Amos Yadlin: Ceux qui brûlent des villages palestiniens nuisent à la légitimité d’Israël
Dans une interview à la Douzième chaine, l'ex-chef du renseignement militaire israélien est revenu sur les conditions du succès de la lutte contre le terrorisme palestinien
Amos Yadlin, l’ex-chef du renseignement militaire israélien, a déclaré mercredi que certains ministres, qui réclament une offensive militaire de grande ampleur en Cisjordanie pour lutter contre le terrorisme « ne savent pas de quoi ils parlent ».
En vertu de cette opération militaire, destinée à détruire l’infrastructure terroriste des kamikazes de la deuxième Intifada, Tsahal s’est déployée dans les grandes villes palestiniennes dans lesquelles l’Autorité palestinienne (AP) avait un contrôle total, conformément aux accords d’Oslo, a-t-il ajouté.
« Auparavant, Israël n’avait jamais pénétré en zone A », à savoir les principales villes de Cisjordanie, a expliqué Yadlin lors d’une interview accordée à la Douzième chaine.
« De nos jours, Israël pénètre régulièrement en zone A et va partout où l’AP ne fonctionne pas, sur la base de renseignement précis. »
« Néanmoins, a souligné Yadlin, ex-directeur de l’Institut d’études de sécurité nationale de l’Université de Tel Aviv, l’ennemi s’habitue aux méthodes d’Israël et s’améliore. Le terrorisme augmente parce qu’il y a énormément d’armes en circulation et qu’il y a de l’argent partout, venu d’Iran et du Hamas. Il faut donc adopter d’autres méthodes. »
« Il se peut que Tsahal, au lieu des opérations de nuit, doive prendre le contrôle de plus de territoire, plus longtemps, mais toujours de manière ciblée, dans des endroits comme le camp de réfugiés de Jénine ou d’autres zones du nord de la Cisjordanie dans lesquelles l’Autorité palestinienne n’a pas de contrôle et où se développe le terrorisme. »
Il a indiqué que les États-Unis reconnaissaient qu’Israël avait « la légitimité pour agir » dans le nord de la Cisjordanie, après des attentats terroristes comme ceux des derniers jours.
« Mais la légitimité est une notion évolutive. Elle se perd en une fraction de seconde. On peut la perdre en interne également lorsqu’il y a, Dieu nous en préserve, des pertes militaires côté israélien. On peut également la perdre lorsque des non-combattants palestiniens sont tués. »
Il a ajouté : « Elle disparaît lorsque des villages palestiniens sont incendiés et que des Palestiniens innocents sont blessés. Cela détruit purement et simplement toute forme de légitimité israélienne. »
Yadlin, autrefois candidat du parti Avoda au poste de ministre de la Défense, a affirmé que le gouvernement avait à très juste titre fait du nucléaire iranien et de la normalisation avec l’Arabie saoudite ses priorités en matière de sécurité nationale.
« Si nous suivons le programme messianique des extrémistes du gouvernement, nous allons nous faire beaucoup de tort », a-t-il averti.
« Nous voulons arrêter l’Iran. Nous voulons amener l’Arabie saoudite à la table des négociations, pour faire la paix. Nous avons besoin des Américains pour cela. Nous ne voulons pas nuire aux bonnes relations que nous entretenons avec l’Égypte et la Jordanie. Nous ne voulons pas que les Émirats arabes unis ferment leur ambassade. »
Par conséquent, a dit Yadlin, « notre sécurité nationale suppose des opérations très soigneusement calibrées, très précises en Cisjordanie, soutenues par la légitimité que nous accordent nos alliés. Si nous nous lançons dans une opération sur fond de villages palestiniens incendiés, nous nous ferons un tort immense et n’obtiendrons pas le succès opérationnel nécessaire pour renforcer notre sécurité contre le terrorisme. »