Le Libyen Fayez al-Sarraj, un Premier ministre qui peine à réconcilier son pays
Son arrivée à Tripoli, où les milices faisaient la loi, avait ravivé les espoirs d'une sortie de crise dans ce pays miné par les divisions et les conflits depuis 2011
Relativement novice en politique, le chef du gouvernement libyen Fayez al-Sarraj est confronté à une offensive militaire de son principal rival Khalifa Haftar qui risque de mettre en péril ses efforts en vue d’une réconciliation nationale.
Mais cet homme de haute stature, élégant et moustachu, n’est pas inconnu à Tripoli même s’il n’a rejoint la politique qu’en juin 2014. Il y est en effet né en 1960 au sein d’une grande famille conservatrice et aisée, propriétaire de commerces et de vastes terrains.
Aujourd’hui l’un des principaux protagonistes de la crise libyenne, Sarraj a été désigné en décembre 2015 chef d’un gouvernement d’union nationale (GNA) en vertu d’un accord signé sous l’égide de l’ONU par des députés libyens.
Coincé pendant des mois à Tunis, il débarque finalement fin mars 2016 d’un navire militaire libyen à Tripoli et réussit à obtenir le ralliement successif des autorités économiques et politiques. Mais il ne parvient pas à convaincre le « gouvernement » rival implanté dans l’est du pays et soutenu par le maréchal Haftar.
Son arrivée à Tripoli, où les milices faisaient la loi, a ravivé les espoirs d’une sortie de crise dans ce pays miné par les divisions et les conflits depuis la chute du régime de Mouammar Kadhafi en 2011.
Sa principale mission : remettre de l’ordre dans les institutions de l’Etat et entamer un processus de réconciliation.
Un objectif non encore atteint.
« Otage »
Le principal succès de Sarraj, décrit comme « très calme » par un camarade de jeunesse, a été en décembre 2016 la reprise par des forces loyales au GNA de la ville de Syrte aux jihadistes du groupe Etat islamique.
Un succès militaire qui cache mal plusieurs échecs, principalement l’incapacité à alléger les difficultés quotidiennes des habitants et à trouver une solution à la crise économique.
Et les milices sont toujours présentes dans la région occidentale, en particulier à Tripoli, le GNA n’ayant pas pu mettre sur pied une police ou une armée régulière.
D’ailleurs, pour pouvoir siéger à Tripoli et garantir une sécurité relative, il a dû obtenir le ralliement d’une poignée de puissants groupes armés tripolitains, dont il a fini par devenir « l’otage », selon des analystes.
En perte de vitesse, il a vu Khalifa Haftar revenir dans le jeu libyen et obtenir des soutiens régionaux et internationaux comme celui de l’Egypte, des Emirats arabes unis, de l’Arabie saoudite, mais aussi de la Russie.
La famille des Sarraj a participé à l’écriture de l’histoire de la Libye moderne. Mostafa al-Sarraj, le père du Premier ministre, a été l’un des pères fondateurs de l’Etat au lendemain de l’indépendance en 1951.
En entrant au Parlement en 2014, Fayez al-Sarraj, 59 ans, a perpétué la tradition familiale. Mais deux mois après son élection, une coalition de milices, Fajr Libya, prend le contrôle de la capitale. Le gouvernement et le Parlement nouvellement élu sont contraints de prendre la fuite pour se réfugier dans l’est du pays.
Sarraj s’exile à Tobrouk, où siège toujours le Parlement, et, dans ce contexte tendu, envoie son épouse, une architecte, et ses trois filles résider à l’étranger.
Avant de se lancer en politique, Fayez al-Sarraj avait réussi dans le commerce. Architecte de formation, il avait passé plusieurs années dans le secteur public.