Alors qu’Israël prépare une campagne terrestre, l’issue reste opaque
Après les horreurs du 7 octobre, le cabinet de Netanyahu est déterminé à renverser le Hamas mais des questions confuses nécessiteront des réponses

Il semble inévitable qu’Israël s’embarquera dans une opération terrestre massive à Gaza dans les prochains jours – potentiellement la plus importante depuis quatre décennies.
Les leaders israéliens n’ont pas exactement tenté de cacher ce qui s’annonce. L’armée a indiqué, samedi, qu’elle terminait de se préparer en vue « d’une attaque coordonnée par voie aérienne, maritime et terrestre ».
L’armée de l’air a accueilli à bord de ses avions des commandants de premier plan des forces terrestres pour leur montrer la bande de Gaza, pour leur permettre de se familiariser avec le territoire et pour leur donner une vue d’ensemble de l’enclave dans laquelle les militaires seront amenés à manœuvrer, a appris le Times of Israel, dimanche. Les dirigeants de brigades et de bataillons israéliens ont pu voir, depuis des hélicoptères de combat, où les troupes au sol devraient entrer et où ils devraient avancer au cours de l’offensive terrestre qui se profile à l’horizon.
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« Notre responsabilité, maintenant, est d’entrer dans Gaza, d’aller dans les endroits où le Hamas se prépare, où il agit, où il planifie ses attaques, où il les lance. Attaquez-les partout, attaquez chaque commandant, chaque membre du groupe, détruisez les infrastructures », a déclaré le général Herzi Halevi, chef d’état-major de Tsahal, lors d’une visite effectuée auprès des soldats qui sont stationnés dans le sud d’Israël.
« En un mot comme en cent : triomphez », a-t-il ajouté.
Les objectifs stratégiques de l’opération sont bien définis. Selon la chaîne Kan, un document a circulé au sein du cabinet de guerre. Ce document les quatre objectifs poursuivis dans le cadre de ce conflit. Il est question de renverser le gouvernement du Hamas et détruire ses capacités militaires ; éliminer la menace terroriste émanant de la bande de Gaza ; livrer des efforts maximaux pour résoudre la question des otages et défendre les frontières d’Israël et les civils.
Le niveau opérationnel de cette incursion – où les actions militaires tactiques sont organisées dans une logique qui vise à se mettre au service de l’objectif stratégique – est plus flou.

Une offensive venant menacer la survie du Hamas garantira davantage que les otages ne reviendront jamais plutôt qu’elle ne convaincra le Hamas de les libérer. Les otages et les corps sans vie rapatriés en Israël après avoir été retenus par le Hamas et par le Hezbollah, dans le passé, n’ont été libérés que dans le cadre d’un accord d’échange de prisonniers, exigeant qu’Israël relâche, de son côté, un nombre important de terroristes.
Si l’incursion israélienne se passe bien, certains renégats du Hamas pourraient peut-être essayer de sauver leur peau en offrant des otages mais la libération en grand nombre des détenus retenus en captivité, sur ordre du Hamas, est peu plausible.
Mais le principal objectif de la guerre reste le premier – renverser le Hamas et mettre un terme à sa gouvernance sur la bande de Gaza. Mais par quel mécanisme des manœuvres d’offensive sur le terrain pourraient-elles parvenir à atteindre ce but et à écarter le Hamas du pouvoir ?
Le New York Times a indiqué que l’opération se concentrera sur Gaza City, au centre de la gouvernance du Hamas. Et le porte-parole de l’armée, Daniel Hagari, exhortant les résidents à évacuer, a averti dans la soirée de samedi que Tsahal frapperait « largement » et « rapidement » Gaza City. Ce qui laisse entendre qu’Israël a l’intention de couper la tête du serpent du Hamas, avec la croyance que le reste du corps se disloquera en l’absence de ses dirigeants et des infrastructures qui sont en son cœur.
Écraser initialement le Hamas pourrait se faire relativement sans encombre au fur et à mesure où ses infrastructures seront anéanties et que ses membres seront tués. Israël accordera une attention particulière à l’élimination des deux principaux leaders du Hamas – Yahya Sinwar et Mohammed Deif, qui commande l’aile militaire du groupe terroriste. Des officiers israéliens de premier plan ont qualifié les deux hommes de « morts en sursis ».
Mais comme les États-Unis l’avaient appris en Irak et en Afghanistan, frapper l’ennemi sur le terrain ne signifie pas pour autant que leur compte a été réglé.

Il pourrait falloir une occupation prolongée de la bande pour localiser les leaders et les terroristes du Hamas et pour détruire leurs capacités militaires. Ce qui exposera les soldats israélien à la guérilla et ce qui leur donnera la responsabilité d’une population rebelle – ce qu’Israël avait désespérément tenté d’éviter depuis que le pays était parvenu à s’extraire du bourbier libanais en l’an 2000, après une occupation de 15 ans.
Et il y a aussi la question des capacités de manœuvre de Tsahal. Même si beaucoup de choses ont été dites en public depuis la Seconde guerre du Liban, en 2006, sur le rétablissement des capacités des militaires à mener des opérations terrestres majeures, les dirigeants israéliens ont largement rechigné à ordonner de telles incursions. Ils se sont plutôt appuyés sur des opérations de dissuasion, en particulier dans les airs – quelque chose qui a été un échec spectaculaire, comme l’a démontré l’assaut du 7 octobre.
Et, bien sûr, la question qu’Israël devra se poser est celle de savoir qui dirigera la bande de Gaza si l’État juif réussit, en effet, à démanteler le Hamas ? Après le retrait unilatéral d’Israël en 2005, le pays ne souhaite très certainement pas devoir à nouveau assumer la responsabilité de deux millions de civils défavorisés et hostiles. L’Autorité palestinienne, impopulaire partout, ne peut pas se permettre d’arriver au pouvoir à Gaza à la grâce des tanks israéliens.
Aucune organisation internationale ne peut prendre le contrôle de l’enclave et aucune ne le fera.
C’est l’Iran qui viendra remplir le vide créé par l’absence du Hamas, ainsi que des groupes jihadistes non-affiliés.
C’est le cabinet de guerre du Premier ministre Benjamin Netanyahu qui devra répondre à cette question difficile. Et jusque-là, l’armée devra montrer qu’elle est en mesure de mettre en place une campagne qui lui permettra d’atteindre des objectifs de guerre ambitieux et qu’elle a su établir une force qui saura se montrer à la hauteur des enjeux.
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