En proie à des difficultés financières, le musée juif de San Francisco prend un « congé sabbatique »
Affecté par la baisse des visites et des dons, le musée va licencier les deux tiers de son personnel et tenter de se réorganiser
JTA — Confronté à une baisse devenue permanente du nombre de visiteurs et de dons depuis la pandémie de COVID-19, le Jewish Contemporary Museum [Musée juif contemporain] de San Francisco a annoncé mercredi sa décision de prendre un congé sabbatique.
Il s’agit là de l’expression utilisée par le musée pour évoquer la fermeture au public de ses galeries à compter du 15 décembre prochain, et pour une durée d’un an au moins, avec pour objectif de se concentrer sur la refonte de la stratégie financière et de la programmation de cette institution culturelle.
« Dans le judaïsme, le Shabbat – ou le sabbat – est un temps de repos, un moment essentiel dans la semaine conscré à la restauration et au renouveau », explique le musée dans un communiqué de presse annonçant sa décision. « La culture juive fourmille de références à ces moments de pause, qui permettent de se régénérer. »
Les données financières disponibles font état d’une fréquentation divisée par deux par rapport au niveau d’avant la pandémie et d’un déficit de plusieurs millions depuis au moins deux ans.
Les difficultés économiques auxquelles fait face le musée sont monnaie courante dans le milieu des institutions culturelles, aux États-Unis, et sont aggravées par le contexte inhérent au centre-ville de San Francisco, qui se vide de ses commerces et de ses habitants dans une atmosphère peu porteuse pour la vie civique.
Cette décision conduit à la mise à pied d’ici mars prochain des deux tiers des 30 employés du musée.
« Il est préférable pour nous de prendre les mesures nécessaires à la restructuration maintenant, au lieu d’attendre de ne plus avoir le choix », explique le directeur exécutif du Jewish Contemporary Museum, Kerry King, par voie de communiqué.
« Cette décision ne va pas sans son lot de douleur, car elle va affecter une équipe extraordinaire et profondément dévouée à la mission du musée. »
Fondé en 1984, le musée s’est installé à son emplacement actuel en 2008, dans un bâtiment du centre-ville de San Francisco conçu par le célèbre architecte juif Daniel Libeskind. Dépourvu de collections permanentes, le Jewish Contemporary Museum a jusqu’à présent exploré la richesse des thèmes juifs à travers des expositions temporaires et des programmes éducatifs adossés à des œuvres d’art contemporain constamment renouvelées.
Ces dernières années, le musée a organisé des expositions autour de l’artiste féministe Judy Chicago ou de l’auteur-compositeur-interprète Leonard Cohen. En 2022, plusieurs artistes ont contribué par des œuvres liées au concept juif de tikkoun – réparation -, présenté comme « un phénomène de soin et d’interconnexion fondé sur l’action personnelle, la responsabilité environnementale et la communauté, qui a su évoluer au fil de l’histoire ».
Les tensions politiques et culturelles de grande ampleur générées par les réactions à la guerre entre Israël et le Hamas n’ont pas épargné le musée.
En avril dernier, avant l’ouverture de l’exposition California Jewish Open, sept des 54 artistes participants, qui se qualifient d’anti-sionistes, s’en sont retirés en signe de protestation contre Israël. Les artistes avaient demandé au musée de se joindre au boycott en se privant de tout investissement ou financement lié à Israël.
Un autre grand musée juif des Etats-Unis, le Weitzman National Museum of American Jewish History [Musée national Weitzman pour l’histoire juive américaine], à Philadelphie, tente de se faire une place au sein du réseau Smithsonian afin de garantir sa pérennité financière.
L’entrée du Jewish Contemporary Museum est gratuite jusqu’au 15 décembre, date de fermeture des portes.