Merav Michaeli accuse Lapid d’être responsable de la disparition de la gauche
La représentation de la gauche passe de 13 à 4 sièges à la 25e Knesset ; "le principal parti du bloc a mené une campagne irresponsable" estime la cheffe travailliste
Carrie Keller-Lynn est la correspondante politique et juridique du Times of Israël.

Peu après que le parti de gauche Meretz a été éliminé de la Knesset pour la première fois en 30 ans d’histoire jeudi, la cheffe du parti Avoda de centre-gauche, Merav Michaeli, a rejeté la responsabilité de cette élection « difficile », qui a vu son parti réduit à quatre sièges, sur le Premier ministre Yair Lapid.
« Lapid, qui s’est vanté l’année dernière d’avoir sauvé Meretz, a mené une campagne appelant à voter pour le plus grand parti – ce qui a fait basculer et conduit à l’élimination de Meretz. C’est aussi ce qui a presque anéanti Avoda », a déclaré Michaeli, qui dirige ce qui est maintenant la plus petite faction de la Knesset, lors d’une conférence de presse à Tel Aviv.
« Le principal parti du bloc a mené une campagne irresponsable », a-t-elle ajouté à propos de Lapid et de son parti centriste Yesh Atid, qui a obtenu 24 sièges, juste derrière le Likud – qui en a obtenu 32.
L’indignation de Michaeli est intervenue en dépit du fait qu’elle avait catégoriquement refusé de s’allier avec le « parti frère » Meretz pour une campagne commune lors des élections de mardi, arguant que les deux partis étaient suffisamment forts pour réussir par leurs propres moyens et qu’il n’appartenait pas à Avoda de « sauver » Meretz. Une telle alliance aurait sans aucun doute permis aux deux partis d’obtenir plus de sièges que les quatre sièges obtenus par le parti Avoda.
Si Meretz n’intégrera pas la 25e Knesset d’Israël, Michaeli et Lapid seront tous deux dans l’opposition. Le bloc de Netanyahu (droite, religieux et extrême droite) a obtenu 64 sièges, ce qui est suffisant pour former une coalition majoritaire dans la Knesset qui compte 120 sièges au total.
Bien que Michaeli ait rejeté la faute sur Lapid, certains membres de son parti ne semblaient pas convaincus. En réponse partielle aux appels lancés au sein du parti Avoda pour que Michaeli soit remplacée, à la lumière des mauvais résultats électoraux et de l’erreur stratégique d’éviter une candidature commune avec Meretz, Michaeli a déclaré que le parti « envisagerait d’avancer les primaires ».

« De même que j’ai eu la responsabilité de sauver le parti Avoda lors de l’élection précédente » – lorsque Michaeli a été créditée d’insuffler une nouvelle vie à un parti dont le score était inférieur au seuil – « j’assume ma part de responsabilité dans ses mauvais résultats cette fois-ci », a-t-elle déclaré.
Mais tous les membres de son parti ne considèrent pas que Michaeli porte l’entière responsabilité de l’effondrement de la gauche, qui est passée de 13 sièges entre le parti Avoda et le parti Meretz dans la Knesset sortante, à 4 dans celle qui sera prochainement investie.
« Les dirigeants font des erreurs. Un leader doit assumer ses responsabilités et ne pas blâmer les autres », a tweeté Yair Fink, numéro 7 de la liste du parti Avoda. « Je ne suis peut-être que septième, mais si les autres ne le disent pas, je le ferais : nous avons fait une erreur en ne sauvant pas Meretz, et j’en suis désolé. »
« Chacun d’entre nous avait un rôle à jouer dans la bataille. Le mien était de garder le parti Avoda en sécurité », a déclaré Michaeli.
La dirigeante travailliste a également essuyé des critiques au sein de son parti pour ne pas avoir mis en avant sa position précaire, dans le cadre de la stratégie traditionnelle du « gevalt » politique israélien – qui consiste à crier au malheur – destinée à obtenir davantage de voix.

Cette tactique est couramment employée par les politiciens – y compris lors de cette élection par Meretz, le Likud, le parti majoritairement arabe Hadash-Taal, et le nationaliste arabe Balad – pour mobiliser les électeurs.
« Nous nous sommes souciés de Meretz, c’est pourquoi j’ai refusé une campagne gevalt », a déclaré Michaeli jeudi. « Dans cette salle, il y avait une pression pour que j’emploie une tactique gevalt ce que j’ai refusé car il était clair pour moi que cela aurait pu nuire à Meretz », avec l’implication qu’Avoda éloignerait ses électeurs loin de leur partenaire de gauche.
Lapid n’a pas encore commenté les allégations de Michaeli et une demande de réponse de son bureau a été refusée. Les politiciens de son parti Yesh Atid, cependant, se sont empressés d’attaquer la cheffe Avoda pour avoir fait porter le chapeau à leur parti.
La ministre de l’Énergie, Karin Elharrar, a tweeté qu' »être une femme forte, c’est admettre ses erreurs », peu après la diffusion de la déclaration de Michaeli.
« Lors des élections, les électeurs votent pour vous ou ne votent pas pour vous, en fonction de leur point de vue. Yesh Atid n’a pas travaillé contre Michaeli. Nous avons agi contre le bloc de Netanyahu », a tweeté le député du parti, Vladimir Beliak, qui a également jugé « arrogant » son refus de se lier à Meretz et a écrit qu’elle devait « prendre ses responsabilités ».
צריך להסביר למרב מיכאלי מה זה בחירות. (ולא שכחנו את סירובה היהיר לא להתאחד עם מרצ). בבחירות הבוחרים מצביעים עבורך או לא מצביעים עבורך, בהתאם להשקפתם.
יש עתיד לא עבדה נגדה. פעלנו נגד גוש נתניהו. הבוחרים הצביעו יש עתיד כי הם מזדהים עם יש עתיד. כדאי למיכאלי לכבד אותם ולקחת אחריות.— MK Vladimir Beliak ולדימיר בליאק????️ (@VladimirBeliak) November 3, 2022
Des reproches amers ont été adressés au bloc sortant dit « du changement », qui était hétéroclite sur le plan idéologique, mais uni dans le but de chasser Netanyahu du pouvoir pour la première fois en 12 ans.
Peu après l’annonce des sondages de sortie des urnes mardi soir, un responsable de la coalition aurait traité – sous couvert d’anonymat – Lapid de « porc cannibale » pour ne pas avoir renforcé son bloc. Les résultats en temps réel indiquaient que Yesh Atid avait progressé, au détriment de ses partenaires de coalition.
La semaine dernière, Lapid aurait ordonné à ses agents de démarchage de ne pas solliciter les électeurs de Meretz et d’Avoda. Cependant, d’autres erreurs stratégiques ont été imputées au chef du bloc, notamment l’incapacité à rassembler les deux partis et à maintenir la Liste arabe unie, majoritairement arabe, comme rempart contre un bloc dirigé par Netanyahu en pleine expansion, ainsi que la critique selon laquelle il n’a pas suffisamment organisé l’accord sur les votes excédentaires au sein de son bloc et pour Hadash-Taal.