Enquête de la FIFA sur Jibril Rajoub pour promotion du terrorisme et incitation
Un courrier adressé au chef du football palestinien stipule que l'instance dispose de preuves de violations de son règlement; il risque une amende et 5 ans d'interdiction

La fédération internationale de football a ouvert une enquête, au début de l’année, sur le chef de la Fédération palestinienne de football, Jibril Rajoub, qui est soupçonné d’avoir contrevenu aux statuts de l’instance en glorifiant le terrorisme et en incitant à la haine et à la violence, selon un site internet pro-palestinien et une ONG israélienne.
La commission d’éthique de la FIFA a ainsi envoyé un courrier à Jibril Rajoub, au mois de janvier, affirmant qu’elle avait des preuves apparentes de violations du règlement intérieur de la FIFA. Il lui était demandé de répondre par écrit s’il voulait contester les exemples de violations présentés dans la lettre – notamment une plainte déposée en 2017 par Palestinian Media Watch (PMW).
Cette missive confidentielle a fuité, la semaine dernière, sur le site internet pro-palestinien Electronic Intifada.
« La commission d’éthique de la FIFA a ouvert ces enquêtes après avoir déterminé que, sur la base de documents et d’une preuve soumise par Palestinian Media Watch… il y avait des preuves recevables attestant de possibles violations du code éthique de la FIFA », dit le courrier.
La lettre écrite par le chef des enquêtes de la commission d’éthique, Martin Ngoga, cite de nombreux exemples présumés de « promotion et de glorification du terrorisme », « d’incitation à la haine et à la violence », « de déclarations discriminatoires/dénigrantes qui empêchent l’utilisation du football comme passerelle vers la paix », et « d’utilisation du football pour faire la promotion d’un agenda politique ».

Parmi les exemples qui, dans leur majorité et selon PMW, sont soutenus par des preuves vidéo, la permission accordée par Rajoub de donner à des tournois et à des équipes de football les noms de terroristes condamnés ayant tué des civils israéliens, le soutien apporté à une vague d’attaques au couteau en 2015-2016 et à l’enlèvement de soldats israéliens.
Il aurait refusé par ailleurs que le football puisse servir de passerelle entre Israël et les Palestiniens, se serait référé aux Israéliens comme à des « fils de pute » et aurait comparé l’Etat juif à Adolf Hitler et auxnazis, tout en utilisant son poste pour tenter de faire interdire Israël dans la FIFA et pour promouvoir ses objectifs politiques et ceux de son parti du Fatah.
Le courrier demandait que Rajoub apporte une réponse à ces accusations avant le 18 janvier 2019.
A la question : « Jibril Rajoub a-t-il répondu à la lettre ? », la vice-présidente de la fédération, Susan Shalabi, a indiqué ne pas avoir de commentaire à faire pour le moment, citant le règlement de la FIFA.
Si Rajoub est déclaré coupable, a fait savoir PMW, il pourrait écoper de lourdes amendes et d’une interdiction de prendre part à des activités liées au football pendant cinq ans.
Le directeur de PMW, Itamar Marcus, a salué cette décision dans une déclaration faite mercredi, ajoutant que : « C’est humiliant que la FIFA puisse permettre à un soutien du terrorisme qui utilise un langage vil et raciste d’occuper un poste qui lui permet de bénéficier de la bonne réputation de la fédération. Au lieu d’utiliser ce beau sport pour construire des ponts et promouvoir la paix et la coexistence, Rajoub utilise sa fonction pour inciter à la violence et promouvoir et glorifier le terrorisme ».
« J’ai l’espoir que maintenant et une fois pour toutes, la FIFA va renvoyer de manière permanente Rajoub de tout poste qu’il pourrait occuper en son sein et enlever cette tâche sur le football international », a-t-il ajouté.
Au mois d’août 2018, la FIFA avait sanctionné Rajoub – qui avait été interdit de stade pour une année et qui avait écopé d’une amende de 20 000 francs suisses – pour « incitations à la haine et à la violence » après qu’il a appelé les supporters à brûler leurs posters et leurs maillots de la superstar Lionel Messi si ce dernier participait à un match opposant l’équipe d’Argentine et la formation israélienne à Jérusalem, comme prévu au mois de juin de cette année-là.
Rajoub purge actuellement son interdiction de stade de 12 mois qui expirera au mois d’août, même s’il est encore autorisé à diriger la fédération et assister aux rencontres de la FIFA. Il est impossible de dire pour le moment si l’enquête de la FIFA se terminera avant l’expiration de la sanction.
L’intéressé avait nié tout acte répréhensible après l’énoncé de l’interdiction.

« C’est une décision injuste et politique, une décision israélienne », avait-il déclaré, soulignant que la plainte à son encontre était venue de la fédération israélienne de football et non des Argentins.
La fédération palestinienne avait également fustigé une décision partiale et « absurde ».
Rajoub avait été filmé disant en arabe : « Nous prendrons Messi pour cible et nous demandons à tous de brûler son maillot, ses photos, et de l’abandonner ».
L’Argentine avait finalement annulé le déplacement à Jérusalem pour le match du 9 juin, qui devait servir de dernière rencontre d’échauffement avant la Coupe du monde 2018.
Le ministre argentin des Affaires étrangères Jorge Faurie avait déclaré à l’époque que les joueurs s’étaient sentis »totalement agressés, bafoués » après l’apparition d’images du maillot de la sélection argentine teintées d’une peinture rouge ressemblant à du sang.
Cette sanction avait été un coup humiliant porté à Rajoub, qui exerce depuis longtemps des pressions à la FIFA pour qu’elle prenne des mesures contre Israël pour ce que le chef de la fédération palestinienne qualifie de « restrictions imposées au déplacement des joueurs palestiniens ».
Israël, pour sa part, avait déclaré à ce moment-là que la campagne palestinienne était une tentative de politiser le sport. L’Etat juif avait ajouté que les restrictions occasionnelles placées sur les joueurs palestiniens – en particulier dans la bande de Gaza, dirigée par le Hamas – étaient motivées par des inquiétudes sécuritaires.
Adam Rasgon a contribué à cet article.