Netanyahu accuse Trump de lui avoir attribué la responsabilité du refus de la paix
Dans ses mémoires, l’ex-Premier ministre explique avoir rallié Trump à la cause israélienne faisant usage d'images liées au golf et autres métaphores
L’ex-Premier ministre Benjamin Netanyahu révèle, dans un livre de mémoires à paraître prochainement, avoir utilisé beaucoup d’images et de vocabulaire sportif pour convaincre le président américain de l’époque, Donald Trump, d’œuvrer en faveur de la paix entre Israël et les États arabes et pour l’amener à reconsidérer la bonne impression qu’il avait de Mahmoud Abbas.
Le journal The Guardian est parvenu à se procurer un exemplaire des mémoires de Netanyahu, Bibi : Mon histoire, un livre qui devrait être publié le 18 octobre prochain.
L’ouvrage révèle énormément de détails sur les relations entretenues par l’ex-Premier ministre avec l’ancien président américain, qui occupaient tous les deux le pouvoir entre 2017 et 2021.
Selon le Guardian, Netanyahu s’attribue une grande partie des réussites politiques qui ont été enregistrées sous le mandat de Trump – avec notamment le transfert de l’ambassade américaine de Tel Aviv à Jérusalem, la reconnaissance de la souveraineté d’Israël sur le plateau du Golan et le retrait de Washington de l’accord nucléaire iranien de 2015.
Il se garde toutefois d’évoquer la politique américaine, le refus de Trump de concéder sa défaite électorale ou encore les émeutes du Capitole du 6 janvier.
Dans cet ouvrage, Netanyahu se souvient également qu’en 2017, lorsque Trump s’était entretenu avec le président israélien de l’époque, Reuven Rivlin, l’occupant de la Maison-Blanche « lui avait dit : ‘Bibi ne veut pas la paix’ ».
Il ajoute que l’ambassadeur d’Israël alors en poste aux États-Unis, Ron Dermer, avait été « sidéré » par les propos de Trump.
« Ce n’était pas : ‘Houston, nous avons un problème’ mais plutôt ‘Houston, c’est vous le problème !’ »
Netanyahu indique avoir souhaité mettre la question palestinienne au second plan pendant toute la durée de son mandat de Premier ministre dans le but de se consacrer à l’établissement de la paix avec les États arabes voisins.
Dans son livre, il confie avoir été déçu par « l’obsession de Trump à l’égard des Palestiniensé ».
En septembre 2020, Israël avait signé les accords d’Abraham, négociés par les États-Unis avec Bahreïn et les Émirats arabes unis, qui avaient établi au grand jour la normalisation des relations avec ces deux États.
Le Maroc avait repris, de son côté, ses relations avec l’État juif, bientôt rejoint par le Soudan – qui, s’il a signé les Accords d’Abraham, est toujours dans l’attente d’une normalisation effective de ses liens avec Israël.
Afin de convaincre Trump que la paix avec les Palestiniens n’était pas réalisable, Netanyahu se rappelle lui avoir montré des cartes illustrant la distance entre Tel Aviv et les lignes de 1967 « dont les Palestiniens exigeaient que nous nous retirions » – des lignes qui déterminent les limites de ce qu’était le territoire d’Israël avant la guerre des Six Jours.
La préférence affichée par Trump pour des informations simples et claires était déjà connue à cette époque – et, d’après son livre, Netanyahu semble avoir opté très vite pour cette approche.
« Sur la même carte, nous avons fait figurer la distance entre la Trump Tower et le pont George Washington. Les deux distances – un peu moins d’une dizaine de kilomètres à vol d’oiseau – étaient identiques », explique Netanyahu.
Selon Netanyahu, Dermer aurait expliqué à Trump les chances de parvenir à la paix avec les Palestiniens en utilisant une métaphore relative au golf, évoquant un « trou-en-un à travers un mur de briques ». Cela ne devait pas être la seule fois : « La paix avec les Émirats était devenue un putt d’un mètre 50 » et « la paix avec les Saoudiens, un putt de 9 mètres ».
« Le président a parfaitement saisi. Il a été, pendant une période tout du moins, dans les meilleures dispositions possibles », dit l’ancien Premier ministre israélien.
Netanyahu se souvient également avoir montré à Trump, avec l’aide de l’ambassadeur de l’époque aux États-Unis, David Friedman, des vidéos dans lesquelles Abbas disait de Trump qu’il était naïf. Sur d’autres images, le chef de l’Autorité palestinienne prétendait être favorable à la paix lorsqu’il s’exprimait en anglais tout en faisant l’éloge des terroristes lorsqu’il s’exprimait en arabe.
« J’ai vu que ces vidéos avaient marqué Trump, au moins sur le moment. » Non !… », se serait exclamé le président américain. « Et c’est la même personne avec laquelle je viens de m’entretenir à Washington ? Il m’avait pourtant donné l’impression d’être quelqu’un de doux et de paisible », se rappelle Netanyahu.
Cet épisode avait déjà fait l’objet d’un premier récit de la part du journaliste américain Bob Woodward, dans le cadre de l’ouvrage publié à propos de l’administration Trump, Rage.
Selon ce livre, le secrétaire d’État américain de l’époque, Rex Tillerson, avait pensé que la vidéo dans laquelle Abbas appelait à assassiner des enfants était un faux – mais Trump, pour sa part, était resté scandalisé, qualifiant Abbas de « menteur » et de « meurtrier ».
Netanyahu évoque également ce qu’il avait fait pour convaincre Trump de se retirer de l’accord conclu avec l’Iran. Il parle notamment d’un raid du Mossad dans un entrepôt à Téhéran, une opération qui avait été l’occasion de saisir « une énorme quantité de matériel ».
Lorsque Netanyahu avait montré une courte vidéo à Trump à la Maison Blanche, en date du 5 mars 2018, une séquence qui dévoilait au président américain ce que les agents israéliens avaient trouvé, « le président a montré du doigt les hauts-responsables présents dans le Bureau ovale en disant : ‘Peut-être avaient-t-ils besoin, eux, de voir ça. Pas moi. J’ai déjà pris la décision de retirer les Etats-Unis de cet accord.’ »
Netanyahu avait présenté au public les éléments découverts au mois d’avril 2018 et, une semaine plus tard, Trump avait officiellement retiré les États-Unis de l’accord sur le nucléaire iranien.