Meridor, Lapid et Bitan fustigent un Netanyahu « prêt à payer n’importe quel prix »
"Il n'est pas raciste, mais il est prêt à causer des dommages à la société israélienne afin de reprendre les fonctions de Premier ministre", a déploré Dan Meridor
L’ancien ministre de la Justice, Dan Meridor, a affirmé lundi que le Premier ministre désigné, Benjamin Netanyahu, place sa propre ambition de pouvoir et de domination au-dessus de tout.
« Il n’est pas raciste, mais il est prêt à causer des dommages à la société israélienne afin de reprendre les fonctions de Premier ministre », a déclaré Meridor au Times of Israel.
L’ancien ministre du Likud a cité les promesses litigieuses faites par Netanyahu dans les accords de coalition, comme un projet de loi qui permettrait aux propriétaires d’entreprises de refuser de servir leurs clients si cela va à l’encontre de leur foi. Netanyahu a déclaré par la suite qu’il ne soutiendrait aucune discrimination de ce type.
« Netanyahu fait ici quelque chose qui ne correspond pas à sa vision du monde, mais il est prêt à payer n’importe quel prix en raison de son objectif de redevenir Premier ministre – et peut-être aussi en lien avec son procès en cours », a suggéré Meridor.
« Si c’était moi, je n’entrerais dans aucune coalition avec des politiciens racistes. J’irais jusqu’à préférer organiser de nouvelles élections plutôt que de former un tel gouvernement. »
Meridor a affirmé que le discours public actuel représente un « changement profond des valeurs de la société israélienne », reprochant à Netanyahu de normaliser la rhétorique et les politiques racistes du leader d’Otzma Yehudit, le député Itamar Ben Gvir.
« Pendant de nombreuses années, les politiciens qui faisaient ce genre de déclarations étaient en dehors du consensus », a ajouté Meridor. « Netanyahu a rompu ce schéma, parce qu’il voulait leurs votes et leur soutien – et maintenant il se joint à [le député HaTzionout HaDatit, Bezalel] Smotrich, qui a déclaré que sa femme ne partagerait pas une chambre d’hôpital avec une femme arabe, et à Ben Gvir, qui parle de l’expulsion des Arabes. »
Meridor ne pense pas que tous les députés du Likud soient d’accord avec de telles mesures, « mais ils restent silencieux ».
Le député du Likud, David Bitan, a également critiqué ses partenaires de coalition du futur gouvernement pour leur comportement lors des négociations de coalition ainsi que pour les commentaires de ces derniers jours.
« Ce n’est pas seulement qu’ils ne se comportent pas comme des adultes, ils se comportent comme des petits enfants », a déclaré Bitan dans une interview sur la chaîne de la Knesset, désignant nommément les députés Smotrich et Ben Gvir.
Les partenaires de la coalition du Likud – les partis HaTzionout HaDatit, Otzma Yehudit, le Shas et Yahadout HaTorah – ont « exploité le fait qu’il n’y avait pas d’alternative, et c’est ce qui s’est effectivement passé », a ajouté Bitan, soulignant les demandes très controversées faites lors des négociations.
Bitan, qui était autrefois le plus ardent défenseur de Netanyahu dans la presse, mais qui s’est récemment opposé à lui, a affirmé que le leader du Likud devait adopter une position ferme à la tête du nouveau gouvernement.
« Netanyahu doit montrer que c’est lui qui commande. Autrement, il souffrira durant toute la durée de son mandat », a déclaré Bitan.
Bitan a affirmé que même ses collègues députés du Likud sont d’accord avec ses critiques « ne s’exprimant pas ». « Ils ont peur de parler, en particulier ceux qui attendent de recevoir un poste ministériel, a-t-il noté.
« Ne pensez-vous pas qu’Amir Ohana aurait dû s’exprimer sur les commentaires au sujet de la communauté LGBT ? Bien sûr qu’il aurait dû », a ajouté Bitan au sujet du seul député ouvertement homosexuel du Likud, faisant référence au tollé provoqué par les commentaires anti-LGBT faits dimanche par deux députés du HaTzionout HaDatit, Orit Strouk et Simcha Rothman.
Le Premier ministre sortant, Yair Lapid, a pour sa part affirmé que les politiques menées par les membres du futur gouvernement constituent un « pillage des valeurs démocratiques ».
« Je me demande qui a eu le plus peur hier, peur de vivre dans ce pays », a-t-il dit au début de la réunion de son parti Yesh Atid à la Knesset.
« Les membres issus de la communauté LGBTQ qui ont entendu de la bouche de Simcha Rothman qu’ils pourraient être interdits d’accès dans certains hôtels ? Les Arabes qui ont appris par Orit Strouk que les médecins pourraient refuser de les soigner ? Les militantes des organisations de femmes qui ont découvert qu’elles figuraient sur les listes noires d’Avi Maoz. Les Juifs réformés et massorti qui ont appris par [le député Meir] Porush qu’ils ne pourront plus accéder au mur Occidental ? Ou encore des hauts responsables du ministère public et de la police qui ont entendu de Yair Netanyahu qu’ils devraient être poursuivis pour trahison, ce qui est un crime passible de la peine de mort ? »
Lapid faisait en partie référence à une demande de la coalition présentée dimanche par les députés du parti HaTzionout HaDatit qui permettrait aux propriétaires d’entreprises et même aux médecins de refuser un service s’il interfère avec leur foi religieuse. Netanyahu a dû préciser à deux reprises qu’il ne permettra pas l’adoption d’une telle loi.
« Ce n’est plus une lutte politique. C’est une bataille pour l’âme de l’État d’Israël en tant qu’État juif, en tant qu’État démocratique, en tant qu’État sain », a-t-il ajouté.
« Si quelqu’un pense que cela va s’arrêter avec la formation du gouvernement, il se trompe complètement », a-t-il précisé.
« Cela ne s’arrêtera jamais. Il n’y a jamais eu – nulle part dans le monde, à n’importe quel moment de l’Histoire – d’extrémistes religieux et nationalistes qui, un jour et de leur propre chef, ont dit ‘c’est bon, ça suffit, on s’arrête' », a ajouté Lapid.
« Cette attaque ne s’arrêtera pas d’elle-même. Ils ne vont pas soudainement tomber amoureux de la démocratie. Ils ne vont pas soudainement voir la lumière et n’arriveront pas à la conclusion qu’ils croient aux valeurs libérales de la déclaration d’Indépendance [d’Israël] », a poursuivi Lapid.
« Ils ne s’arrêteront pas. Si nous ne les arrêtons pas, la situation va empirer. »
« Nous avons vu de nombreux gouvernements se former en Israël. Ce qui se passe ici n’est pas un processus normal », a-t-il ajouté. « Ce que nous voyons aujourd’hui, c’est le Premier ministre le plus faible de tous les temps et un gouvernement de chaos. Ce n’est pas un gouvernement de ‘plein droit’. C’est un gouvernement complètement fou. »
« Nous n’avons pas l’intention de rester assis tranquillement alors qu’ils sont en train de détruire l’État d’Israël de l’intérieur », a conclu Lapid.
« Lapid, perdre les élections ne signe pas la fin de la démocratie. C’est l’essence-même de la démocratie. Vous refusez la décision du peuple », a répondu Netanyahu dans un message vidéo.
« Vous cherchez à monter la population contre une décision qui vient d’elle. Vous n’arrêtez pas de colporter des mensonges contre le gouvernement élu. Qu’allez-vous faire ensuite ? Envoyer vos manifestants escalader les murs de la Knesset ? » a ajouté Netanyahu.
Netanyahu a demandé à Lapid « de se comporter de manière responsable, d’accepter la décision du peuple et de garantir une passation de pouvoir ordonnée, afin que nous puissions réparer tout ce que vous avez détruit ces dix-huit derniers mois ».
Carrie Keller-Lynn et Tal Schneider ont contribué à cet article.