Limor Son Har-Melech: Les juges qui poursuivent les soldats seront « poursuivis comme des traîtres »
Ces menaces font suite à l’arrestation de 9 soldats soupçonnés de sévices sur un terroriste présumé; le ministre de la Justice rappelle qu'il faut limiter "l'excès de pouvoir" du système judiciaire
Dans une sombre menace adressée aux responsables judiciaires, la députée d’extrême droite Limor Son Har-Melech a déclaré jeudi que toute personne qui poursuivrait des soldats israéliens pour des actes criminels présumés commis pendant la guerre menée contre le groupe terroriste palestinien du Hamas à Gaza serait elle-même « inculpée et poursuivie comme le pire des traîtres ».
Huit réservistes, soupçonnés d’avoir abusé sexuellement d’un détenu de Gaza, sont toujours en détention. Lundi, neuf réservistes ont été arrêtés par des inspecteurs masqués de la police militaire sur la base de Sde Teiman, dans le sud d’Israël.
Après les arrestations, une foule de militants et de députés d’extrême droite a fait irruption dans la base et a manifesté, puis a pris d’assaut la base de Beit Lid où les suspects étaient détenus et interrogés.
Lors d’un rassemblement de droite en soutien aux soldats arrêtés, jeudi soir, qui semblait inclure plusieurs dizaines de manifestants, Son Har-Melech a déclaré qu’elle était là pour « protéger nos soldats » de l’avocat militaire générale, la général Yifat Tomer-Yerushalmi.
« Nos soldats ont des ennemis à l’étranger qui doivent être combattus, mais aussi des ennemis à l’intérieur du pays », a-t-elle déclaré. « Quiconque ose porter la main sur nos soldats sera inculpé et poursuivi comme le pire des traîtres. »
Ses déclarations ont été acclamées par la foule et des appels à envoyer Tomer-Yerushalmi en prison ont été lancés.
Selon l’armée israélienne, les soldats sont soupçonnés de sodomie aggravée (une accusation équivalente au viol), d’avoir causé des lésions corporelles dans des circonstances aggravées, d’abus dans des circonstances aggravées et de conduite indigne d’un soldat. L’enquête sur les soldats a été lancée après qu’une personne soupçonnée de terrorisme a été amenée de Sde Teiman à l’hôpital avec des signes de sévices graves, y compris à l’anus. Il avait été arrêté par Tsahal dans la bande de Gaza il y a plusieurs semaines.
Son Har-Melech n’a pas été la seule députée d’extrême droite à apporter son soutien aux soldats. Un certain nombre de députés et même de ministres du gouvernement ont pris part aux émeutes sur les bases de Tsahal en début de semaine.
Levin relance l’appel à la refonte du système judiciaire
Par ailleurs, le ministre de la justice, Yariv Levin, a suscité la controverse en déclarant que le très litigieux programme de refonte du système judiciaire du gouvernement initialement annoncé en janvier 2023 visant à radicalement modifier le système juridique, qu’il avait tenté de faire adopter par la Knesset l’année dernière jusqu’au pogrom perpétré par le groupe terroriste palestinien du Hamas le 7 octobre dans le sud d’Israël, devait être réintroduit et qu’un « changement fondamental » était nécessaire dans le système judiciaire.
Lors d’une conférence organisée par le mouvement Tekuma (droite dure), Levin a déclaré que la nécessité d’un tel changement était apparue très clairement ces derniers jours, dans une ostensible allusion à l’arrestation des soldats.
Levin a également affirmé que la nécessité d’une refonte du système judiciaire était particulièrement évidente en ce qui concerne les nominations à des postes de haut niveau. Il a parlé de la nécessité d’affaiblir ce qu’il a qualifié « d’excès de pouvoir » du pouvoir judiciaire, vraisemblablement en référence aux places vacantes à la Cour suprême qu’il avait refusé de pourvoir depuis l’année dernière, faute d’une majorité pour les candidats qu’il préférait au sein de la commission de sélection des juges.
« Actuellement, il est juste de faire un effort pour agir dans ce domaine avec un consensus aussi large que possible », a-t-il poursuivi, dénonçant les efforts visant à « imposer des nominations et des décisions, tout en abusant de l’excès de pouvoir dont dispose aujourd’hui le système judiciaire ».
« Cela ne correspond pas à une démocratie, et ce n’est pas le devoir de responsabilité qui s’impose en temps de guerre. Beaucoup de gens comprennent mieux aujourd’hui la nécessité d’un changement profond dans le système judiciaire, et l’obligation de l’ouvrir à toutes les communautés de la société israélienne », a-t-il déclaré.
Le programme de refonte du système judiciaire proposé par Levin avait fait éclater de profonds clivages au sein de la société israélienne et avait donné lieu à des manifestations de masse hebdomadaire contre le gouvernement.
Ce projet de réforme a été suspendu depuis le 7 octobre, après avoir fortement divisé la société israélienne l’année dernière, et il est peu probable que le gouvernement le reprenne de sitôt, étant, de fait, concentré sur les conflits militaires à Gaza et au Liban.