Le Sénat US adopte un amendement établissant que la critique du gouvernement israélien n’est pas antisémite
Le président républicain de la commission a accusé l'amendement de Bernie Sanders - adopté par 12 voix contre 11 avec l'aide du républicain Rand Paul - de vouloir mettre à mort la loi sur la sensibilisation à l'antisémitisme

JTA – Un amendement stipulant que la critique du gouvernement israélien n’était pas une expression d’antisémitisme a été ajouté à la loi sur la sensibilisation à l’antisémitisme (Antisemitism Awareness Act) lors d’une réunion de commission au sénat américain dans la journée de mercredi.
L’amendement a été proposé par le sénateur du Vermont Bernie Sanders, un leader progressiste juif, et il a été approuvé par un vote de 12 contre 11 au sein de la commission de la Santé, de l’Éducation, du Travail et des retraites.
La commission a levé la séance avant de voter sur le projet de loi lui-même et sur un autre texte législatif, le « Protecting Students on Campus Act », un texte qui obligerait les écoles à partager des informations sur la manière dont les étudiants sont en droit de déposer des plaintes en matière de droits civils auprès du département de l’Éducation.
La date du vote en commission n’a pas encore été annoncée. Si le projet de loi est adopté par la commission HELP, il sera soumis ensuite au vote final du Sénat.
L’amendement de Sanders était l’un des sept amendements ajoutés au projet de loi – qui vise à codifier une définition largement adoptée et controversée de l’antisémitisme dans le droit américain. Cette définition, élaborée par l’International Holocaust Remembrance Alliance, a été adoptée par des centaines d’instances gouvernementales et autres, mais elle a entraîné des critiques du côté de la gauche politique qui lui reproche de considérer comme antisémites certains griefs à l’égard d’Israël.
« On peut critiquer le gouvernement d’Israël pour sa politique sans être antisémite », a déclaré Sanders, le membre le plus important de la commission, lors de la réunion du panel. « Cet amendement précise qu’il n’est pas antisémite de s’opposer à l’effort de guerre mené par Netanyahu, un effort de guerre qui a entraîné la mort de plus de 50 000 personnes et qui a fait plus de 116 000 blessés – 60 % étaient des femmes, des enfants et des personnes âgées ».

Tous les démocrates siégeant au sein de la commission et le sénateur Rand Paul, représentant républicain du Kentucky, ont voté en faveur de l’amendement de Sanders. Ceux qui s’y sont opposés ont déclaré que cet amendement et d’autres s’apparentaient à une pilule empoisonnée.
« Soutenir ces amendements, c’est tenter de mettre à mort ce projet de loi qui vise pourtant à protéger les étudiants juifs des actes antisémites », a déclaré le sénateur Bill Cassidy, le représentant républicain de Louisiane qui préside la commission, au cours de la réunion. « Le projet de loi inclut des protections pour la liberté d’expression, alors ne soyons pas naïfs s’agissant de ce qui se passe ici ».
En réponse, Sanders a déclaré que « l’antisémitisme est un problème. L’autoritarisme n’est pas la solution. C’est ce dont nous débattons en ce moment ».
L’Antisemitism Awareness Act avait été adoptée par la Chambre des représentants l’année dernière, mais la loi est restée bloquée au Sénat – avec des inquiétudes qu’elle n’en vienne à sanctionner les discours politiques à l’encontre d’Israël. Certains républicains, dont Paul, ont également critiqué la définition de la loi sur la sensibilisation à l’antisémitisme dans la mesure où elle considère comme antisémite la croyance selon laquelle les Juifs ont tué Jésus.
« Ce projet de loi soumettrait à des sanctions les discours affirmant que les Juifs ont tué Jésus », a expliqué Paul lors de l’audience.
Il a qualifié l’accusation de déicide « d’insinuation absurde et insultante, si l’argument est que tous les Juifs sont responsables de la mort de Jésus », mais il a ajouté : « Et pourtant, l’Évangile de Jean décrit le procès et la crucifixion de Jésus. Il rapporte que les Juifs présents au procès, y compris le grand prêtre et la foule, ont réclamé sa crucifixion ».
« Personne ne pense qu’il s’agit de tous les Juifs – mais vous n’avez plus le droit de lire l’évangile de Jean, 18 et 19. C’est un peu fou ».
Paul a également déclaré qu’il s’opposait au projet de loi pour toute une série d’autres raisons, notamment parce qu’il craignait qu’il ne vise les humoristes. Il a cité Jerry Seinfeld en exemple.
« Avez-vous déjà écouté des comédiens ? Savez-vous pourquoi Jerry Seinfeld ne veut pas aller dans les universités ? Parce qu’il ne peut plus faire de blagues sur les Juifs, sur les Indiens ou sur d’autres sujets. Des blagues qui portent sur des catégorisations stupides de personnes », a indiqué Rand.
Il a versé à son dossier une liste des noms de 400 humoristes juifs américains qui, selon lui, ont fait référence aux Juifs de manière stéréotypée et qui, d’après lui, pourraient être visés par le projet de loi.

Deux autres amendements de Sanders ont également été approuvés par la commission – l’un d’entre eux stipule que le gouvernement fédéral ne peut pas obliger les écoles à violer les droits garantis aux étudiants ou aux professeurs par le premier amendement. Cette directive pourrait avoir un impact sur les mesures de répression mises en place par l’administration Trump à l’encontre des étudiants activistes pro-palestiniens.
« Nous avons d’ores et déjà été les témoins d’attaques successives à l’encontre de la liberté d’expression et du droit à la contestation. Cet amendement défend la Constitution des États-Unis et notre premier amendement », a expliqué Sanders. Il a été adopté par 13 voix contre 10 – soit tous les démocrates présents en plus de Paul et de la sénatrice Susan Collins, représentante républicaine du Maine, qui ont tous voté en sa faveur.
Un autre amendement de Sanders protège les étudiants qui distribuent des tracts sur les campus, qui organisent des manifestations approuvées par les écoles et qui s’engagent dans « tous les discours – à l’exception des véritables menaces ou des incitations à la violence », selon le Jewish Insider. Il a été approuvé par tous les démocrates de la commission, ainsi que par Paul et Collins.
Un quatrième amendement au projet de loi a été proposé par le sénateur Ed Markey, démocrate du Massachusetts, qui s’est opposé aux récentes révocations de visas d’étudiants de l’administration Trump, ainsi qu’au placement en détention et aux expulsions d’étudiants et de professeurs d’universités pour des activités par ailleurs protégées par le premier amendement. Il a été approuvée par tous les démocrates, avec le renfort de Paul.