Noël à Haïfa, ou l’hommage à la cuisine arabe
La star de MasterChef Israel réunit Juifs et Arabes autour d’un festival gastronomique
JTA – Comme le veut l’adage, le véritable chemin pour toucher le cœur d’un homme passe par son estomac. Et cette année, pour Noël, la chef Nof Atamna-Ismaeel espère qu’il s’appliquera au cœur de la coexistence israélo-arabe.
Atamna-Ismaeel, une femme de 37 ans née à Baqa al-Gharbiya, une ville majoritairement arabe au nord de Haïfa, a séduit les téléspectateurs de la saison 2014 de MasterChef Israel, avec son mélange créatif de gastronomie moléculaire moderne et de recettes palestiniennes traditionnelles. Elle a été la grande gagnante de la saison, devenant ainsi la première candidate arabe à remporter l’émission. Elle a rapidement jeté son dévolu sur Haïfa, localité idéale pour réunir les communautés musulmanes, juives et chrétiennes d’Israël, autour de la nourriture.
Il y a trois ans, Atamna-Ismaeel a lancé le festival culinaire A-Sham, une fête annuelle autour des saveurs arabes, depuis le kenafeh, une pâtisserie sucrée au fromage jusqu’au kibbeh, une soupe typique. Cette année, le festival, qui a eu lieu du 13 au 15 décembre, a attiré près de 50 00 personnes vers cette ville au centre-ville embourgeoisant.
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« Notre hétérogénéité est notre beauté, et la beauté de la nourriture israélienne en général », a déclaré Atamna-Ismaeel au JTA. « Quand tout le monde est pareil, ce n’est pas intéressant. Et Haïfa est le décor parfait pour cela. »
Haïfa est considéré comme le modèle de la coexistence arabo-israélienne, une ville où Juifs et musulmans travaillent et vivent côte-à-côte. La troisième ville d’Israël célèbre fièrement son patrimoine multiculturel, chaque mois de décembre depuis 1994, quand le Ramadan a coïncidé avec Noël et Hanoukka. Cette année, Beit Hagefen, une organisation culturelle judéo-arabe avait lancé Holidays of holidays, un festival pour célébrer ce tiercé gagnant. Une tradition de Noël était née.
Pendant deux week-ends consécutifs de décembre, Holiday of Holidays installe les guirlandes lumineuses de Noël, les fêtes de rues, les ateliers créatifs au centre-ville de Haïfa, une enclave urbaine récemment rénovée qui embrasse le port de Haïfa, et dans le quartier voisin de Wadi Nisnas, un quartier d’artistes principalement peuplé d’Arabes chrétiens, connu pour son marché haut en couleurs.
Cependant, depuis 2015, le festival A-Sham, dont le nom désigne la région du Levant (qui couvre la Méditerranée orientale) en langue arabe, est la star indiscutable.
« Il y a tellement de bonne nourriture à Haïfa », a déclaré Jessica Halfin, auteur culinaire et culturel, qui vit à Haïfa, et qui y organise des visites gastronomiques. « Le festive A-Sham est une excellente excuse pour que les gens, de toutes origines confondues, puissent faire connaissance avec le spectacle culinaire du centre-ville, tout en essayant quelque chose de nouveaux, des saveurs inattendues dans la cuisine arabe. »
Cette année, Atamna-Ismaeel a convaincu plus de 70 chefs de passer le week-end à cuisiner et à collaborer à Haïfa. En dépit de leurs origines variés, les menus sont restés fidèles au thème de la cuisine et des saveurs propres à la culture du Levant.
Des chefs juifs, musulmans, druzes et chrétiens se sont installés dans les cuisines des restaurants de Haïfa, pour créer un plat spécial. Des affiches lumineuses ont été placardées devant chaque endroit, et les visiteurs affamés, munis de cartes qui permettent de suivre l’itinéraire d’A-Sham, pouvaient acheter et goûter chaque assiette, pour 35 shekels (environ 8 €).
Osma Dallal, le prodige originaire d’Akko, derrière les restaurants Dallal Tapas et Maiar, à Tel Aviv, a concocté un maglouba à la pieuvre, qui se présente sous la forme de strates de poisson, de légumes et de riz, que sa grand-mère lui a appris à faire. Nir Zuk, le vénéré chef aux fourneaux du Cordelia, à Jaffa, et plus récemment, au restaurant Mapu, au Prima City Hotel de Tel Aviv, a créé un hummus spécial avec de l’artichaut à la juive, tandis qu’Omar Alwan, le candidat de « Game of Chefs », des restaurants Ale Gefen, à Haïfa et de Haj Kalil, à Jaffa, organisait un atelier sur la préparation des desserts arabes traditionnels.
Plusieurs restaurants locaux proposaient également des plats spéciaux, sans faire appel à des chefs extérieurs. Parmi les plus remarquables, on notera les bourekas à la turc, le fromage acidulé jibneh, et les herbes de zaatar, au restaurant Tourkish Boureaks. À la Maafiyat HaBankim, une pâtisserie légendaire, on servait du khubais asfar, ou « pain des morts », une pâtisserie ronde dorée, ornée de graines de nigelles, traditionnellement distribuées dans les cimetières arabes.
Uri Jeremias, le pêcheur, chef et bon-vivant derrière les fourneaux du restaurant Uri Buri, à Akko, s’est également prêté au jeu, et créant un plat de hummus spécial, avec de la chicorée sauvage et de l’oseille, dans les cuisines de Hummus Eliahu.
Il a assuré que le temps passé en dehors de sa propre cuisine valait la peine », a-t-il dit.
« Je crois en la coexistence », a-t-il dit en dégustant son plat délicieusement citronné, une version plus épaisse et plus consistante que celle d’Eliahu. « Mais la coexistence, c’est comme la météo anglaise : tout le monde en parle, mais très peu de gens en font quelque chose. »
« Je suis ici pour soutenir quiconque soutient la coexistence », a-t-il ajouté. « C’est le seul moyen de garantir un meilleur avenir pour nos enfants et nos petits-enfants. »
L’an prochain, les visiteurs peuvent s’attendre à ce que le festival ait pris encore plus d’ampleur, a soufflé Atamna-Ismaeel refusant d’en dire davantage. Elle a tout de même fait comprendre que des chefs étrangers seraient impliqués.
Bien sûr, même une fois la période des fêtes passée, les sapins de Noël disparus, les hanoukkiot rangées, les guirlandes lumineuses retirées, les Juifs, les Musulmans et les Chrétiens de Haïfa continueront à vivre côte à côte, a fait remarquer Atamna-Ismaeel.
« Ils ne marchent pas dans la rue avec un panneau qui dit « la coexistence c’est super ! » ou « Nous voulons la coexistence », a-t-elle plaisanté. « Ils la vivent simplement. Ici à Haïfa, ce n’est pas un slogan, c’est notre mode de vie. »
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