Un député d’extrême-droite compare les législateurs arabes à des moutons
Almog Cohen d'Otzma Yehudit a refusé de présenter des excuses après ses propos racistes tenus à la Knesset au sujet des députés de Hadash-Taal
Un député d’extrême-droite s’est filmé, lundi, en séance plénière de la Knesset alors qu’il tenait des propos racistes au sujet des députés de l’opposition. Il a notamment traité un député arabe de « tête de bétail » et déclaré qu’il fallait s’adresser à ce dernier « dans un langage qu’il comprend ».
Almog Cohen, élu sous l’étiquette d’Otzma Yehudit, a ensuite refusé de présenter des excuses aux législateurs qu’il avait insultés – à l’exception de Merav Ben-Ari, parlementaire appartenant à Yesh Atid – et il a déclaré de manière explicite que les représentants à la Knesset de l’alliance Hadash-Taal, à majorité arabe, « ne sont pas dignes d’être seulement des moutons, ce ne sont pas des humains ». Il a ajouté qu’il s’engageait à leur imposer « une vie de misère ».
Dans sa vidéo qui a été diffusée en direct sur les réseaux sociaux, Cohen filme Ofer Cassif, député de Hadash, le seul Juif de la faction Hadash-Taal. Le député d’extrême-droite siffle et fait des claquements de langue pour attirer son attention.
« Ferme-la ! », crie-t-il ensuite avant d’ajouter : « Uskut ! » (le mot arabe signifiant : « Tais-toi »). Il claque ensuite à nouveau la langue, comme on le fait pour interpeller un animal.
« Quand on leur parle dans leur langage, ils vous comprennent très bien », dit-il ensuite aux députés assis à ses abords, notamment au leader du parti du Shas Aryeh Deri qui semble alors s’esclaffer. « Il faut s’adresser à eux comme à des moutons. »
« Je ne lui dis pas de se taire en hébreu parce qu’il ne parle pas la langue », continue Cohen, qui compare aussi Cassif à un chien.
Il évoque ensuite Ahmad Tibi, de Taal, qui est gynécologue de carrière : « Il est médecin, mais je ne lui confierai pas mon chien. »
Cohen parle ensuite de Merav Ben-Ari, de Yesh Atid, en disant qu’elle a une voix « de femme de ménage ».
מישהו פונה לכהן והוא עונה ״אה? לא לא.. רק לשונאי ישראל אני אומר ברה רק לכסיף״ pic.twitter.com/Anc6kJeGhU
— Lior Kenan – ליאור קינן (@LiorKenan) February 21, 2023
À un autre moment, May Golan, députée du Likud, s’approche de Cohen en lui demandant de crier le mot « Dehors ! » en arabe – comme un berger le ferait à l’égard de son troupeau – en direction d’une députée dont l’identité reste indéterminée.
« Pas aux Juifs », rétorque-t-il en réponse, ignorant apparemment que Cassif est Juif. « Aux Juifs, je leur dis : ‘Allez donc faire un tour.' »
Mardi, Cohen a dit qu’il présentait ses excuses – mais seulement pour « ses propos malheureux » à l’égard de Ben-Ari. Il a maintenu ses paroles à l’encontre des députés de Hadash-Taal.
« Ces députés sont des soutiens du terrorisme », aurait-il déclaré, selon le site d’information Walla. « Mon objectif est de les mettre mal à l’aise et tous les moyens sont légitimes pour ça. »
Il est allé encore plus loin devant les caméras de la Douzième chaîne.
« Ce sont des traîtres. Si mes propos ont été inappropriés, c’est parce qu’en réalité, ils ne sont même pas dignes d’être des moutons, ce ne sont pas des humains. Et je leur imposerai une vie de misère », a-t-il affirmé.
Il s’est aussi montré inflexible dans son refus de présenter des excuses lors d’un entretien au micro de la station de radio 103FM.
« Je comprends bien que ce n’est pas votre style de plaisanterie, mais je représente la nation », a affirmé Cohen.
Répondant aux insultes, Tibi a lancé une pique au député en évoquant sa corpulence, disant à la chaîne de la Knesset sur le ton de la plaisanterie que « quand on n’a pas de nuque, l’oxygène monte plus lentement au cerveau – et c’est un vrai problème ».
Tibi, connu pour son ton acerbe, a aussi demandé au président du parlement, Amir Ohana, s’il apportait son soutien à Cohen et quelle était la politique de la Knesset sur les cris d’animaux. « Est-on autorisé à aboyer comme des chiens ou seulement à bêler comme des moutons ? », a-t-il interrogé, selon le site d’information Walla.
Les propos de Cohen ont été tenus pendant le premier vote sur les lois qui sont au cœur du plan de refonte radicale du système judiciaire qui est actuellement avancé par le gouvernement, et qui offrirait notamment aux politiciens le contrôle de la nomination des juges, réduisant également la capacité de la Haute-cour à invalider des lois et permettant à 61 députés seulement à la Knesset – forte de 120 membres – de les réadopter malgré leur rejet par les magistrats.
Le législateur d’extrême-droite est membre du parti ultra-nationaliste Otzma Yehudit dont le leader, le ministre de la Sécurité nationale Itamar Ben-Gvir, a été condamné dans le passé pour des incitations au racisme.
Ben Gvir a été, pendant des années, un disciple autoproclamé de feu le rabbin Meir Kahane, dont la plateforme extrémiste et raciste prônait l’expulsion des Arabes et la pénalisation des relations sexuelles entre Juifs et non-Juifs. Il a néanmoins récemment tenté de prendre ses distances face à son mentor et à certains de ses points de vue.
Le parti politique qui avait été lancé par Kahane, Kach, avait été déclaré organisation terroriste par le gouvernement israélien et par le département d’État américain quelques années après l’assassinat du rabbin en 1990. Il avait finalement été démantelé.
Ben Gvir avait aussi accroché sur le mur du salon de son domicile de Hébron une photo de Baruch Goldstein qui, en 1994, avait massacré 29 Palestiniens qui priaient au tombeau des Patriarches. Une photo qu’il avait décrochée quand il s’était rendu compte qu’elle lui nuisait politiquement et il a depuis fait savoir qu’il ne considérait plus Goldstein « comme un héros ».
Avant les élections du 1er novembre – remportées par le bloc de droite, d’extrême-droite et religieux du Premier ministre Netanyahu – Cohen avait été piégé en caméra cachée en train de dire que la modération récente des positionnements d’Otzma Yehudit était « une ruse » visant à entrer au parlement, laissant entendre que l’idéologie de ses membres était beaucoup plus extrémiste en réalité qu’ils ne le montraient à ce moment-là.