Marjorie Taylor Greene et Rashida Tlaib votent « Présent » sur une résolution condamnant l’antisémitisme
Elles sont les seules représentantes à ne pas avoir voté en faveur d'une résolution bipartisane condamnant "la recrudescence des attaques idéologiques contre les Juifs" après l'attaque survenue dans le Colorado

(JTA) — Personne n’a voté en défaveur d’une résolution qui condamnait la recrudescence des crimes de haine commis à l’encontre des Juifs américains lorsqu’elle a été présentée, lundi dans la soirée, devant la Chambre des représentants des États-Unis.
Deux membres du Congrès, deux femmes, ont toutefois refusé de voter « Pour ».
La représentante Marjorie Taylor Greene, représentante républicaine de l’état de Géorgie, et la représentante Rashida Tlaib, représentante démocrate du Michigan, ont les toutes deux voté « Présent » en ce qui concerne la résolution qui a été présentée à la suite de l’attaque qui a visé des Juifs à Boulder, dans le Colorado, et du double homicide antisémite qui a eu lieu à Washington, DC.
Les deux femmes, qui ont toutes les deux été accusées d’antisémitisme par le passé, ont fait savoir qu’elles n’étaient pas en mesure de soutenir la résolution en raison, selon elles, du manque d’attention porté par le Congrès à l’égard d’autres groupes qui sont confrontés, ont-elles dit, à des menaces mortelles.
La résolution qu’elles ont refusé de soutenir était bipartisane. Elle s’appelait « Condamnation de la recrudescence des attaques à caractère idéologique contre des personnes juives aux États-Unis, avec notamment la récente agression violente à Boulder, dans le Colorado, et réaffirmation de l’engagement pris par la Chambre des représentants à lutter contre l’antisémitisme et contre les violences à motivation politique ».
Une deuxième résolution sur le même sujet qui a été soumise au vote, dans la journée de lundi, a été présentée par un député républicain et elle a entraîné les critiques de certains groupes juifs libéraux qui lui ont reproché d’utiliser la problématique de l’antisémitisme comme prétexte pour promouvoir un programme anti-immigrés. La résolution, qui exprimait sa gratitude à l’égard des services d’immigration a également été adoptée – mais avec beaucoup moins de soutien : 113 démocrates, dont Tlaib, ont voté « Contre », contre 75 qui ont voté « Pour ». Six législateurs – avec parmi eux Greene – se sont abstenus.
Certains démocrates ayant voté en faveur de la deuxième résolution ont déclaré s’être exprimés avec des réserves. « J’ai voté aujourd’hui pour la résolution qui condamnait l’attaque antisémite de Boulder, dans le Colorado, qui est survenue la semaine dernière – même si j’ai été profondément déçu que le texte ne condamne pas l’antisémitisme lui-même », a indiqué Steny Hoyer, le représentant du Maryland, dans un communiqué.
D’autres ont expliqué qu’ils n’avaient tout simplement pas pu se résoudre à voter « Pour ». « Je condamne sans équivoque l’attaque de Boulder et la montée alarmante de l’antisémitisme », a commenté la représentante du Colorado, Diana DeGette. « Je n’ai pas pu toutefois apporter mon soutien à la résolution de ce soir qui a instrumentalisé cet incident pour diaboliser les migrants, pour mettre les services de l’immigration sur le devant de la scène et qui a passé sous silence les inquiétudes réelles qui sont celles des Juifs américains ».

Greene qui, pour sa part, s’est abstenue lors des deux votes, a déclaré qu’elle avait refusé de soutenir la première résolution dans la mesure où elle n’approuvait pas l’attention disproportionnée qui est accordée aux menaces qui pèsent sur les Juifs. Elle a souligné que les textes qui ont été adoptés lundi étaient les 20e et 21e résolutions dénonçant la haine antijuive sur lesquelles elle a voté depuis son entrée en fonction en 2021. Elle a par ailleurs laissé entendre que le soutien apporté par le Congrès aux Juifs et à Israël alimentait l’antisémitisme aux États-Unis.
« Les crimes antisémites sont condamnables, mais tous les crimes de haine le sont également. Pourtant, le Congrès ne vote jamais sur les crimes de haine qui prennent pour cible les Blancs, les chrétiens, les hommes, les sans-abri ou d’innombrables autres », a-t-elle écrit sur Twitter. « Des Américains de toutes origines sont assassinés, même dans le ventre de leur mère, et le Congrès garde le silence. Nous ne votons pas d’interminables résolutions pour les défendre ».
Greene a ajouté que « accorder la priorité à un groupe d’Américains et/ou à un pays étranger plutôt qu’à notre propre population alimente le ressentiment et attise les divisions, notamment l’antisémitisme. Ces crimes sont horribles et c’est facile de les dénoncer pour moi. Mais pour les raisons que je viens d’exposer, j’ai voté ‘Présent’. »
Tlaib, pour sa part, a dénoncé les deux résolutions qui, selon elle, ont été « des tentatives de la part des républicains qui vont visé à politiser, avec cynisme, des actes de violence tragiques — comme la récente attaque horrible à Boulder — dans le but de diaboliser les communautés immigrées, de rendre hommage aux services de l’immigration et d’ouvrir la voie à une répression accrue de nos droits constitutionnels à la liberté d’expression et au droit à manifester en faveur de la vie et des droits humains des Palestiniens. »
Elle a souligné que le Congrès n’avait pas adopté de résolution quand Wadea al-Fayoume, un petit ressortissant américano-palestinien de 6 ans qui vivait près de Chicago, avait été assassiné, ni quand trois étudiants palestiniens avaient été abattus dans le Vermont.
« Je m’oppose à l’antisémitisme avec fermeté. Et je soutiens fermement une Palestine libre », a affirmé Tlaib dans un communiqué. « Ces valeurs ne sont pas contradictoires. Notre lutte contre l’antisémitisme est liée à notre lutte contre l’islamophobie, à notre lutte contre le racisme anti-Noirs, à notre lutte contre le nationalisme blanc et contre l’oppression sous toutes ses formes. Nous devons continuer à nous exprimer pour un monde enfin exempt de déshumanisation et de violence ».
Tlaib avait été officiellement sanctionnée par ses collègues en 2023 pour avoir utilisé l’expression « Du fleuve jusqu’à la mer » sur les réseaux sociaux. Une expression qui est très répandue dans les mouvements pro-palestiniens et anti-israéliens, et qui est considérée par de nombreux membres de la communauté juive et par de nombreux groupes juifs comme un appel antisémite à la destruction d’Israël.
Greene a également été critiquée par ses pairs et par des groupes juifs pour avoir invoqué des théories antisémites du complot. L’année dernière, elle avait voté contre un projet de loi qui aurait codifié une définition de l’antisémitisme, affirmant qu’elle criminaliserait « l’évangile » qui affirme que « les Juifs » ont livré Jésus à ses bourreaux.