Des femmes pilotes de tank demandent à être autorisées à servir dans les blindés
Les soldates ont déposé un recours auprès de la Cour suprême, forçant l'armée à expliquer sa décision de cesser l'intégration de femmes dans les unités de blindés
Judah Ari Gross est le correspondant du Times of Israël pour les sujets religieux et les affaires de la Diaspora.
Jeudi, deux femmes ont déposé un recours devant la Cour suprême pour demander le droit de servir dans un tank, se joignant aux deux autres soldates qui avaient déposé un recours similaire en septembre.
Les recours auprès de la Cour suprême sont basés sur un programme d’équipages de tanks entièrement féminins qui s’est terminé en 2018. À l’époque, Tsahal avait considéré qu’il s’agissait d’un succès.
Jeudi, deux membres de ce programme pilote, Asnat Levy et Noga Shina, ont déposé des recours devant la Cour suprême demandant à être autorisées à faire leur service de réserve comme pilotes de tanks. Selon elles, ayant validé la formation nécessaire, elles devraient être autorisées à servir dans un tank.
Il s’agissait du deuxième recours présenté à ce sujet. En septembre, deux recrues femmes – Or Abramson et Maayan Halbershtat – ont fait appel devant la Cour suprême pour les autoriser à officier dans des tanks quand elles devront rejoindre l’armée en mars 2020.
L’idée d’avoir des équipages entièrement féminins a été fortement critiquée quand elle a été annoncée en novembre 2016. À l’époque, un ancien général avait déclaré que l’idée était un complot des « gauchistes » pour affaiblir l’armée. D’autres avaient cependant salué le programme comme une mesure correctrice nécessaire.
L’armée a lancé son programme pilote en 2017 pour tester la viabilité d’équipages entièrement féminins qui opéreraient des tanks dans des opérations de sécurité de routine, au sein des frontières israéliennes ou juste au-delà, mais pas dans des guerres ou dans des combats loin derrière les lignes ennemies.
Le programme pilote s’est achevé en juin 2018, avec 4 des 13 participants terminant la formation de commandant de tank. « Le programme de formation a été couronné de succès, aussi bien d’une perspective instructive qu’opérationnelle. Les soldats ont atteint les objectifs qui leur avaient été fixés », avait alors déclaré le lieutenant colonel Benny Aharon, le chef de programme de formation des blindés.
Même si le programme a officiellement été considéré comme un succès, après des mois de discussions, l’armée a mis en pause la procédure pour former des équipages entièrement féminins, et le programme est toujours au point mort actuellement.
Le mois dernier, l’ancien chef de l’armée israélienne Gadi Eisenkot, qui a dirigé l’armée pendant toute cette période, expliquait qu’il avait évité de mettre en place le programme parce qu’il approchait de la retraite. Il avait le sentiment qu’il ne serait pas raisonnable d’adopter une mesure aussi compliquée à l’époque, laissant ainsi le dernier mot à son successeur, l’actuel chef de l’armée israélienne, Aviv Kohavi.
En avril 2019, l’armée avait annoncé que la proposition resterait au point mort pour le moment, citant des questions budgétaires et de personnel.
Depuis, des officiels de l’armée israélienne ont minimisé la réussite de l’initiative. Des officiers ont déclaré, de manière anonyme, au journal Ynet que certains des soldats qui avaient pris part au programme pilote n’avaient pas été en capacité d’exécuter toutes les manœuvres nécessaires pour opérer un tank.
Dans leur recours devant la Cour suprême en septembre, Abramson et Halbershtat avaient sommé l’armée d’expliquer pourquoi elle empêchait des femmes de servir dans un tank. Elles considéraient que « l’échec à intégrer des femmes dans des positions de combat constitue une violation de leur droit à l’égalité ».
Des détracteurs de l’intégration des femmes dans l’armée ont souvent critiqué la démarche comme une expérience sociale avec des répercussions potentielles pour la sécurité nationale. Les partisans de ces mesures ont généralement salué une initiative nécessaire depuis longtemps, initiative qui a déjà été appliquée dans de nombreux pays occidentaux.
Les détracteurs de l’initiative soulignent que certaines exigences pour les soldates en unité de combat ont été abaissées, ce qui, selon eux, serait un signe que l’efficacité de l’armée risquerait d’être sacrifiée. Ils affirment aussi que les soldates souffrent plus souvent de blessures liées au stress.
L’armée a souligné qu’elle autorise plus de femmes à servir dans des positions de combat pour des raisons pratiques, et non pas pour soutenir un programme politique. Elle a fait savoir qu’elle avait besoin de toutes les forces disponibles, femmes ou hommes.