Accusés de voler des poules pour Kippour, le Consistoire et le CRIF s’offusquent
A la source de l'histoire un vol de près de 200 moutons en 2013 en Lorraine, retrouvés dans un bidonville rom. Ils avaient été volés juste avant l'Aïd, explique la préfecture
Les autorités juives françaises se sont indignées d’une lettre envoyée par les services de l’État d’un département jouxtant Paris enjoignant aux fermes pédagogiques locales de confiner leurs poules et moutons à l’approche de fêtes religieuses juive et musulmane, afin d’éviter le vol d’animaux.
Le courrier, envoyé début août par les services vétérinaires des Hauts-de-Seine (ouest de Paris) à neuf fermes, révélé cette semaine par le quotidien Le Parisien, recommandait de mettre en place une surveillance accrue des animaux, traditionnellement sacrifiés lors des fêtes musulmane de l’Aïd el-Kébir (ou Aïd al-Adha) et juive de Yom Kippour.
« Des personnes malintentionnées pourraient essayer de les capturer en vue de pratiquer des abattages clandestins », explique au Parisien Patrick Drouet, directeur de la DDPP des Hauts-de-Seine, repris par La Croix.
Le président du Consistoire central israélite, Joël Mergui, a dénoncé, dans une tribune publiée dans Le Monde daté de vendredi, la « stigmatisation » des pratiques juives.
« J’ai été effaré de découvrir dans la presse du 22 août que j’étais devenu soudainement et collectivement, avec tous mes coreligionnaires, un voleur de poules potentiel ! », s’insurge-t-il, fustigeant un « amalgame malsain » entre la fête juive « la plus sacrée » et « d’imaginaires écumeurs de basse-cour ».
« Voilà comment de préjugés en amalgames, la communauté juive – contre laquelle aucune plainte n’a même été émise – est stigmatisée et jetée en pâture à l’opprobre public pour des faits imaginaires qui ne la concernent ni de près ni de loin ! », proteste le président du consistoire, qui déplore également le « discrédit collectif » que cette circulaire jette sur les Roms et les musulmans », toujours selon La Croix.
En 2013, « dans la période précédant les fêtes de l’Aïd », a invoqué la préfecture dans un communiqué publié jeudi, 200 moutons – volés pour la plupart en Lorraine et destinés à être abattus clandestinement pour être revendus – avaient été retrouvés dans un bidonville rom dans le sud du département.
« Si les préventions de la DDPP se fondent notamment sur le démantèlement, en 2013, d’un trafic de moutons volés dans un campement rom, aucune plainte n’a été déposée en revanche concernant des vols de poulets » ajoute La Croix.
Le courrier des services vétérinaires se comprenait donc « dans le cadre d’une politique générale de lutte contre la délinquance » et n’était « évidement pas destiné à stigmatiser les différents rites religieux », s’est-elle défendue, précisant qu’un courrier similaire était envoyé chaque année depuis 2013 aux fermes pédagogiques, structures qui accueillent régulièrement des enfants.
Le grand rabbin de France, Haïm Korsia, s’était ému auprès du préfet « de ce courrier qui, s’appuyant sur un [prétendu] principe de précaution, portait atteinte à l’intégrité des fidèles juifs et musulmans, en tendant à généraliser un épiphénomène. »
Comme lui, le président du Conseil représentatif des institutions juives de France (CRIF), Francis Kalifat, a indiqué sur Twitter prendre acte de la « mise au point a minima » de la préfecture, après s’être élevé contre « des propos injurieux ».
Les musulmans sacrifient traditionnellement un mouton pour l’Aïd el-Kébir, et certains Juifs un poulet pour Yom Kippour. Ces rites auront lieu cette année respectivement début et fin septembre.