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Le « signal d’alarme » de Moody’s : la Bourse de Tel Aviv craint une crise financière

La Bourse de Tel Aviv demande aux autorités de tenir compte de l'avertissement de l'agence de notation et de regagner la confiance pour éviter une dégradation de la note

Sharon Wrobel est journaliste spécialisée dans les technologies pour le Times of Israel.

Vue de la bourse de Tel Aviv, le 25 décembre 2018. (Crédit : Adam Shuldman/Flash90)
Vue de la bourse de Tel Aviv, le 25 décembre 2018. (Crédit : Adam Shuldman/Flash90)

Le directeur de la bourse israélienne a demandé, mercredi, au gouvernement de revenir à la raison, faute de quoi les agences de notation dégraderont la note donnée à Israël et le pays connaitra une crise financière.

Au lendemain de la mise en garde de Moody’s Investors Service contre les « conséquences négatives » et le « risque important » pour l’économie israélienne de l’adoption de la première loi de réforme judiciaire, Ittai Ben-Zeev, directeur général de la Bourse de Tel Aviv, en a appelé au Premier ministre Benjamin Netanyahu et au ministre des Finances, Bezalel Smotrich.

« Parlez avec Moody’s et d’autres maisons de notation, et faites ce qu’il faut pour empêcher une dégradation de la note qui serait destructrice pour tout ce qui a été fait avec tant d’efforts et de talent depuis toutes ces années », a déclaré Ben-Zeev par voie de communiqué. « Les mesures économiques ultérieures ne sont d’aucune utilité si notre note est abaissée. »

« Si rien n’est fait très rapidement, alors malheureusement, c’est ce qui arrivera, avec toutes les conséquences que cela apporte », a-t-il averti.

Les principales agences de notation se sont jusqu’à présent abstenues de dégrader la note d’Israël, dans l’attente des résultats des négociations en vue de parvenir à un compromis entre le gouvernement et l’opposition et sur la promesse de Netanyahu que le programme de refonte judiciaire n’avance plus.

Cela fait des mois que les députés favorables à la refonte du système judiciaire israélien en dehors de tout consensus ignorent les avertissements des agences de notation, du gouverneur de la Banque d’Israël, d’économistes reconnus et d’investisseurs du secteur des nouvelles technologies sur les dégâts économiques et sociaux irréversibles qui se profilent à l’horizon.

Capture d’écran de la vidéo d’Ittai Ben-Zeev, directeur général de la Bourse de Tel Aviv (Crédit : Capture d’écran Youtube)

Netanyahu et Smotrich ont publié une déclaration commune, mardi, minimisant la portée des informations de Moody’s et parlant de « situation temporaire », suite à l’adoption cette semaine de la loi limitant l’emploi de la notion de caractère raisonnable, en dépit des manifestations publiques de masse, et ajoutant qu’une fois « la poussière retombée, on verra bien que l’économie d’Israël reste très forte ».

Pour rassurer les agences de notation, Netanyahu et Smotrich ont déclaré que l’économie d’Israël se portait bien et « continuerait à croître, sous l’autorité d’un gouvernement expérimenté et d’une politique économique responsable ».

Ben-Zeev a réagi en insistant sur le fait que le rapport de Moody’s était un « signal d’alarme » pour le gouvernement israélien : s’il ne rétablit pas rapidement la confiance, il fera face à une « crise financière à la britannique ».

En avril dernier déjà, Moody’s avait abaissé la note d’Israël de « positive » à « stable », évoquant une « détérioration de la gouvernance d’Israël » et des bouleversements liés à la tentative du gouvernement de remanier radicalement le système judiciaire, ajoutant que la note pourrait « être de nouveau abaissée si les tensions donnaient lieu à une crise politique et sociale prolongée ».

« Les projets du gouvernement sont de nature à entamer considérablement l’indépendance du pouvoir judiciaire et à perturber le système de contre-pouvoirs, essentiel à des institutions fortes », explique Moody’s dans son rapport publié mardi.

« L’attitude des pouvoirs exécutif et législatif est aujourd’hui moins facilement prévisible, de sorte à générer des risques importants pour la stabilité économique et sociale. »

Moody’s a ajouté que certaines de ses inquiétudes passées, notamment celles concernant l’impact des réformes économiques, commençaient à se matérialiser, que ce soit la baisse des investissements en capital-risque au premier semestre ou le fait que 80 % des startups israéliennes nouvellement créées aient choisi de s’immatriculer à l’étranger dans le même temps.

Des travailleurs du secteur de la technologie manifestent à Tel-Aviv pour protester contre la réforme du système judiciaire prévue par le gouvernement, le 31 janvier 2023. (Crédit : Tomer Neuberg/ Flash90)

Moody’s a maintenu la note favorable d’Israël au niveau A1 assortie de perspectives de croissance économique de l’ordre de 3 % en 2023 et 2024, tout en soulignant que ses prévisions « n’intégraient pas les effets négatifs de tensions sociales et politiques prolongées ».

« Moody’s est un organisme international objectif et neutre qui dit sans ambages que, même si notre économie est forte, notre pays est sur une mauvaise pente, avec un vrai risque de dégâts économiques importants pour l’ensemble de la population israélienne », a ajouté Ben-Zeev. « C’est l’image que donne l’économie d’Israël au monde, il faut en être conscient. »

Mardi toujours, la banque d’investissement américaine Morgan Stanley a abaissé les perspectives de crédit souverain à Israël au « niveau d’aversion » justifié par « une incertitude de plus en plus forte sur les perspectives économiques des mois à venir ».

Dans une note, la banque américaine Citi a fait savoir à ses clients institutionnels que l’environnement israélien était « nettement plus délicat et dangereux » suite à l’adoption par le gouvernement d’une loi empêchant les tribunaux d’exercer un contrôle judiciaire sur le « caractère raisonnable » de ses décisions, et conseillant aux investisseurs de reporter leurs décisions d’investissement.

D’autres agences de notation, parmi lesquelles Standard & Poor’s, parlent depuis des mois du risque de détérioration de la gouvernance israélienne et de l’affaiblissement du pouvoir judiciaire et des institutions du pays, et ont fait part de leurs inquiétudes face aux tensions sociales et politiques.

L’incertitude politique autour de la refonte judiciaire voulue par le gouvernement a déjà eu pour conséquence shekel l’affaiblissement du shekel de 10 % par rapport au dollar américain depuis janvier.

Le gouverneur de la Banque d’Israël Amir Yaron s’exprimant lors d’une conférence de presse à Jérusalem, le 11 avril 2022. (Crédit : Flash90)

La détermination de la coalition à poursuivre son projet de réforme judiciaire en dépit des manifestations de masse et des tensions sociales a amené le gouverneur de la Banque d’Israël, Amir Yaron, à signaler ce mois-ci qu’une nouvelle dépréciation du shekel augmentait le prix des biens importés tels que la nourriture, le gaz et les voyages à l’étranger et entraîne une hausse de l’inflation. Yaron a indiqué que la faiblesse de la monnaie locale avait entraîné une inflation « excédentaire » d’au moins 1 % à 1,5 %, tout en précisant que si la tendance se poursuivait, la banque centrale serait obligée d’augmenter les coûts d’emprunt afin de freiner la hausse des prix.

Il a expliqué que les projets du gouvernement avaient pour effet de relever le niveau d’incertitude au sein de l’économie israélienne, comme en témoigne la sous-performance du marché boursier israélien par rapport aux marchés mondiaux depuis quelques mois.

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