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50 % des malades israéliens « guéris » du virus ont développé d’autres douleurs

Une femme de Bnei Brak dit qu'un mois après avoir été testée négative, elle ressent encore beaucoup de fatigue et d'anxiété et que l'état de son mari, ancien hospitalisé, est pire

Du personnel médical dans une unité de soin du coronavirus à l'hôpital Ichilov de Tel Aviv, le 4 mai 2020. (Crédit : Yossi Aloni / Flash90)
Du personnel médical dans une unité de soin du coronavirus à l'hôpital Ichilov de Tel Aviv, le 4 mai 2020. (Crédit : Yossi Aloni / Flash90)

Les médecins israéliens sont déroutés : Des malades du coronavirus, dorénavant considérés comme guéris, sont de plus en plus nombreux à venir les voir pour se plaindre de douleurs incompréhensibles, de capacités pulmonaires qui ne reviennent pas à la normale et de toute une série de difficultés psychologiques qui les handicapent au quotidien.

« Ce à quoi nous assistons est vraiment effrayant », commente auprès du Times of Israel Gabriel Izbicki, du centre médical Shaare Zedek. « Plus de la moitié des patients, plusieurs semaines après avoir été testés négatifs, présentent encore des symptômes ».

Izbicki travaille sur une étude qui porte sur le suivi de malades qui avaient été hospitalisés pour des formes graves de la COVID-19 ou qui avaient été placés dans des hôtels de quatorzaine pour tenter de déterminer les effets résiduels du virus, et pour s’efforcer de comprendre pourquoi les patients continuent à souffrir, bien après avoir été testés négatifs.

« Il y a très peu de recherches sur l’impact à moyen-terme du coronavirus », explique-t-il, ajoutant que des recherches telles que celles-ci sont nécessaires pour pouvoir guider les médecins.

A Bnei Brak, qui accueille le premier dispensaire d’Israël, les médecins assistent, ces derniers jours, à une hausse du nombre de patients qui viennent consulter pour des douleurs qui semblent survenir de nulle part.

« Ce type de douleur peut apparaître dans les bras, dans les jambes, ou dans d’autres parties du corps où le virus n’a pourtant pas d’impact direct et si on interroge les malades sur une échelle de douleur allant de un à dix, la souffrance peut atteindre dix, avec des gens qui disent ne plus pouvoir parvenir à trouver le sommeil », note Eran Schenker, directeur de ce dispensaire ouvert depuis un mois à Bnei Brak sous les auspices des Services de santé Maccabi. « C’est un phénomène auquel nous assistons davantage depuis une semaine ».

Un homme tousse (Crédit : iStock)

« Cassé » par le virus

Une malade venue au dispensaire a accepté de s’entretenir avec le Times of Israel à condition que son nom ne soit pas publié. Testée positive au coronavirus au mois de mars, son test est revenu négatif il y a un mois. Mais la femme, une quadragénaire qui habite Bnei Brak, souffre encore de fatigue et d’une anxiété extrême, et elle ne peut marcher que pendant quelques minutes d’affilée encore aujourd’hui, l’effort étant trop violent.

Son mari, qui avait également attrapé le nouveau coronavirus au mois de mars et qui a été testé négatif le mois dernier, a dorénavant « le sentiment d’avoir été cassé », ajoute-t-elle. « Son état est pire qu’au cours de son hospitalisation », s’exclame-t-elle.

Son époux, âgé de 55 ans, avait des problèmes de santé avant de contracter la maladie mais il était actif « du petit matin jusqu’à la tombée de la nuit », débordant d’énergie, explique-t-il. Il est aujourd’hui abattu, léthargique, et il peut difficilement marcher. Il a développé des problèmes cardiaques, indique-t-elle.

Et c’est un choc pour sa famille : Au cours de son hospitalisation initiale, au mois de mars et au début du mois d’avril, son état n’avait pourtant pas nécessité d’oxygène et les radios n’avaient révélé aucune lésion dans ses poumons. Il avait une nouvelle fois été hospitalisé au mois d’avril avec des symptômes similaires à ceux d’une pneumonie, et il avait été testé négatif au coronavirus au mois de mai. Mais, depuis, l’homme se plaint de douleurs et il présente des difficultés respiratoires importantes. Il a rencontré des cardiologues, des experts en neurologie, des équipes de rééducation et autres professionnels de santé au sein du dispensaire.

Schenker déclare que l’homme concerné est « l’un des cas les plus compliqués que nous sommes amenés à prendre en charge, mais il n’est pas le pire et nous comptons des malades qui souffrent encore davantage ».

Il précise que, quelle que soit la maladie, il peut falloir du temps pour qu’un malade se rétablisse suite à une longue hospitalisation, et que l’usage de respirateurs peut ralentir la récupération – mais que la COVID-19 entraîne des modèles inhabituels.

« Nous sommes très étonnés de constater que les gens ne souffrent pas uniquement de ce à quoi nous pouvions nous attendre mais également de voir des effets qui, selon nous, ne devaient pas entrer en ligne de compte », dit-il au Times of Israel. « Ce n’est pas habituel ».

Il souligne que les malades n’ont pas tous guéri que récemment. « Certains d’entre eux ont eu le coronavirus au mois de mars et cela fait donc des mois qu’ils auraient dû se rétablir », affirme-t-il.

Gabriel Izbicki, chef de l’Institut pulmonaire du centre médical Shaare Zedek de Jérusalem (Autorisation : Hôpital Shaare Zedek)

Izbicki, directeur de l’Institut pulmonaire de Shaare Zedek, souligne également que cela fait longtemps qu’un grand nombre de ses malades sont considérés comme guéris. L’une des choses les plus surprenantes, selon lui, c’est qu’il n’y a aucun moyen de prédire quels patients parviendront à se rétablir sans difficulté et qui seront les autres.

« Il n’y a pas de corrélation entre la gravité de la maladie pendant l’hospitalisation et l’ampleur des symptômes expérimentés après », dit-il, évoquant les résultats préliminaires de son étude sur les malades guéris qui ont été pris en charge dans les hôpitaux et dans les hôtels de quatorzaine.

« Parmi les symptômes que nous avons détectés, nous avons révélé la faiblesse générale ressentie par la majorité des patients, le souffle court, une toux persistante et autres problèmes respiratoires et pulmonaires complexes », note-t-il, ajoutant qu’il a également constaté les douleurs anormales citées par Schenker.

Ces douleurs – qui ont été rapportées par des patients de tous les âges – déroutent les médecins. Schenker dit que « les anti-douleurs bloquent la douleur mais ils ne règlent pas le mal à la source. Mais nous ne savons pas comment nous attaquer à la source et il est par ailleurs impossible de prendre des anti-douleurs toute sa vie ».

Tandis que certains se plaignent de souffrances insupportables, d’autres les décrivent comme un désagrément majeur : Sensations de brûlure, picotements, ou simple sentiment d’un membre ne fonctionnant pas correctement.

En général, l’état de ces patients ne se révèle pas alarmant pendant les examens médicaux. Schenker raconte que « nous vérifions leurs poumons, le cœur, et ils n’ont aucune maladie – et ils n’ont aucun problème neurologique non plus. Nous faisons des scanners, nous ne voyons rien mais pourtant, ces douleurs sont bien réelles – ils nous le répètent encore et encore ».

Dan Oyero, directeur-adjoint aux services de santé Maccabi pour le centre d’Israël (Autorisation : Services de santé
Maccabi)

Dan Oyero, le directeur de la médecine des services du Maccabi pour le centre d’Israël, estime que la question la plus difficile pour les médecins reste les changements d’ampleur qui surviennent au quotidien pour les malades – des changements dont il est impossible de prévoir avec exactitude la fin.

« Le plus pénible, c’est que les gens font la comparaison entre ce qu’ils sont maintenant et ce qu’ils étaient avant de tomber malades, il y a seulement quelques semaines », dit-il. « Et ils nous disent ne plus pouvoir faire les choses qu’ils faisaient auparavant ».

Les sens du goût et de l’odorat, perdus pendant la maladie, ne sont parfois jamais revenus. Lorsque les malades demandent s’ils pourront les retrouver un jour, les médecins – qui n’ont finalement qu’une expérience encore limitée du coronavirus – sont dans l’incapacité de leur répondre clairement.

« On l’ignore, tout simplement », s’exclame Oyero.

Et lorsque les médecins sont en mesure d’évoquer un précédent établi à partir de l’observation d’autres maladies, ce n’est pas forcément réjouissant non plus.

Les malades âgés qui ont souffert de formes graves de coronavirus – même en l’absence de problèmes respiratoires avant leur infection – sont susceptibles de ne retrouver que la moitié de leurs capacités pulmonaires, même longtemps après avoir été testés négatifs et considérés comme guéris, dit Schenker.

Eran Schenker, directeur du dispensaire pour les patients guéris de la COVID-19 à Bnei Brak, exploitée par les services de santé Maccabi (Autorisation : Services de santé Maccabi)

« Ils ont deux poumons, mais ils n’ont plus que la capacité d’un seul, chacun des deux ne fonctionnant qu’à 50 % – et cela peut rester ainsi pour tout le reste de la vie », commente-t-il. Il tire cette conclusion à partir des modèles de séquelles pulmonaires détectées dans d’autres maladies mais qui, jusqu’à présent, ne s’étaient révélées que chez des personnes qui souffraient déjà de pathologies des poumons sous-jacentes.

« Ce n’est pas le virus qui a entraîné ces lésions mais un processus inflammatoire qui – on le sait grâce à d’autres maladies – ne permettra pas aux poumons de conserver la même capacité à échanger l’oxygène qu’auparavant », poursuit Schenker.

Izbicki déclare que son expérience lui montre que les lésions pulmonaires peuvent toucher les malades de tous les âges et il indique partager l’inquiétude d’une non-récupération à long-terme des capacités respiratoires.

Pour certains patients, il faudra une rééducation et un traitement physiques. Schenker explique que « nous avons vu des cas de perte de poids qui sont tellement extrêmes que les gens en ont des difficultés à se déplacer ». D’autres, qui réussissent encore à marcher, n’ont plus l’énergie, ni la motivation pour le faire.

Un patient guéri du coronavirus voir un cardiologue au dispensaire de Bnei Brak dirigé par les services de santé Maccabi (Autorisation : Services de santé Maccabi)

Certains de ces patients sont jeunes et habituellement pleins d’énergie, souligne Schenker.

« C’est sidérant de voir combien de personnes ont pu retourner travailler – des éducateurs, des avocats ou dans d’autres professions – qui, au bout d’une heure, ressentent de l’anxiété, une certaine insécurité, avec des gens qui souffrent parfois de dépression et ce bien au-delà de ce à quoi nous pouvions nous attendre », ajoute-t-il.

Oyero indique que « les plaintes principales, c’est la fatigue, le manque d’énergie persistant – c’est quelque chose sur lequel il est difficile de mettre un nom pour nous. Un grand nombre de personnes déplorent le fait de ne plus avoir l’énergie qu’elles avaient avant. Elles sont plus fatiguées. Certains disent ne plus avoir la motivation de faire ce qu’ils ont à faire. On ne peut pas mettre un nom sur ces plaintes, dire à tous ces gens qu’ils souffrent d’un syndrome particulier, mais on tente néanmoins de leur venir en aide », affirme-t-il.

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