De grandes entreprises suspendent leurs pubs sur Twitter, racheté par Elon Musk
Pfizer, Audi, United Airlines ont mis une pause à leurs publicités sur Twitter alors que les discours de haine prolifèrent sur le réseau ; la moitié des employés a été renvoyée
Le transporteur aérien majeur United Airlines, aux États-Unis, a fait savoir qu’il suspendait ses publicités sur Twitter alors que les inquiétudes ne cessent de croître concernant l’orientation que donnera au réseau social son nouveau propriétaire, Elon Musk. Depuis sa prise de contrôle de Twitter, la semaine dernière, les discours de haine, la désinformation et les contenus antisémites se sont multipliés sur la plateforme. Le milliardaire d’origine sud-africaine avait pour sa part promis qu’il voulait rendre totale la liberté d’expression sur le réseau.
Un porte-parole de United Airlines a confirmé vendredi à l’agence Reuters que l’entreprise avait suspendu toutes ses dépenses publicitaires sur Twitter. C’est la dernière grande entreprise à avoir pris cette initiative après le géant alimentaire General Mills (qui fabrique les Cheerios), le fabricant automobile Audi et Pfizer, la forme pharmaceutique, qui ont tous mis en pause leurs publicités sur le réseau social.
Bloomberg a fait savoir vendredi que Microsoft, HBO et Verizon réfléchissaient à suivre cet exemple mais qu’elles préféraient opter pour une approche plus attentiste pour le moment.
Vendredi, l’ADL (Anti-Defamation League) a vivement recommandé aux publicitaires de suspendre leur relation avec Twitter, critiquant Musk avec âpreté.
Un certain nombre de groupes de défense des droits civils et notamment l’ADL, une organisation non-gouvernementale qui se consacre au combat contre l’antisémitisme et l’extrémisme, ont rencontré Musk cette semaine pour évoquer cette recrudescence des discours de haine, des insultes raciales, de l’antisémitisme, de l’extrémisme et de la désinformation depuis qu’il a pris la barre du réseau social, la semaine dernière. Le groupe aurait également demandé à Musk de reprendre des pratiques de modération de contenus – elles ont été mises en pause – et ils ont aussi réclamé que l’intégrité des élections de la mi-mandat qui auront lieu mardi aux États-Unis soit garantie.
Et l’ADL a donc demandé, vendredi, aux entreprises et aux publicitaires de cesser de verser de l’argent à Twitter. Le Network Contagion Research Institute, une firme qui contrôle la propagation de la haine et de la désinformation en ligne a fait savoir que Twitter connaissait un « essor prolifique » de ces derniers et que « les tweets les plus engagés sont ouvertement antisémites ».
La coalition Stop Hate For Profit, un groupe dont l’ADL est membre, a déclaré que depuis leur réunion, « la haine et la désinformation ont proliféré », ajoutant que Musk « a entrepris des initiatives qui nous font craindre le pire à l’avenir ».
Chez Twitter, la première semaine sous la direction d’Elon Musk a ressemblé à une tornade: débutée par des nuits blanches pour certains ingénieurs, elle s’est achevée par le licenciement de la moitié du personnel.
« C’était une semaine très étrange. Des cadres étaient congédiés, d’autres démissionnaient, mais il n’y a eu aucune communication officielle de la direction jusqu’à jeudi soir », relate un ex-employé, sous couvert d’anonymat.
Les salariés ont reçu un premier courriel les informant qu’ils seraient fixés sur leur sort vendredi. Le lendemain, le deuxième a confirmé les rumeurs: 50 % des effectifs sont remerciés.
En première ligne, les départements du marketing et du design, et les manageurs. La modération des contenus a été plus épargnée, avec un taux de licenciement de seulement 15 %, d’après Yoel Roth, le responsable de la sûreté sur le site.
Après 24 heures de silence sur le sujet, Elon Musk a fini par tweeter qu’il n’y avait « malheureusement pas d’autre choix quand l’entreprise perd plus de quatre millions de dollars par jour » et que « tous ceux qui ont perdu leur emploi se sont vu proposer trois mois d’indemnités ».
La décision n’a pas surpris les salariés – les rumeurs se faisaient insistantes – mais la brutalité de la méthode a choqué.
Par ailleurs, Musk a indiqué, la semaine dernière, qu’il ne prendrait pas de décision majeure sur les contenus et qu’il ne restaurerait pas les comptes interdits avant la formation « d’un conseil de modération des contenus » qui regroupera des points de vue divers. Il a répété ce point de vue mercredi dernier, ajoutant que le conseil inclura « les communautés civiles et les groupes qui sont la cible de violences motivées par la haine ».
Le directeur-général de Tesla a publiquement indiqué qu’il autoriserait l’ex-président Donald Trump à rouvrir un compte, même si Trump – qui vante régulièrement les qualités de sa propre plateforme de réseau social, Truth Social — n’a pas fait savoir s’il désirait revenir.
Le groupe de défense des droits civils avait vivement recommandé, lors de sa rencontre avec Trump, l’établissement par Twitter d’un processus transparent sur la manière dont le réseau veut réautoriser les comptes qui avaient été bannis.
Twitter avait interdit Trump l’année dernière, trois jours après l’assaut donné par des milliers de partisans de l’ancien président républicain au Capitole, le 6 janvier, suite à sa défaite aux élections de 2020. Plus de 900 personnes ont été mises en examen pour des crimes fédéraux dans le cadre de cette attaque, un événement violent qui a entraîné une enquête à la Chambre.
Musk a pris le contrôle de Twitter après avoir acheté la plateforme pour un montant de 44 milliards de dollars.
Environ 90 % des revenus de Twitter proviennent de la publicité – mais le réseau social est loin d’être le plus prisé par les professionnels de la publicité numérique. Google, Amazon et Meta attirent, à eux trois, 75 % des campagnes numériques, les autres plateformes combinées formant les 25 % qui restent.
Twitter représentera, en 2022, 0,9 % des dépenses de publicités mondiales sur internet, selon les prévisions d’Insider Intelligence, contre 21,4 % pour Meta.
Twitter a perdu la majorité de ses dirigeants la semaine dernière, et notamment le responsable des ventes de publicité.