De vieux amis : Après sa visite, Rivlin confiant que Biden est du côté d’Israël
Au cours de sa visite d'adieu, le président a abordé l'Iran, le retrait des troupes américaines, demandé de nouveaux missiles de précision, et discuté du nouveau gouvernement
WASHINGTON – Bien que la visite d’adieu du président Reuven Rivlin aux États-Unis ait été essentiellement protocolaire, il a réussi à injecter une bonne dose de substance dans sa réunion de lundi à la Maison Blanche, transmettant des messages critiques au nom du nouveau gouvernement israélien concernant son point de vue sur le dossier nucléaire iranien, les Palestiniens et des questions régionales plus larges.
La rencontre entre M. Rivlin et le président américain Joe Biden dans le bureau ovale a duré plus d’une heure, ce dernier donnant le coup d’envoi en déclarant en présence des journalistes que « l’Iran ne se dotera jamais de l’arme nucléaire sous ma surveillance ».
Rivlin a déclaré après coup qu’il était très satisfait de cette déclaration, mais un autre responsable israélien qui a parlé au Times of Israel sous couvert d’anonymat a expliqué qu’empêcher l’Iran d’obtenir une arme nucléaire dans les quatre à huit prochaines années n’était qu’une partie de l’objectif de Jérusalem.
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« Nous craignons qu’en revenant au JCPOA [l’accord sur l’Iran, connu sous le nom de Plan d’action global conjoint], les États-Unis soient en mesure d’empêcher l’Iran d’atteindre la bombe dans les années à venir, mais une fois l’accord expiré, l’Iran pourra immédiatement reprendre ses efforts et disposera de centaines de millions de dollars de fonds supplémentaires grâce à l’allègement des sanctions prévu par l’accord », a déclaré le responsable.
De leur côté, les responsables de la Maison Blanche ont insisté auprès de leurs homologues israéliens, lors de la réunion à huis clos de lundi, pour qu’ils présentent une alternative au JCPOA qui empêcherait l’Iran de se doter de capacités nucléaires, selon un responsable diplomatique israélien.
La délégation de Rivlin a répondu en demandant à l’administration Biden de clarifier son argument fréquemment utilisé en faveur de la négociation d’un « accord plus long et plus solide » avec l’Iran après le retour des parties au JCPOA, a déclaré le responsable. Jérusalem est sceptique quant à la volonté de Téhéran de revenir à la table des négociations après le renouvellement du JCPOA, car il aura déjà obtenu une grande partie de l’allègement des sanctions qu’il recherche désespérément.
Sans entrer dans les détails, un responsable américain a déclaré lundi au Times of Israel que les États-Unis disposaient de plusieurs moyens de pression pour inciter l’Iran à revenir à la table des négociations.
Le responsable diplomatique israélien a déclaré que l’administration Biden semblait avoir l’intention d’empêcher l’Iran de se doter d’une bombe, mais qu’elle continuait de croire pouvoir y parvenir par le biais du JCPOA, même si Israël pensait différemment.
En outre, les États-Unis n’iraient pas jusqu’à alléger les principales sanctions contre l’Iran avant de revenir à l’accord, a spéculé le responsable sur la base de la réunion de lundi. L’impression israélienne, selon le fonctionnaire, est que les États-Unis reconnaissent la volonté de Jérusalem de continuer à opérer dans la région afin d’empêcher Téhéran d’obtenir une arme nucléaire, quel que soit le statut des pourparlers de retour au JCPOA.
Prenant exemple sur le nouveau gouvernement, M. Rivlin a assuré à M. Biden qu’Israël chercherait à résoudre tout désaccord à huis clos – un message que Washington ne manquera pas d’apprécier profondément après les relations difficiles entre les deux pays durant la présidence Obama, lorsque M. Biden était vice-président.
M. Rivlin a également souligné l’importance pour la Maison Blanche de discuter de la question avec le nouveau Premier ministre israélien Naftali Bennett.
M. Biden semble avoir été attentif à cette recommandation, la Maison Blanche ayant annoncé son intention d’inviter M. Bennett à une rencontre avec le président américain dans un avenir proche. Le responsable diplomatique a déclaré que cette rencontre pourrait avoir lieu dans les semaines à venir.
Israël estime qu’il y a une urgence particulière à Washington pour une telle réunion, car les États-Unis espèrent signer un retour au JCPOA avant que le nouvel élu iranien, Ebrahim Raisi, ne prenne ses fonctions le 6 août, selon une source au fait de la question. Jérusalem ne sera peut-être pas en mesure de convaincre l’administration Biden d’emprunter une autre voie, mais la Maison Blanche souhaite toujours impliquer Israël autant que possible, a déclaré la source.
Néanmoins, M. Rivlin a déclaré aux journalistes après la réunion de lundi que « les choses sont encore loin d’être décidées », et le secrétaire d’État américain Antony Blinken a noté dimanche qu’un retour au JCPOA pourrait être « très difficile » si les pourparlers indirects entre l’Iran et les États-Unis à Vienne continuaient à traîner en longueur.
La délégation israélienne a également fait part de son inquiétude quant au vide créé par les efforts des administrations américaines successives pour retirer les troupes américaines et cesser leurs opérations dans la région, a indiqué le responsable diplomatique.
M. Rivlin a fourni à l’administration Biden des renseignements montrant comment ces politiques avaient conduit à un réchauffement des liens entre l’Iran et l’Arabie saoudite, les Émirats arabes unis et le Qatar, alliés de longue date des États-Unis. Un exemple partagé était le financement récent que le Qatar a fourni au Corps des Gardiens de la Révolution islamique d’Iran, a déclaré le fonctionnaire, notant que l’information avait également alarmé la partie américaine lors de la réunion.
Le nouveau gouvernement peut-il faire la paix ?
Bien qu’il ne s’agissait pas du thème principal de la réunion, les représentants de M. Biden ont tenu à soulever la question palestinienne. Le responsable diplomatique israélien a refusé de s’exprimer sur cette partie plus sensible de la réunion, mais une source américaine familière de la question a confirmé que les responsables américains avaient cherché à évaluer le point de vue de Rivlin quant à la volonté et à la capacité du nouveau gouvernement à entreprendre des efforts pour faire avancer la solution à deux États.
La même curiosité a été manifestée par une délégation bipartite de membres de la Chambre des représentants qui a rencontré Rivlin lundi soir, interrogeant le président sur ce qu’ils pouvaient attendre du nouveau gouvernement. Rivlin a exhorté les législateurs américains à juger le nouveau gouvernement par ses actions, plutôt que de spéculer.
M. Bennett est un opposant de longue date à la solution à deux États et a soutenu l’annexion de près de 60 % de la Cisjordanie, connue sous le nom de zone C. Toutefois, le mois dernier, il a précisé que son nouveau gouvernement – avec le parti Meretz à gauche et son parti Yamina à droite – ne prendrait pas de mesures radicales dans l’une ou l’autre direction concernant les Palestiniens et qu’il s’efforcerait de « réduire le conflit » dans la mesure du possible.
Rivlin a déclaré à Biden que l’aspect le plus remarquable du nouveau gouvernement était son inclusion d’un parti arabe islamiste pour la première fois dans l’histoire du pays, a noté le responsable diplomatique.
M. Biden a « souligné qu’il était important qu’Israël prenne des mesures pour assurer le calme et la stabilité, et pour soutenir de plus grandes opportunités économiques pour le peuple palestinien », selon le compte rendu de la Maison Blanche.
Résumant son impression de la position américaine sur la question, le responsable diplomatique a déclaré « qu’ils veulent le statu quo« , ajoutant que les États-Unis avaient souligné à plusieurs reprises leur opposition aux mesures unilatérales prises par l’une ou l’autre des parties, telles que la construction d’implantations, les démolitions de maisons, les expulsions, l’incitation à la violence ou les paiements aux terroristes.
Un responsable américain a déclaré au début du mois que si les Israéliens et les Palestiniens n’étaient peut-être pas prêts à entamer des pourparlers de haut niveau pour parvenir à une solution à deux États, les parties pouvaient prendre de petites mesures dans l’intervalle afin de ne pas perdre due vue cette perspective. Toutefois, les États-Unis reconnaissent que le nouveau gouvernement a besoin de temps pour se concerter avant d’être testé sur la question.
M. Rivlin a averti M. Biden qu’une solution à deux États ne serait pas possible sans la confiance entre les parties, a rappelé le responsable diplomatique, ajoutant que le président israélien avait fait part d’un récent sondage réalisé auprès du public palestinien, selon lequel le président de l’AP, Mahmoud Abbas, plus modéré, ne bénéficiait que du soutien de 27 % des personnes interrogées, contre 59 % pour Ismail Haniyeh, du Hamas.
Au lieu de cela, M. Rivlin a exhorté M. Biden à reprendre là où son prédécesseur Donald Trump s’est arrêté, en élargissant le groupe d’États arabes qui ont normalisé leurs relations avec Israël par le biais des accords d’Abraham, affirmant que Jérusalem apprécierait profondément de tels gestes.
L’administration Biden a insisté sur le fait qu’elle soutenait également un tel effort, mais a précisé que de tels accords devraient intégrer les Palestiniens dans l’équation plutôt que d’isoler Ramallah.
Selon le responsable diplomatique, M. Rivlin a également profité de la réunion de lundi pour demander à l’administration Biden des armes de précision supplémentaires suite à la guerre de Gaza du mois dernier. Le président israélien a souligné comment les combattants du Hamas s’immisçaient dans les populations civiles, et que des armes de pointe étaient nécessaires pour limiter les pertes civiles. Parmi les munitions demandées figurent des hélicoptères de combat tels que ceux utilisés pour combattre l’État islamique dans la péninsule du Sinaï, a précisé le responsable.
Joe le Fiable
Soulignant la volonté de M. Biden d’écouter les préoccupations israéliennes, le responsable diplomatique a déclaré que le président avait plusieurs fois rejeté les tentatives de son personnel de mettre fin à la réunion de lundi après qu’elle se soit prolongée, insistant sur le fait que les parties discutaient de questions importantes qui justifiaient le temps supplémentaire.
M. Rivlin est arrivé à Washington préoccupé par la position d’une portion du Parti démocrate à l’encontre d’Israël, mais il est reparti lundi convaincu que ces éléments n’avaient pas réussi à faire évoluer la position de M. Biden sur la question.
Les deux présidents se connaissent depuis 1971, lorsque Biden s’est rendu en Israël alors qu’il était jeune député et que Rivlin lui a fait visiter Jérusalem.
Avant la précédente visite de Rivlin à la Maison Blanche en tant que président en 2015, les responsables de la sécurité israélienne lui avaient demandé de pousser le président de l’époque, Barack Obama, à faire avancer le protocole d’accord sur l’aide américaine à la défense d’Israël.
Compte tenu de son amitié de plusieurs décennies avec Biden, Rivlin a demandé qu’il participe à la réunion avec Obama, a rappelé le responsable diplomatique, contre la volonté de certains membres de l’administration américaine. M. Biden avait fini par participer à la réunion, et c’est lui qui avait convaincu Susan Rice, conseillère à la sécurité nationale d’Obama, de soutenir le protocole d’accord de 38 milliards de dollars, selon le responsable diplomatique.
Ce sont de tels souvenirs qui ont amené Rivlin, lors de la réunion de lundi, à rappeler les paroles de l’ancien maire de Jérusalem Teddy Kollek, qui a dit : « Il n’est pas nécessaire d’être Juif pour être sioniste. »
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