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Premier cas de COVID-19 au Yémen en guerre, inquiétude des humanitaires

"Nous faisons tout ce que nous pouvons pour prévenir la propagation et aider les autorités à être prêtes à soigner" des patients, a indiqué Altaf Musani, représentant de l'OMS

Une femme yéménite fabrique des masques dans une usine textile de la capitale Sanaa, le 16 mars 2020, en pleine pandémie de coronavirus. (Crédit :  Mohammed HUWAIS / AFP)
Une femme yéménite fabrique des masques dans une usine textile de la capitale Sanaa, le 16 mars 2020, en pleine pandémie de coronavirus. (Crédit : Mohammed HUWAIS / AFP)

Le Yémen, pays en proie à une grave crise humanitaire due à la guerre, a annoncé vendredi un premier cas de contamination au nouveau coronavirus, faisant craindre aux ONG des répercussions catastrophiques en cas de propagation de l’épidémie.

Un cessez-le-feu décrété unilatéralement à partir de jeudi par la coalition militaire menée par l’Arabie saoudite, alliée du pouvoir au Yémen, ne semblait pas tenir, des frappes aériennes ayant visé des cibles des rebelles Houthis quelques heures après son entrée en vigueur, selon des sources des belligérants.

En décrétant cette trêve avant l’annonce du premier cas au Yémen, Ryad a dit espérer qu’elle permettrait de lutter contre la maladie dans ce pays pauvre menacé également par la famine, frappé par des épidémies de dengue et choléra et qui souffre d’un système de santé en déliquescence.

Dans un communiqué vendredi soir à New York, les membres du Conseil de sécurité de l’ONU ont « salué l’annonce de l’Arabie saoudite en faveur d’un cessez-le-feu unilatéral » et « la réponse positive du gouvernement du Yémen ». Ils « appellent les Houthis à décider d’engagements similaires sans retard », précisent-ils.

Le conflit déclenché en 2014 entre pouvoir et rebelles soutenus par l’Iran, a fait des dizaines de milliers de morts, essentiellement des civils, selon des ONG, et provoqué la pire crise humanitaire au monde avec 24 millions de Yéménites dépendant des aides, d’après l’ONU.

« Sous-équipé »

« Le premier cas confirmé de nouveau coronavirus a été recensé dans la province de Hadramout (sud) », a indiqué sur Twitter la commission gouvernementale sur la pandémie.

La personne contaminée dans la localité de Chahr reçoit des soins médicaux et son état est stable, a précisé ce comité, dirigé par le gouvernement du président Abd Rabbo Mansour Hadi, reconnu par la communauté internationale. Vendredi, un couvre-feu de 24 heures a été imposé à Chahr et ses environs.

Toutes les personnes ayant été en contact avec le patient sont recherchées pour être isolées, a indiqué l’Organisation mondiale de la Santé (OMS) sur Twitter.

« Nous faisons tout ce que nous pouvons pour prévenir la propagation du virus et aider les autorités à être prêtes à soigner » des patients, a indiqué Altaf Musani, représentant de l’OMS pour le Yémen. 

« C’est le moment que nous craignions tous, car le Yémen est sous-équipé face au virus, avec seulement la moitié des établissements de santé encore opérationnels », a déploré de son côté Xavier Joubert, directeur de l’ONG Save the Children au Yémen.

Il décompte 700 lits disponibles en unité de soins intensifs et 500 ventilateurs pour une population de quelque 30 millions de personnes.

« Ce qui nous inquiète aussi, c’est (…) qu’il n’y a pas beaucoup de tests (500 disponibles actuellement) et de centres » pour les faire, a appuyé Yann Josses, coordinateur de Médecins du Monde au Yémen dans un entretien à l’AFP. « On s’attend à une catastrophe humanitaire, avec plusieurs millions de personnes infectées. »

Sur le front militaire, quelques heures seulement après l’entrée en vigueur du cessez-le-feu, plusieurs frappes ont visé « des véhicules appartenant aux Houthis » dans les provinces de Jawf (nord) et Hajjah, près de la capitale Sanaa, selon une source militaire proche du gouvernement.

Des affrontements ont également éclaté entre les Houthis et les forces loyalistes dans les provinces de Jawf et de Marib (nord), a-t-elle ajouté.

« Prudence »

Un enfant yéménite hospitalisé après une frappe attribué à la coalition dans la province de Hajjah, le 11 mars 2019. (Crédit : Mohammed HUWAIS / AFP)

La chaîne de télévision Al-Massirah, sous contrôle des Houthis, a fait état de « six frappes d’avions ennemis (…) lors des dernières heures » sur la province de Hajjah, et de deux sur celle de Jawf.

Les Houthis avaient rejeté la trêve jeudi, l’un de leurs responsables y voyant une « manœuvre politique et médiatique » de la coalition militaire.

L’annonce de cette trêve faisait suite à une escalade des combats, malgré l’appel de l’ONU à leur cessation immédiate pour protéger les civils de la pandémie.

Vendredi, 59 ONG, dont Oxfam et Médecins sans frontières, ont salué avec « prudence » dans un communiqué commun le cessez-le-feu. Mais il « ne peut à lui seul arrêter la propagation du COVID-19 au Yémen », ont-elles souligné.

Le Yémen vit presque entièrement isolé, sous le blocus aérien imposé par la coalition menée par Ryad, ce qui fragilise sa situation alimentaire.

La coordinatrice humanitaire de l’ONU au Yémen, Lisa Grande, a indiqué que l’aide mensuelle fournie par le Programme alimentaire mondial à plus de 12 millions de personnes vivant dans des zones à 80 % sous contrôle des Houthis, pourrait désormais être octroyée plus rarement.

Des donateurs ont décidé de suspendre leurs contributions, estimant que l’aide était bloquée par les Houthis, a-t-elle expliqué à la BBC.

« Après cinq ans de guerre, les Yéménites à travers le pays ont l’un des plus faibles niveaux d’immunité (…) du monde. Ce à quoi fait face le Yémen est effrayant », a ajouté Mme Grande après l’annonce de la première contamination.

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