En solidarité, des Israéliens de gauche tentent d’apporter de l’aide aux Gazaouis
Un convoi de couches, de lait maternisé, de sucre, de farine, de plats et de dattes pour le ramadan a été refoulé à 3 km de Kerem Shalom, mais Standing Together réessayera bientôt
Quelques dizaines de jeunes activistes israéliens ont organisé jeudi un très symbolique convoi d’aide alimentaire vers la bande de Gaza.
Une trentaine de véhicules, un peu plus de militants, un camion de sept tonnes à peine rempli : le convoi organisé par Standing Together, une organisation qui prône la coexistence et revendique 5 000 membres, était éminemment symbolique.
Mais le but est de faire entendre « une autre voix » et de démontrer « qu’il y a des gens dans notre société estimant que ce qui se passe à Gaza est inacceptable », a martelé Nadav Shofet, l’un des organisateurs de l’opération, la première du genre depuis le début de la guerre entre Israël et le groupe terroriste palestinien du Hamas.
La guerre à Gaza a éclaté lorsque le Hamas a envoyé 3 000 terroristes armés en Israël, le 7 octobre, pour mener une attaque meurtrière au cours de laquelle ils ont tué près de 1 200 personnes. Les terroristes ont également pris en otage 253 personnes, pour la plupart des civils, et les ont emmenées à Gaza.
Israël a réagi en lançant une opération militaire dont l’objectif vise à détruire le Hamas, à l’écarter du pouvoir à Gaza et à libérer les otages.
Plus de 31 000 personnes seraient mortes à Gaza depuis le début de la guerre, selon le ministère de la Santé dirigé par les terroristes du Hamas. Les chiffres publiés par le groupe terroriste sont invérifiables, et ils incluraient ses propres terroristes et hommes armés, tués en Israël et à Gaza, et les civils tués par les centaines de roquettes tirées par les groupes terroristes qui retombent à l’intérieur de la bande de Gaza. L’armée israélienne affirme avoir tué plus de 13 000 membres du groupe terroriste à Gaza, en plus d’un millier de terroristes à l’intérieur d’Israël le 7 octobre et dans les jours qui ont suivi l’assaut.
Comme lui, les jeunes militants, qui se retrouvent tôt le matin sur un parking d’une gare de Tel Aviv, se disent révoltés par la situation humanitaire « insupportable » dans l’enclave où, selon l’ONU, 2,2 millions de personnes, soit l’immense majorité de la population, seraient menacées de famine.
S’ils arboraient pour la plupart des tee-shirts violet avec l’inscription « N’affamez pas la population de Gaza ! », tous prenaient aussi soin d’attacher au rétroviseur de leur voiture le ruban jaune symbolisant la nécessité du retour des otages israéliens encore retenus à Gaza. 130 otages enlevés par le Hamas le 7 octobre sont encore à Gaza – mais trente et un ne seraient plus en vie.
Ces activistes sont conscients de marcher sur une ligne de crête. « Notre combat contre le Hamas est justifié », a répété, en préambule et à maintes reprises, Orly Shay Keslassy, une orthophoniste de 39 ans.
« Mais nous ne pouvons ignorer qu’il y a des millions d’innocents à Gaza. Je ne peux pas, en tant qu’Israélienne, vivre en sachant que mon gouvernement leur refuse de la nourriture et des médicaments », a-t-elle ajouté.
« C’est une honte ! »
Dans le camion, ont été chargés des couches et du lait pour bébé, des paquets de sucre, de farine, des aliments prêts à cuisiner, des « dattes pour le ramadan ». Le contenu apparaît dérisoire, mais l’opération de collecte n’a été lancée que mardi, ont souligné les organisateurs.
Le convoi s’est ébranlé, sous l’œil noir d’Ilan Enia, un chauffeur routier. « Qu’ils aillent se faire foutre. C’est une honte, une honte, d’envoyer des camions à Gaza alors que nos soldats se font tuer », s’est-il agacé.
Le convoi a rejoint Ashkelon, à une cinquantaine de kilomètres plus au sud, où de nouvelles voitures et de nouveaux chargements se sont joints au cortège.
En route pour Kerem Shalom, point de passage entre Israël et la bande de Gaza, par où transitent au compte-gouttes des camions d’aide humanitaire.
La route empruntée par le convoi passait devant les kibboutzim Kfar Aza et Beeri, où ont été tuées près de 200 personnes lors de l’attaque menée par le Hamas le 7 octobre dans le sud du pays. Et par Reïm, théâtre de la plus grande tuerie, où les terroristes du Hamas ont massacré 364 jeunes lors du festival Supernova.
« Des gens ont été tués ici ! Honte à vous qui voulez nourrir les terroristes ! », a hurlé un homme, tandis qu’au loin, on entendait les bombardements israéliens sur Gaza. Comme si toutes les douleurs s’entrechoquaient en un seul lieu.
« Je ne crois pas que les gens sont méchants, je pense juste qu’ils souffrent terriblement et n’ont aucun espace pour avoir de l’empathie pour les autres », a estimé Roy Hoschem, étudiant chef d’orchestre et membre du convoi.
« Douleur contre douleur »
Visiblement ébranlée, l’orthophoniste Keslassy a tenté d’expliquer « la grande confusion » qui domine, selon elle, la société israélienne.
« On est dans un schéma douleur contre douleur. Le Hamas a tué des innocents mais ce n’est pas une raison pour le faire à notre tour », a confié cette mère de deux enfants. « Je veux penser que je vis dans un pays démocratique et moral. »
À trois kilomètres du check-point de Kerem Shalom, la police bloquait les activistes et leur ont intimé de faire demi-tour. Ils sont rapidement repartis, presque sans discuter, résignés.
« Nous recommencerons. Nous réessayerons », a assuré, les larmes aux yeux, Rula Daoud, l’une des organisatrices.