Herzog estime qu’un compromis rapide sur la réforme judiciaire est possible
Smotrich reproche à Lapid d’avoir « déclaré la guerre à Israël » en critiquant la réforme, qu'il qualifie de « précipitée »

Suite aux entretiens qu’il a eus avec les dirigeants de la coalition et de l’opposition la semaine passée, le président Isaac Herzog a déclaré, dimanche, penser qu’un compromis sur la réforme judiciaire basé sur ses propositions de dimanche dernier pourrait être conclu en l’espace de quelques jours.
S’exprimant depuis sa résidence officielle à Jérusalem, Herzog a exprimé sa profonde inquiétude face aux troubles sociaux persistants liés aux projets du gouvernement, disant craindre pour l’avenir du pays.
Herzog a tenu ces propos lors de son cours hebdomadaire d’étude biblique, dans le cadre du Projet 929, au cours duquel il a rappelé le sort des États juifs au cours de l’histoire.
« Je vois les divisions et les fissures entre nous, plus profondes et douloureuses encore en ce moment, et je ne peux m’empêcher de penser que, par deux fois dans le passé, un État juif a surgi en Terre d’Israël et, par deux fois, a disparu avant d’atteindre son 80e anniversaire », a déclaré le président, rappelant qu’Israël approchait de son 75e anniversaire.
« La semaine passée, j’ai tenu de nombreuses réunions et me suis entretenu avec des personnalités de tous bords politiques – coalition et opposition confondues – et des spécialistes, pour évoquer le désaccord auquel nous sommes confrontés, afin de parvenir à un dialogue et un compromis », a-t-il poursuivi.
« Je retiens de tous mes entretiens que, sur la base des principes que j’ai présentés la semaine dernière, il est possible de parvenir à un compromis dans un délai relativement court. Je parle de quelques jours, pas d’années ni de mois. »
Peu de temps avant cette déclaration, le ministre des Finances, Bezalel Smotrich, s’en était pris à Yair Lapid, accusant le chef de l’opposition de contrecarrer le débat sur la réforme judiciaire et de vouloir « une guerre civile ».

Smotrich a dit que le gouvernement n’avait aucunement l’intention de suspendre la procédure législative en cours et que la première partie de la réforme serait adoptée en première lecture à la Knesset, lundi, alors qu’il s’était dit ouvert au dialogue et au compromis et avait pris un engagement en ce sens envers Herzog, lors d’un récent entretien.
Dans un discours particulièrement pugnace, accueilli avec enthousiasme par les responsables du parti et les sympathisants, Smotrich a fait valoir que la réforme était nécessaire pour mettre un terme à l’activisme judiciaire, assurant que la victoire du bloc religieux de droite aux dernières élections donnait à la coalition toute légitimité pour la mener à bien.
« Yair Lapid fait tout pour saborder les chances de dialogue », a déclaré le chef du parti d’extrême droite HaTzionout HaDatit lors d’une conférence du parti à Jérusalem, affirmant que le dirigeant de Yesh Atid et ex-Premier ministre avait « déclaré la guerre à l’État d’Israël ».
« Lapid n’est pas intéressé par le compromis. Il ne s’intéresse pas au bien de l’État d’Israël. Il ne veut pas empêcher le fossé qui se creuse au sein de la nation. Yair Lapid veut la guerre civile » a-t-il affirmé.
Le ministre des Finances a également évoqué l’ambassadeur américain en Israël, Tom Nides, lui disant de ne pas intervenir sur la question, suite à ses propos demandant au gouvernement israélien de « freiner » sur la question.

« Nous apprécions l’amitié et l’alliance forte et stratégique entre Israël et les États-Unis », a déclaré Smotrich.
« Nous avons toujours fait en sorte de ne pas intervenir dans les affaires intérieures des États-Unis, et nous nous attendons donc à ce qu’ils n’interviennent pas non plus dans nos affaires intérieures, que ce soit la réforme judiciaire ou la division des pouvoirs entre moi et le ministre de la Défense Yoav Gallant. »
Lapid a répondu à Smotrich, accusant le leader sioniste religieux d’être à l’origine des tensions sociales nées du projet de réforme judiciaire.
« Bezalel, vous n’êtes plus un ‘Jeune des collines’ avec ses bidons d’essence », a plaisanté Lapid, allusion aux soupçons qui pèsent sur l’implication de Smotrich dans des actes de désobéissance civile et même un incendie criminel lors du désengagement de Gaza, en 2005.

« À un poste de direction, il vaut mieux ne pas paniquer comme ça, et s’abstenir de reprocher aux autres les dégâts que vous – pas moi ni l’administration américaine – occasionnez », a rétorqué Lapid.
« Quand on veut empêcher la guerre civile, on ne fait pas voter une réforme clivante à la hâte. Je suis le premier à avoir suggéré d’aller voir le président pour parler de la question. »
« Au lieu de vous arrêter pour débattre, vous faites du forcing pour faire adopter en urgence une réforme insensée et dommageable à l’économie, à la sécurité et à l’unité du peuple », a-t-il ajouté.
La réforme judiciaire, proposée par le ministre de la Justice Yariv Levin et soutenue par le Premier ministre Benjamin Netanyahu, souhaite accorder au gouvernement un contrôle total sur la nomination des juges, dont ceux de la Cour Suprême, limiter la compétence de cette dernière à invalider des lois et permettre à la Knesset de légiférer une nouvelle fois sur des lois invalidées par la Cour avec une courte majorité de 61 voix.
Les opposants à la réforme estiment qu’elle aura pour effet, couplée à d’autres réformes encore à venir, de saper les fondements-mêmes de la démocratie israélienne, en bouleversant son système de contrepouvoirs, concentrant la quasi-totalité des pouvoirs entre les mains de l’exécutif et privant de toute défense les droits individuels et les minorités.
Netanyahu, à l’instar d’autres membres de la coalition, ont balayé les critiques d’un revers de main. Il assure que la réforme est attendue depuis longtemps et qu’elle contribuera à renforcer la démocratie israélienne.