté.
En vertu d’une loi israélienne de 2018, Israël retient régulièrement l’argent de ces recettes pour pénaliser Ramallah pour sa politique de versement d’allocations aux prisonniers de sécurité palestiniens, à ceux qui ont été tués lors de violentes confrontations avec les forces israéliennes, et à leurs familles – y compris ceux qui ont commis des attaques terroristes contre des Israéliens.
« Lorsque Abbas transfère des salaires à des terroristes, il soutient le terrorisme », a ajouté Hendel.
En juillet, le gouvernement israélien a approuvé la confiscation de 600 millions de shekels sur une période de six mois. Ce montant correspondrait à peu près à ce que Ramallah a versé en salaires aux condamnés pour terrorisme et aux familles de ce qu’ils appellent les « martyrs » au titre de l’année 2020.
Le Times of Israël a rapporté vendredi qu’Israël et l’Autorité palestinienne ont mené des discussions en vue d’un plan d’aide financière qui pourrait se traduire par l’envoi de centaines de millions de shekels à Ramallah. Un accord définitif n’a toutefois pas encore été annoncé publiquement.