Soupçons de fraude électorale au Congrès sioniste mondial : 2 listes sur la sellette
Alors que le taux de participation des Juifs américains atteint un niveau record à mi-parcours du vote, de nouvelles allégations menacent la légitimité des élections

Des allégations de fraude électorale ont été formulées à l’encontre de trois listes lors de l’élection du Congrès sioniste mondial, remettant en question le processus démocratique en cours, un processus qui permettra aux Juifs américains de contribuer à déterminer comment la somme d’environ cinq milliards de dollars de financement sera consacrée à des causes juives et israéliennes au cours des cinq prochaines années.
Plusieurs des 22 partis en lice aux élections demandent que ces listes soient disqualifiées, affirmant que leurs agissements menacent la légitimité de l’ensemble du processus.
L’American Zionist Movement (AZM), l’organisation qui gère les élections, enquête sur des accusations laissant entendre que des personnes pourraient voter à plusieurs reprises pour les listes de Haredi Eretz Hakodesh, associé au parti israélien HYahadout Ha Torah, et d’Am Yisrael Chai, un parti orthodoxe qui cible les jeunes électeurs.
Selon des informations, plusieurs milliers de votes pour ces partis ont été exprimés à partir des mêmes endroits, avec l’utilisation de cartes de crédit suspectes et des coordonnées non vérifiables.
Herbert Block, le directeur exécutif de l’AZM, a confirmé que l’affaire faisait l’objet d’une enquête.
« Nous n’avons aucun commentaire à faire tant que l’affaire est en cours d’investigation », a déclaré Block. « L’AZM s’engage à garantir des élections équitables et transparentes et veille à identifier et à mettre fin à tout comportement frauduleux. »
Le vote pour le Congrès sioniste est ouvert aux personnes qui s’identifient comme juives aux États-Unis et qui sont âgées de 18 ans. Elles doivent fournir leur nom, leur adresse et leurs coordonnées, et payer des frais d’inscription de 5 dollars par carte de crédit.
Si la plateforme de vote en ligne utilise une technologie sophistiquée pour empêcher la fraude électorale, « un système d’honneur est également nécessaire » pour garantir l’intégrité du vote, avait antérieurement déclaré Herbert Block au Times of Israel.

En outre, une plainte a été déposée contre Aish Haam, qui représente le mouvement orthodoxe Aish Hatorah, pour avoir offert des incitations aux électeurs. Elle consisteraient notamment à rembourser les frais d’inscription de 5 dollars.
Ces accusations « sont extrêmement embarrassantes et elles constituent un coup dévastateur qui menace la légitimité des élections », a déclaré une lettre envoyée à l’AZM et signée par six partis, des factions qui représentent un tout une gamme de points de vue politiques et religieux – un courrier qui a été divulgué à JTA. « Le mot qui s’applique le mieux ici est ‘shanda’ – et à un moment où le monde juif tout entier (et bien d’autres) nous regarde. »
L’incapacité à répondre fermement à ces accusations, si elles se vérifient, pourrait créer un précédent qui nuirait gravement à la crédibilité du mouvement sioniste en Amérique du Nord, a estimé une source au sein de l’un des partis.
« Ces accusations sont très graves et l’AZM doit y répondre le plus fermement possible », a confié la source. « J’espère vivement que tout ça ne sera pas enfoui sous le tapis ».
Un porte-parole de l’une des parties a indiqué au Times of Israel que, même s’il y a eu un incident isolé connu portant sur le remboursement des frais des électeurs dans sa faction – un incident dorénavant clos – l’accusation a été amplifiée de manière disproportionnée par les médias de gauche.
Des enjeux importants
Créé par Theodor Herzl en 1897, le Congrès sioniste mondial décide de l’affectation d’un milliard de dollars par an aux causes juives et il supervise les institutions nationales d’Israël, notamment l’Organisation sioniste mondiale, qui met en œuvre la vision du Congrès, l’Agence juive, qui joue un rôle central dans l’immigration juive en Israël, et le Keren Kayemeth LeIsrael-Fonds national juif.
Le Congrès sioniste mondial compte 525 sièges, répartis entre trois zones géographiques différentes. Israël dispose de 200 sièges, automatiquement attribués en fonction de la représentation des partis politiques à la Knesset. Les 152 autres sièges représentent les États-Unis, répartis en fonction des résultats des élections du WZC. Les 173 derniers sièges sont choisis par d’autres pays, soit par un vote public, soit, dans les petites communautés, par les dirigeants juifs locaux.
Le cycle électoral actuel pour le 39e Congrès est peut-être le plus controversé depuis sa création il y a 128 ans. Alors que les circonscriptions ultra-orthodoxes sont traditionnellement restées en dehors du Congrès en raison de ses fondements sionistes, cet état de fait a changé lors des élections précédentes, lorsque la liste Haredi Eretz HaKodesh s’est présentée et qu’elle a remporté un nombre étonnant de 25 sièges sur les 152 que compte les États-Unis. Ce qui a poussé les partis libéraux du Congrès, qui détenaient traditionnellement la majorité des sièges, dans la minorité pour la toute première fois.

Cela a incité une multitude d’autres partis politiques à se joindre à la course cette année – avec de nombreuses listes orthodoxes, ce qui a porté le nombre de partis en lice à 22, contre 14 en 2020.
Pour ces raisons, la concurrence entre les partis est féroce, un grand nombre d’entre eux menant des campagnes de prestige et faisant appel à des influenceurs, sur les réseaux sociaux, pour soutenir leurs causes.
Le rabbin Dov Landau, un rabbin ultra-orthodoxe de premier plan, a ordonné aux partis politiques haredim de s’abstenir de participer aux élections de février. Cependant, son appel est généralement resté lettre morte.
Participation record
Les tensions qui entourent l’élection au Congrès sioniste mondial attirent l’attention sur un vote que le PDG de Mizrahi, Doron Perez, a qualifié de « secret le mieux gardé de la diaspora juive ».
« Il s’agit d’un processus extrêmement important qui permet aux Juifs d’avoir leur mot à dire sur ce qui se passe dans les institutions juives et israéliennes et d’influencer directement ce qui se passe dans leurs communautés », a commenté Perez.

Plus de 123 788 votes ont d’ores et déjà été exprimés à mi-parcours de la période électorale de huit semaines qui s’achèvera le 4 mai, a déclaré l’AZM cette semaine. C’est déjà plus de votes que lors de l’ensemble des élections de 2020.
Cependant, cela ne représente encore qu’une fraction des quelque 7,5 millions de Juifs vivant aux États-Unis, et pour Block, c’est une opportunité à ne pas manquer.
« Il y a des partis qui veulent utiliser les fonds pour le pluralisme religieux, pour les institutions haredim, pour le développement de l’implantation juive en Judée-Samarie, pour une solution à deux États, et pour à peu près tous les points de vue du monde juif », a expliqué Block, utilisant le terme biblique pour la Cisjordanie. « Le vote influencera les décisions sur tous les sujets, de la reconstruction d’Israël après le 7 octobre à l’éducation sioniste, en passant par la sécurité des institutions juives de la diaspora et le soutien aux membres vulnérables de la société israélienne. C’est l’occasion de voter pour ce qu’ils jugent important ». »