Le policier des frontières qui a tué un Palestinien autiste en 2020 a été acquitté
Le policier, qui avait pris le téléphone d'Iyad Halak pour une arme à feu, a été acquitté des charges d'homicide involontaire. Le tribunal s'est dit "de tout cœur avec la famille du défunt"
Le tribunal de Jérusalem a acquitté, ce jeudi, un agent de la police des frontières des charges d’homicide involontaire pour la mort d’un Palestinien autiste, en 2020.
Le policier, dont l’identité n’a pas été révélée, a tué Iyad Halak dans la Vieille Ville de Jérusalem, après avoir pris le téléphone portable de la victime, qui n’obéissait pas à l’ordre de rester immobile, pour une arme.
Inculpé d’homicide involontaire par imprudence, il vient d’obtenir l’acquittement du tribunal de Jérusalem.
« Il n’y a pas de justice. C’est honteux. Mon fils est sous terre », s’est écriée la mère de Halak à la lecture de la décision, selon la Treizième chaîne.
Le jour de ce tragique incident, qui remonte à mai 2020, Halak se rendait à l’école spécialisée qui l’accueillait. L’agent a pris le téléphone portable du jeune homme pour une arme à feu et, avec l’aide d’un collègue, il s’est lancé à la poursuite de Halak, qui ne comprenait pas la situation, effrayé par les policiers et leurs injonctions. Les policiers l’ont finalement coincé dans un local poubelle, où ils lui ont tiré dessus à deux reprises alors, dont une fois alors qu’il était au sol.
« Le tribunal est de tout coeur avec la famille du défunt », ont écrit les juges dans leur décision, soulignant que les parents et sœurs de Halak avaient assisté à chaque audience et « fait entendre leur désir de justice ».
« Malgré tout, le tribunal doit faire son travail, même si c’est très difficile. »
Dans leur décision, les juges ont dit s’être rangés derrière les explications de l’agent, à savoir qu’il s’était cru menacé, forcé de prendre une décision en l’espace de quelques instants.
« Il n’a pas été possible d’établir que la décision de tirer sur le bas du corps de Halak était déraisonnable, ce qui plaide en faveur d’une erreur de bonne foi », ont-ils déclaré.
S’agissant du deuxième coup de feu tiré dans le haut du corps de Halak, le tribunal a conclu que l’accusé s’était senti en « danger immédiat », car les mouvements de Halak, en tombant au sol, ont pu légitimement être interprétés comme étant ceux « d’un terroriste refusant de se rendre et prêt à riposter ». Les juges ont également noté qu’il s’agissait d’un jeune agent, aux prises avec sa première situation opérationnelle de ce genre.
Le chef de la police des frontières, Amir Cohen, a salué la décision et a déclaré s’être entretenu avec l’agent et son père. Cohen a annoncé à l’agent qu’il pourrait reprendre du service et a approuvé sa candidature à un cours de préparation aux fonctions de commandant, programmé dans les toutes prochaines semaines.
Selon un communiqué de la police, le policier et son père ont remercié Cohen.
Le chef de la police israélienne, Kobi Shabtai, à la tête de la police des frontières au moment des faits, a également salué la décision.
« Une personne a perdu la vie et c’est donc malheureux. Mais dès le début, j’ai rappelé que nous, ses commandants, avions chargé cet officier d’une mission et qu’il était de notre devoir de le soutenir », a déclaré Shabtai dans un communiqué. « Je crois que le tribunal a rendu une bonne décision. »
« Nous continuerons à soutenir les officiers de la police israélienne », a ajouté Shabtai.
Le ministre d’extrême droite de la Sécurité intérieure, Itamar Ben Gvir, a exprimé son soutien à la police.
Dans son témoignage, le policier des frontières a dit avoir pensé sur le coup que Halak allait se livrer à une « folie meurtrière », après avoir entendu des informations sur la présence de « terroristes ! » à la radio ou de la part de policiers à proximité.
« Le commandant l’a sommé de s’arrêter, mais Halak n’a pas obtempéré. À ce moment-là, mon commandant a tiré et j’ai entendu une femme crier », déclarait l’agent au tribunal, en février, lors d’une comparution masquée pour préserver le secret de son identité.
Disant avoir pensé que la vie de la femme était en danger, le suspect a poursuivi Halak jusque dans un local poubelle, où il lui a tiré dessus. Comme Halak bougeait encore, il lui a à nouveau tiré dessus, a-t-il déclaré au tribunal.
« Ces quelques secondes m’ont paru une éternité. Tout s’est passé si vite que je n’ai pas eu le temps de tout analyser. J’ai voulu sauver cette femme », a-t-il ajouté.
Il faisait manifestement allusion à la soignante de Halak, effrayée par les agents, et qui a poursuivi la police pour préjudice moral.
A l’époque, les faits avaient été comparés avec la mort de George Floyd, aux États-Unis, et des manifestations contre les violences policières avaient eu lieu. L’agitation ne s’était pas cantonnée à la population palestinienne, pour se répandre au sein de la population juive et susciter des messages de condoléances de la part des autorités israéliennes.