Gantz s’insurge contre une coalition bâtie pour protéger Netanyahu
Le chef du principal parti d'opposition a critiqué le Premier ministre qui bâtit, selon lui, un gouvernement avec pour objectif "inacceptable" de le protéger des magistrats
Le chef de Kakhol lavan, Benny Gantz, a âprement critiqué lundi le Premier ministre Benjamin Netanyahu qui chercherait, selon lui, à former une coalition en négociant avec ses membres la garantie qu’ils assureront son immunité face aux poursuites judiciaires qui le menacent dans trois affaires de corruption.
« Kakhol lavan prendra la tête de la lutte contre les initiatives du Premier ministre qui vise à acheter une coalition qui lui servira de forteresse personnelle contre ses déboires judiciaires », a clamé Gantz. « Nous ne le laisserons pas faire ».
Gantz, dont la formation Kakhol lavan a été battue par le Likud de Netanyahu lors du scrutin du 9 avril, a fait cette déclaration après que Bezalel Smotrich de l’Union des partis de droite a confirmé que son parti avait l’intention de présenter un projet de loi visant à accorder une immunité automatique à tous les députés élus dans le cadre de l’agenda mis en avant dans sa plate-forme, – et ce, avant même que n’aient commencé les négociations de coalition avec le Premier ministre.
Tandis que Smotrich a clamé qu’il ne défendait pas cet amendement dans le but de protéger Netanyahu, son adoption signifierait néanmoins que le Premier ministre ne pourrait pas être poursuivi dans trois dossiers de corruption dans lesquels il devrait être inculpé – sous réserve d’une prochaine audition.
Un porte-parole de l’Union des partis de droite a confié lundi au Times of Israel que la liste d’extrême-droite réclamait que Netanyahu s’engage à annexer toutes les implantations israéliennes de Cisjordanie en guise de condition préalable à l’entrée de la formation au sein du gouvernement. En échange, le porte-parole a indiqué que l’Union parrainerait une loi qui accorderait l’immunité au Premier ministre.
« L’établissement d’un gouvernement dont le seul objectif vise à assurer l’immunité pour Netanyahu est inacceptable », a souligné Gantz mardi.
Gantz, dont le parti Kakhol lavan sera la plus importante faction de l’opposition dans la prochaine Knesset – elle a remporté 35 sièges, à égalité avec le Likud – a tenu ces propos après qu’un certain nombre de députés issus de l’opposition ont dénoncé son silence sur cette question. C’est la toute première fois également qu’il commente les pourparlers de coalition.
Il a également critiqué la présence dans l’équipe de négociations du Likud d’un ancien conseiller de Netanyahu qui avait démissionné dans un contexte d’accusations de harcèlement sexuel. « Employer Natan Eshel, tenter de reporter l’audition et vendre les valeurs de base de la démocratie… C’est tellement triste et tellement peu surprenant », a ajouté Gantz.
Eshel est un ancien chef de cabinet de Netanyahu qui avait démissionné du bureau du Premier ministre dans le cadre d’un arrangement judiciaire en 2012. Il est toutefois revenu sur la scène politique comme représentant du Likud dans les pourparlers de formation de la coalition, un retour en politique qui a été vivement condamné par les législateurs de l’opposition et les groupes féministes, qui ont appelé le Procureur-général à lui interdire de prendre part aux pourparlers.
La référence faite par Gantz à une tentative visant à « reporter l’audition » survient après une information rendue publique en début de semaine, selon laquelle les avocats de Netanyahu, dans les dossiers de corruption, avaient échoué à prendre possession des documents juridiques qui avaient été mis à disposition par le Procureur-général pendant deux semaines concernant les affaires – ce que certains ont considéré comme une tentative, de la part de Netanyahu, de faire reporter le processus d’audition.
L’un des avocats du Premier ministre, Pini Rubin, a néanmoins expliqué mardi à la radio militaire que les juristes n’avaient pas collecté les documents en question parce qu’ils n’avaient pas été payés pour leur travail.
La semaine dernière, le président Reuven Rivlin a officiellement confié la tâche à Netanyahu d’assembler une coalition pour gouverner la 21e Knesset. Ce dernier, qui assumera ses fonctions de Premier ministre pour un cinquième mandat, devrait rassembler une coalition de partis de droite et ultra-orthodoxes – en réunissant 65 députés sur les 120 que compte la Knesset.
L’Union des partis de droite entrera officiellement dans les négociations avec le parti du Likud la semaine prochaine mais elle a d’ores et déjà annoncé publiquement le contenu d’une longue liste de demandes – qui vont de portefeuilles ministériels éminents à un projet de loi qui entraverait fortement les capacités de contrôle de la Cour suprême sur les lois adoptées par la Knesset.
Netanyahu a donné des réponses contradictoires quand il lui a été demandé s’il chercherait à faire adopter ou à bénéficier d’un texte qui lui accorderait l’immunité face aux poursuites – tout en niant toute malversation. Selon les termes de la loi existante, tout député peut demander l’immunité en remportant la majorité lors d’un vote en commission intérieure de la Knesset tout d’abord, puis en séance plénière. La proposition de Smotrich accorderait une immunité automatique aux législateurs qui ne pourrait être levée que par un vote à la majorité au sein de la commission intérieure et en séance plénière.
Plusieurs autres députés qui risquent également de possibles inculpations bénéficieraient donc potentiellement, eux aussi, de cette protection automatique.
L’alliance de l’Union des partis de droite est constituée des partis nationaux-religieux HaBayit YaHehudi et Union nationale, aux côtés de la faction Otzma Yehudit, un groupe d’extrême-droite dirigé par les disciples auto-proclamés de feu le rabbin américain Meir Kahane, dont la formation Kach avait été interdite en Israël pour racisme, dans les années 1980. L’accord portant sur l’inclusion d’Otzma Yehudit avait été personnellement négocié par Netanyahu.
Jacob Magid a contribué à cet article.