Eizenkot et un ex-chef du Pentagone : le pacte de défense USA-Israël est inutile
Le lieutenant-général estime qu'Israël est tout à fait capable de se défendre sans traité américain, mais que celui-ci pourrait servir si l'Iran accède au nucléaire
Judah Ari Gross est le correspondant du Times of Israël pour les sujets religieux et les affaires de la Diaspora.
Lundi, un ancien secrétaire américain à la Défense et un ancien chef d’État-major de Tsahal ont rejeté une proposition de pacte de défense mutuelle américano-israélien, estimant qu’une telle mesure était inutile.
Ces derniers mois, le Premier ministre Benjamin Netanyahu a évoqué à plusieurs reprises la perspective d’un traité de défense entre Jérusalem et Washington.
Lundi soir, l’ancien chef d’État-major de l’armée israélienne, Gadi Eizenkot, a écarté l’idée d’un tel traité en ce moment, lors d’une manifestation organisée par l’Institute for National Security Studies (INSS), dont il est récemment devenu membre associé, basé à Tel Aviv.
« Ce n’est pas nécessaire, pas quand Israël est à son apogée de sa capacité militaire, comparé à ses ennemis. Ce n’est pas une chose qu’il est correct de proposer maintenant. Ce qu’il convient d’avancer maintenant, c’est la relation spéciale avec les États-Unis », a-t-il déclaré.
« Israël est un pays très fort, et nos ennemis le savent. Nous savons comment répondre à toutes les menaces auxquelles nous serons confrontés dans un avenir proche », a déclaré M. Eizenkot. « Israël se défend avec ses propres forces. »
L’ancien chef d’État-major de Tsahal, dont le mandat a pris fin en 2019, a noté que deux des exploits militaires les plus impressionnants de l’armée israélienne, l’opération Opéra en 1981, qui avait détruit un réacteur nucléaire irakien et l’opération Orchard en 2007 qui avait anéanti un réacteur syrien, n’auraient probablement jamais eu lieu, si Israël avait conclu un pacte de défense mutuelle avec les Etats-Unis à ce moment-là.
« Et à quoi aurait ressemblé le Moyen-Orient alors ? », a-t-il demandé de façon rhétorique.
Bien que le concept d’un pacte de défense mutuelle ait été évoqué à plusieurs reprises au cours des 71 ans d’histoire d’Israël, Netanyahu a donné un nouveau souffle à l’idée dans la période précédant les élections de septembre, et a depuis lors déclaré qu’il poursuit cette idée avec des responsables américains.
Les responsables américains sont restés pour la plupart muets sur la question. Le consensus général parmi les responsables de la défense israélienne est qu’un véritable pacte de défense mutuelle, similaire à ceux que les États-Unis ont avec d’autres pays, pourrait potentiellement lier les mains d’Israël et l’empêcher de mener les actions militaires qu’il estime nécessaires pour la sécurité de l’État juif.
Cependant, M. Eizenkot a déclaré qu’un tel traité de défense pourrait devenir nécessaire si l’Iran ou d’autres pays de la région se procuraient une bombe nucléaire.
« Peut-être que si les armes nucléaires entrent au Moyen-Orient et qu’il y a une menace existentielle [pour Israël], alors peut-être qu’un traité présente un intérêt », a-t-il dit.
L’ancien secrétair américain à la Défense, Ash Carter, qui participait également à l’événement, a convenu qu’il n’y avait pas besoin d’un pacte de défense entre les États-Unis et Israël, les deux pays étant déjà sur la même longueur d’onde.
« Je pense que nous – les États-Unis et Israël – pouvons avoir une vision claire de nos intérêts et savoir que même si ces intérêts ne sont pas identiques, ils se chevauchent considérablement. Cette idée que nous avons besoin les uns des autres est mieux que n’importe quel traité », a déclaré M. Carter, qui a été secrétaire à la Défense du président américain Barack Obama de 2015 à 2017 et a collaboré avec Eizenkot.
« Nous travaillons bien et efficacement ensemble sans avoir besoin d’un document écrit », a-t-il ajouté.
Compte tenu de la coopération de défense américano-israélienne déjà solide, l’officialiser dans un traité de défense mutuelle n’apporterait que peu ou pas d’avantages supplémentaires, selon de nombreux experts, y compris d’anciens diplomates et hauts responsables de la défense.
Au lieu de cela, avertissent ces critiques, cela pourrait entraver la liberté d’Israël d’agir militairement et pourrait inclure l’obligation d’envoyer des troupes en mission à l’étranger pour combattre dans les guerres mêlant les États-Unis.
Cependant, le mois dernier, l’ambassadeur d’Israël aux États-Unis, Ron Dermer, a affirmé que l’idée d’un pacte avait le soutien de hauts responsables de la défense israélienne, dont le chef d’État-major de Tsahal Aviv Kohavi et son conseiller en sécurité nationale Meir Ben-Shabbat.
Aucun des deux responsables n’a confirmé publiquement son soutien à cette idée.
L’équipe du Times of Israel a contribué à cet article.