Liberman porte plainte contre Yitzhak Yosef pour avoir encouragé la désertion
Le chef d'Yisrael Beytenu accuse l'ex-Grand Rabbin séfarade et d'autres rabbins influents d'avoir enfreint la loi en exhortant les Haredim à ignorer les ordres de conscription

Le chef du parti Yisrael Beytenu, Avigdor Liberman, a porté plainte contre l’ancien Grand Rabbin séfarade Yitzhak Yosef et contre d’autres hauts dirigeants ultra-orthodoxes – ou haredim – qui ont publiquement appelé les étudiants en yeshiva à ignorer les ordres d’enrôlement de l’armée israélienne, en violation manifeste de la loi.
Interrogé lundi par le Times of Israel, Liberman a indiqué qu’il s’était adressé à deux reprises au bureau de la procureure générale et à la police israélienne pour demander que la loi soit appliquée à l’encontre des rabbins de haut rang, mais qu’il n’avait pas encore reçu de réponse.
« Si nous n’obtenons pas de réponse à la deuxième lettre, nous saisirons la Cour suprême », a-t-il déclaré lors d’une conférence de presse avant la réunion hebdomadaire de son parti à la Knesset.
En vertu de la loi israélienne, toute personne incitant autrui à se soustraire au service militaire en temps de guerre est passible d’une peine d’emprisonnement de quinze ans.
Dans une lettre envoyée au mois d’avril à la procureure générale Gali Baharav-Miara, au ministre de la Défense Israel Katz, au ministre de la Justice Yariv Levin ainsi qu’à de hauts responsables de la police, les avocats de Liberman ont appelé les autorités à faire appliquer la loi à l’encontre de Yosef et du rabbin Dov Lando, président du Conseil des Sages de la Torah au sein de la faction Degel HaTorah, ainsi qu’à l’encontre d’autres rabbins haredim influents.
Depuis la décision de la Haute Cour qui a mis fin à l’exemption de service des Haredim étudiant en yeshiva au mois de juin, plusieurs rabbins influents ont activement découragé leurs disciples de se conformer aux ordres de conscription, tant par des déclarations publiques que par de multiples initiatives visant à guider la communauté ultra-orthodoxe dans sa nouvelle réalité post-exemption.

Âgé de 94 ans, Lando est le chef spirituel lituanien de l’ultra-orthodoxie. Il a publiquement appelé les étudiants en yeshiva à ignorer les ordres de conscription de l’armée israélienne, écrivant qu’ils « ne devaient pas se présenter au bureau de recrutement » après avoir reçu leur convocation.
Lando est également membre du conseil d’administration du « Vaad HaYeshivot » (Comité des Yeshivot) et il est lié à l’organisation « Lemaancha » (Pour ton bien). Ces deux lignes d’assistance téléphonique conseillent aux étudiants des yeshivot d’ignorer les ordres de conscription.
Yosef a également demandé aux étudiants en yeshiva de déchirer ces ordres et de les « jeter dans les toilettes ». Il a également récemment averti que si le gouvernement arrêtait des étudiants en yeshiva pour avoir fui la conscription, la communauté ultra-orthodoxe serait contrainte de quitter Israël.
Alors que l’encouragement rabbinique à la désertion « constitue une infraction grave » qui « porte directement atteinte à la sécurité d’Israël », les autorités semblent « ne pas juger opportun de l’empêcher », affirme la lettre de Liberman, qui ajoute que le non-respect de la loi a donné naissance à « un groupe de dirigeants publics qui bénéficient d’une protection contre les menaces du droit pénal, alors que leurs activités flagrantes portent préjudice à la majorité de la population israélienne ».
En outre, un porte-parole de Liberman a envoyé au Times of Israel une copie d’un document officiel de la police daté du 7 mai 2025, confirmant avoir reçu une plainte pénale à ce sujet.
Affirmant que « la preuve est très simple », Liberman a déclaré lundi au Times of Israel qu’il était « surpris que le ministère de la Justice, la police israélienne et Tsahal n’agissent pas conformément à la loi ».
« On ne peut pas dire qu’il manque 10 000 soldats et ne prendre aucune mesure coercitive à l’encontre des déserteurs et des objecteurs de conscience », a-t-il ajouté.
Tsahal a indiqué avoir besoin de 12 000 nouveaux soldats pour répondre aux besoins en effectifs dans le cadre de la guerre en cours, dont 7 000 qui serviraient dans des unités de combat.

Actuellement, environ 80 000 Haredim âgés de 18 à 24 ans sont éligibles au service militaire et ne se sont pas enrôlés. Depuis juillet 2024, l’armée a envoyé 18 915 tzav rishon – ou premier ordre de conscription – aux membres de la communauté ultra-orthodoxe en plusieurs vagues, mais fin avril, seuls 232 d’entre eux s’étaient enrôlés, dont 57 dans des unités de combat.
Une application inégale
Alors que Liberman accusait les forces de l’ordre de ne pas sévir contre ceux qui encouragent la désertion, Yaïr Lapid, le chef de l’opposition, a menacé cette semaine de saisir la Cour suprême pour ce qu’il a qualifié d’incapacité du gouvernement à faire respecter la loi contre les réfractaires au service militaire.
Dans une lettre adressée dimanche au ministre de la Défense Katz, Lapid a affirmé que Tsahal avait « renoncé à appliquer les ordres de conscription émis à l’encontre des jeunes hommes haredim » en raison de « l’implication personnelle et illégale de personnalités politiques qui se sont ingérées dans le travail de la police militaire ».

La semaine dernière, l’armée a annoncé avoir lancé une campagne « de routine » de la police militaire visant à arrêter les personnes qui ignorent les ordres d’enrôlement, ce qui a suscité des menaces d’abandon de la coalition de la part des partenaires ultra-orthodoxes du Premier ministre Benjamin Netanyahu. Cependant, il ne semble pas qu’il y ait eu d’arrestations de Haredim au cours de cette opération.
Dans sa lettre, Lapid exigeait des informations détaillées sur le nombre de déserteurs haredim, sur le nombre d’arrestations au sein de la communauté, sur la manière dont l’armée faisait respecter ses ordres de conscription à l’égard des hommes de la société ultra-orthodoxe en âge de servir, ainsi que sur toute intervention de Katz ou d’autres acteurs politiques dans ce processus.
À moins que Katz ne puisse répondre à ses questions et démontrer l’absence d’application sélective de la loi, Lapid a écrit qu’il se tournerait vers la Haute Cour pour régler cette question.
Interrogé sur sa propre menace de porter plainte contre les lignes d’assistance téléphonique encourageant la désertion, Lapid a répondu lundi qu’il ne l’avait pas encore fait, mais que le délai dans lequel il comptait agir était « très court ».

« Nous continuons à suivre cette [question] et nous n’avons pas encore reçu de réponse des autorités. Tant que ce ne sera pas le cas, nous ne pourrons pas fonctionner, mais nous le ferons, car l’idée que… au sein de la coalition, certaines personnes aient décidé que la loi ne les concernait pas est insupportable pour tout le monde », a déclaré Lapid lors de la réunion hebdomadaire de son parti à la Knesset.
Interrogé au début du mois par le Times of Israel sur l’écosystème croissant de groupes (dont un lié au ministre des Affaires de Jérusalem Meïr Porush) qui gèrent des hotlines conseillant les appelants haredim sur la manière de répondre aux ordres d’enrôlement, Lapid a établi que si le bureau de la procureure générale ne prenait pas rapidement des mesures, son parti se tournerait vers la police.
Le député Vladimir Beliak (Yesh Atid) a soumis une question à ce sujet au bureau de la procureure générale à la mi-février. « Et nous attendons une action rapide et décisive de la part de la procureure générale et du système judiciaire », avait alors déclaré Lapid.
« Sinon, Yesh Atid portera plainte auprès de la police. À première vue, il s’agit d’infractions pénales, et les personnes qui les commettent doivent être traitées comme des criminels. »
La police israélienne et la procureure générale semblent avoir échoué à réprimer ces groupes, malgré les demandes d’enquête formulées par des groupes de défense des droits et par des parlementaires. Toute personne incitant d’autres personnes à se soustraire au service en temps de guerre est passible d’une peine de quinze ans de prison en vertu de la loi.