Israël en guerre - Jour 373

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Portrait croisé de Yair Lapid et Naftali Bennett

Tout les oppose et pourtant ils ont conclu un accord de coalition composée de 8 partis tout aussi opposés. Le seul dénominateur commun : chasser leur ancien patron du pouvoir

Yair Lapid, (à droite), dirigeant du parti Yesh Atid et Naftali Bennett, dirigeant du parti HaBayit HaYehudi, à la Knesset, février 2013. (Crédit : Miriam Alster/FLASH90)
Yair Lapid, (à droite), dirigeant du parti Yesh Atid et Naftali Bennett, dirigeant du parti HaBayit HaYehudi, à la Knesset, février 2013. (Crédit : Miriam Alster/FLASH90)

Il a été tour à tour conseiller de Benjamin Netanyahu puis son rival tout en restant un partenaire incontournable : le millionnaire Naftali Bennett, chef de file de la droite radicale, pourrait succéder à son mentor et devenir le Premier ministre d’Israël.

Crâne dégarni, kippa discrète et anglais d’Américain, Naftali Bennett dirige la formation Yamina qui prône à la fois un ultra-libéralisme économique, une ligne dure face à l’Iran ou encore l’annexion de près des deux tiers de la Cisjordanie, un territoire palestinien occupé par l’armée israélienne depuis 1967.

Son ralliement au bloc anti-Netanyahu a été négocié au prix fort : pas moins que le poste de chef de gouvernement en premier qui sera repris ensuite par Yaïr Lapid, le chef de l’opposition qui est parvenu à obtenir un accord des partis pour une telle coalition.

L’homme d’affaires de 49 ans qui a fait fortune dans la tech est entré en politique sur le tard. Mais depuis 2013, cette figure du courant « nationaliste religieux » et proche des colons, a occupé cinq portefeuilles ministériels.

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Le dernier, celui de la Défense en 2020, l’a mené au pic de la pandémie de coronavirus en Israël à organiser une spectaculaire mobilisation de l’armée pour gérer la crise.

« Une image faite sur mesure pour un public qui cherche désespérément un remplaçant légitime à Netanyahu », note Evan Gottesman de l’Israel Policy Forum.

Si l’accord de coalition est approuvé par le Parlement, Naftali Bennett serait le premier chef de gouvernement religieux de l’Histoire de l’Etat hébreu à porter une kippa ou à observer strictement le Shabbat.

Celui qu’on donnait mort politiquement il y a encore deux ans quand il n’avait pas passé le seuil électoral et qui a fait un score médiocre aux dernières législatives de mars a su manoeuvrer ces dernières semaines pour s’imposer comme « faiseur de rois » dans les complexes négociations en vue de former une coalition gouvernementale.

Fils d’immigrants américains né le 25 mars 1972 à Haïfa (nord), Naftali Bennett qui a servi dans la prestigieuse unité « Sayeret Matkal », comme M. Netanyahu, s’est imposé au tournant des années 2000 comme l’un des ténors de la « start-up nation » avec son entreprise de cybersécurité Cyotta vendue pour 145 millions de dollars en 2005.

L’année suivante il fait le saut en politique pour le Likud où il devient le bras droit de Benjamin Netanyahu.

La députée Yamina Ayelet Shaked lors d’une conférence de presse à la Knesset de Jérusalem, le 26 mai 2021. (Crédit : Olivier Fitoussi/Flash90)

Deux ans plus tard, Naftali Bennett quitte le Likud pour diriger un temps le Conseil de Yesha, principale organisation représentant les Israéliens vivant dans les implantations en Cisjordanie, qui deviendront son fonds de commerce politique, même si lui n’a jamais habité dans l’une de ces implantations.

En 2012, il prend les rênes de la formation de droite HaBayit HaYehudi, qui s’est ensuite greffée à d’autres micro-partis pour former « Yamina » (A droite). Le parti Yamina, connu pour son égérie, Ayelet Shaked, est aujourd’hui dirigé par Naftali Bennett.

Naftali Bennett, père de quatre enfants et habitant de la ville cossue de Raanana (centre), détonne aussi au sein de son milieu de droite religieuse : les questions sur la place de la religion dans l’Etat ne sont dans ses priorités et il incarne un certain libéralisme des valeurs, notamment par exemple sur les questions LGBTQ – contrairement au parti islamiste Raam de Mansour Abbas et aux partis ultra-orthodoxes, sans parler de la faction Noam ouvertement homophobe. Le chef du parti de gauche Meretz est homosexuel.

Le chef de l’opposition Yair Lapid à son bureau de Tel Aviv, Israël, le 21 mai 2020. (AP Photo/Oded Balilty)

Ancienne star de la télé israélienne, le centriste Yaïr Lapid a gagné en crédibilité depuis ses débuts en politique, jusqu’à se hisser au rang de principal rival du Premier ministre sortant Benjamin Netanyahu et d’être en passe de le pousser vers la sortie.

Lorsqu’en 2012 ce journaliste vedette aux airs de George Clooney quitte les plateaux pour lancer son parti Yesh Atid (« Il y a un futur »), ses détracteurs lui reprochent de jouer sur son look de beau gosse pour séduire la classe moyenne.

Près de dix ans plus tard, il est toujours là et a pris la tête de l’opposition, qui a engrangé le soutien crucial du chef de file de la droite radicale, Naftali Bennett, et d’un parti arabe islamiste pour la formation d’un nouveau gouvernement.

Avec ces appuis, M. Lapid, 57 ans, touche du doigt la mission qu’il s’était fixée: pousser à la sortie Benjamin Netanyahu, Premier ministre le plus pérenne de l’histoire d’Israël et inculpé pour corruption dans une série d’affaires.

Ministre des Finances dans un gouvernement Netanyahu en 2013-2014, M. Lapid avait lors des élections législatives de mars 2020 fondu son parti dans la coalition centriste « Bleu-Blanc » de Benny Gantz. Mais lorsque ce dernier avait fini par conclure un accord avec M. Netanyahu, il avait claqué la porte.

Aux dernières législatives du 23 mars, la formation centriste de M. Lapid est arrivée en deuxième position, avec 17 députés, derrière le Likud (droite) de M. Netanyahu.

Le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu (à gauche) étreint le leader de Yesh Atid Yair Lapid après s’être adressé à la Knesset avant la prestation de serment du nouveau gouvernement, le 18 mars 2013. (Crédit : Miriam Alster/FLASH90/Fichier)

Né en novembre 1963 à Tel-Aviv, métropole où il concentre ses appuis, Yaïr Lapid est le fils du défunt journaliste et ancien ministre de la Justice Tommy Lapid.

Sa mère, Shoulamit, est un des maîtres du polar israélien, avec une série d’enquêtes mettant en scène une journaliste.

Terrain ou fiction, le journalisme imprègne ainsi la jeunesse de Yaïr Lapid qui signe ses premiers textes pour le quotidien Maariv, décrochant ensuite une chronique au Yediot Aharonot, titre le plus vendu du pays, ce qui va le faire connaître du grand public.

Parallèlement, l’homme à la mâchoire carrée poursuit ses activités de touche-à-tout insatiable: il boxe en amateur, s’adonne aux arts martiaux, écrit des romans policiers et des séries télé, compose et interprète des chansons et joue même au cinéma.

Mais c’est à la télévision – il devient dans les années 2000 présentateur du talk-show le plus suivi du pays – qu’il s’impose comme l’incarnation de l’Israélien moyen, posant invariablement à ses invités sa question fétiche : « Qu’est-ce qui est israélien à vos yeux ? ».

Patriote, libéral, laïc, l’homme parvient à rassembler au centre mais il est fustigé dans les milieux juifs orthodoxes.

Tommy Lapid est greffier pour le procès Adolf Eichmann à Jérusalem en 1961. (Crédit : Government Press Office/Israel National Photo Collection)

« Il s’abstient de toute auto-glorification (…) et est le plus ‘non-candidat’ de tous les candidats au poste de Premier ministre », notait avant les dernières élections le journaliste Youval Karni dans le Yediot Aharonot, soulignant que les Israéliens « apprécient » l’humilité.

Quand des milliers d’Israéliens manifestaient chaque semaine contre M. Netanyahu devant la résidence officielle du Premier ministre rue Balfour à Jérusalem, mais aussi sur les ponts et les viaducs du pays, Yaïr Lapid faisait profil bas.

Il disait ne pas chercher à habiter rue Balfour, mais à s’allier à d’autres partis pour chasser le « roi Netanyahu » et « briser les barrières qui divisent la société israélienne ».

Encore récemment, le centriste appelait de ses voeux « un gouvernement qui dit: nous ne nous haïssons pas ».

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